Le trio Ministère de l’Administration Territoriale, celui de l’Urbanisme et le Gouvernorat du District de Bamako est appelé à la rescousse pour désamorcer une bomme à retardement, la communauté musulmane locale étant sur pied de guerre.
Une affaire qui fait dormir débout, replonge la Mairie de la Commune IV du District de Bamako au centre d’une polémique qui, si rien n’est fait, risque de créer une tension sociale dans le fief du Président de la République, Ibrahim Boubacar KEÏTA. Un groupe de jeunes aidé financièrement par un Général de l’Armée malienne, habitant le même secteur veut faire du site destiné à la construction de la Mosquée, un espace de loisirs et de divertissement. Ce qui justifie, selon les membres du Comité de gestion des musulmans de la Section C de Lafiabougou, la clôture de l’espace en question par le Général.
LES FAITS
Les faits se passent dans le lotissement de Lafiabougou Section C, précisément dans la rue du célèbre artiste malien, feu Aly Farka Touré. Un espace convoité par le Comité de Gestion des Musulmans de la Section C de Lafiabougou où les fidèles prient depuis bientôt 40 ans. Selon des autochtones, l’espace a été mis à leur disposition par le Gouvernorat du District de Bamako, suivant décision N°271/GDB/CAB du 20 Mai 2004, portant mise à la disposition de la Mairie de la Commune IV du District de Bamako d’une parcelle à usage de Mosquée, sise à Lafiabougou. L’article 1er de cette décision stipule que «La parcelle de terrain de forme rectangulaire, de dimensions 56.00m x 30.00m du lotissement de Lafiabougou/Section C, est mise à la disposition de la Mairie de la Commune IV du District de Bamako pour la construction d’une Mosquée au profit du Comité de Gestion des Musulmans de la Section C de Lafiabougou». Comme pour sa part, la Mairie de la Commune IV du District de Bamako a, par décision N°0027/MCIV-DB du 19 aout 2004 avec ampliation aux services techniques, validé la décision du Gouverneur d’alors. L’article 3 de la décision N°0027/MCIV-DB du 19 aout dit clairement que : «le Secrétaire Général, le 2ème Adjoint au Maire de la Commune IV, le Bureau local Domaine de la Mairie de la Commune IV, le Bureau local DRUH de la Mairie de la Commune IV sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution de la présente décision qui sera communiquée partout où besoin sera». Et comme pour lever tout équivoque sur la question de construction de la Mosquée, le Gouvernorat du District de Bamako a décidé de la création d’une Mosquée dans le quartier de Lafiabougou suivant décision N°069/GDB.CAB. L’arbre ne doit pas cacher la forêt.
Le Maire Adama Berthé semble atteint de somnambulisme. Cela est d’autant vrai que l’ordre d’encaissement d’un montant total de 50.000 F.CFA (voir facsimilé) a été entièrement versé par le Comité de gestion à la Direction Régionale de l’Urbanisme et de la Construction au titre de frais de dépôt pour Autorisation de construire. Ce, depuis le 29 juillet 2004.
LES YEUX BANDES DE LA MAIRIE DE LA C.IV:
Pour en savoir davantage sur cette scabreuse affaire foncière, nos investigations nous ont conduits à la Maire de la Commune IV où le Service de l’urbanisme et de l’habitat dit n’avoir pas connaissance des documents émis par le Gouvernorat du District. Mieux, aucune spécification sur les documents en question, renchéri le responsable du Service de l’urbanisme de la Mairie de la Commune IV.
Le site litigieux, peut-on le dire ainsi, est considéré par la Mairie comme un trou d’air sur lequel nul ne peut construire. M. Alkassoum Maïga, Maire Adjoint Chargé du Cadre de Vie, Voirie, Assainissement et Urbanisme confirme avoir délivré une Autorisation administrative pour juste la clôture de l’espace : «C’est un trou d’air qui n’est pas à construire. Un devis de plus de 6 millions F.CFA nous a été présenté par les responsables de l’Association Gnogon Démé Sanuya. Ce n’est pas un espace de divertissement», précise-t-il.
«Une autorisation administrative est accordée à l’Association Gnogon Demè Sanuya pour les travaux de clôture de l’espace public sis au prolongement des rues 362, 364 et 366 en face de la maison de feu Aly Farka TOURE à Lafiabougou. L’Association Gnogon Demè Sanuya se conformera à la règlementation en vigueur en matière d’aménagement d’espace public. La vocation reste toujours espace public de loisir pour la population et non spécifiquement un terrain de sport», signe le Maire Adjoint, Alkassoum Maïga. Le document ainsi paraphé donne l’autorisation à l’Association d’effectuer les travaux sur le site de la Mosquée.
UN GENERAL DU GENIE MILITAIRE INDEXE !
Toujours au cours de nos investigations, les soupçons qui pesaient sur un haut gradé de l’armée malienne d’être derrière les travaux de clôture de l’espace ce sont en partie confirmés. «Nous avons sollicité et obtenu le soutien du Général pour nous aider dans les travaux de clôture. Nous avons même présenté à la Mairie le plan et le devis estimatif. Les travaux sont en cours et notre objectif est de sécuriser l’endroit pour éviter que la Mairie et d’autres prédateurs fonciers ne le prennent», nous confie un responsable de l’Association Gnogon Demè dans la cour de la mairie de la Commune IV où nous avons jeté un regard indiscret sur les dossiers. Mais, comme le pense-t-on dans les rangs de la communauté musulmane locale, l’espace sera-t-il dédié à la vente d’alcool et à la réception de filles de joies ? Sur la question, l’Adjoint au Maire de la Commune IV, Alkhassoum Maïga a été on ne peut plus clair : «L’espace sera dédié uniquement aux évènements sociaux comme les mariages, les décès, et le culte. Je veux dire que les gens peuvent toujours continuer à y prier comme d’habitude». Vrai ou faux ? La question qui taraude les esprits est l’intérêt que porte le général à la clôture de l’espace. Surtout que c’est un investissement de plus de 6 millions de nos francs. Y’aurait-il retour sur investissement ? C’est là toute l’inquiétude de la Communauté musulmane locale décidée à rentrer dans ses droits sur ce terrain à elle attribué par le Gouvernorat du District de Bamako.
Aux dernières nouvelles, les autorités compétences, en l’occurrence le Président de la République ont été saisies pour intervention.
Affaire à suivre !
Boubacar KANTE
Le Progrès