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Circulation routière du Mali : Le PV de contravention, mode d’emploi

Dans cet entretien, le commandant de la Compagnie de la circulation routière(CCR), le commissaire divisionnaire Abdoulaye Coulibaly explique les modalités d’utilisation de ce document délivré aux usagers en infraction. L’officier de police aborde aussi les difficultés liées à l’exécution correcte des missions de sa compagnie et lance un appel à l’endroit des usagers

 

L’Essor : Quelle sont les principales missions de la Compagnie de la circulation routière ?

Abdoulaye Coulibaly : Nous avons une mission très complexe, multiple et variée, pour la simple raison qu’elle consiste essentiellement à la sécurisation des personnes sur la voie publique. Il s’agit de tous les usagers (engins à deux ou quatre roues, piéton…) tant que ces derniers sont sur la voie publique. Nous avons aussi pour mission la sécurisation du mouvement des hautes autorités de la République lorsque celles-ci quittent un point A vers un point B, l’escorte des fonds et des engins lourds.

La CCR est également chargée de mener des patrouilles de grande envergure. Nous avons toute une panoplie de missions qui consistent à assurer la sécurité routière dans le District de Bamako et des Maliens en général.

L’Essor : Dans l’exécution de ces différentes missions, quelles sont les principales infractions relevées dans la circulation routière et comment se font les constats sur le terrain ?

Abdoulaye Coulibaly : À travers le District de Bamako, nous couvrons plus de 90 carrefours, rien que dans la ville sans compter les postes de sortie de Sénou et Zantiguila. Il s’agit des carrefours de circulation et de fluidité. Lorsque vous voyez un policier dans un carrefour de circulation, il est chargé non seulement d’assurer la fluidité de la circulation mais aussi de procéder au contrôle des documents administratifs des engins.

Cependant, au niveau des carrefours de fluidité, les agents en poste sont chargés d’assurer la fluidité de la circulation pendant les heures de pointe(le matin entre 06h et 10h et dans l’après-midi de 15h à 20h voire 22h). Donc ces policiers sont là uniquement pour la fluidité ; ils n’ont pas le droit de contrôler ; ils contribuent à la fluidité de la circulation.

Les policiers qui sont au niveau des grands carrefours incontournables sont chargés en un moment de la journée, au-delà de 09h à 10h, de procéder au contrôle des documents. Au cours de ces contrôles, les infractions les plus visibles sont entre autres l’invalidé des documents administratifs (documents périmés, incomplets ou inexistants).

Il y a également le cas des usagers qui ont des documents conformes mais qui se rendent coupables du non-respect aux feux rouges et de refus d’obtempérer. S’y ajoute souvent la circulation en sens interdit. Bref, toutes les contraventions qui contribuent à nuire à la bonne marche de la circulation. Donc, les agents sont à ce niveau pour sanctionner ces comportements.

L’Essor : Quid des PV de contravention sur le terrain ?

Abdoulaye Coulibaly : Pour gérer cette fluidité à travers Bamako, nous avons mis en place une stratégie qui consiste à faire le maillage de la ville de Bamako avec la mise à disposition des «PV» de contravention initiés par les plus hautes autorités depuis septembre 2019.

Auparavant, lorsque les usagers étaient interpellés, ils étaient invités à se présenter au niveau du GMS pour s’acquitter de leur contravention. Dans le même esprit de fluidifier la circulation, nous avons déployé des policiers qui ont une somme d’expériences et qui peuvent gérer au mieux les conflits entre les usagers et les jeunes policiers. C’est pourquoi, vous retrouverez au niveau de chaque carrefour des policiers suffisamment expérimentés, d’un certain âge (appelés superviseurs), qui apprécient tout ce qui se passe au niveau de ces postes afin de faire en sorte que les usagers ne soient pas lésés et que les policiers puissent travailler dans les conditions optimales.

C’est à eux que revient la charge de la délivrance de ces PV de contravention. Il faut également souligner que ces superviseurs ont dû suivre une formation de deux semaines, au cours de laquelle, ils ont appris à renseigner les PV de contravention et à comprendre les différents textes qui régissent la circulation à travers la ville, et le pays. C’est après cette formation qu’ils ont été envoyés au niveau de ces différents carrefours.

À la date d’aujourd’hui, nous avons 43 carrefours à travers le District de Bamako où vous avez des superviseurs. Et ces superviseurs sont munis des différents textes qui régissent la circulation routière. Je prends l’exemple du non-respect des feux rouges. La carte grise est saisie et remise au superviseur par l’agent interpellateur. Tout de suite, le superviseur notifie votre contravention au non-respect des feux rouges et vous montre le texte qui est à la base de cette contravention sur la voie publique. Le montant est de 2.000 Fcfa pour le non-respect aux feux rouges.

L’Essor : Comment fonctionne la délivrance des PV sur le terrain ?

Abdoulaye Coulibaly : Le PV de contravention comporte trois volets : le premier est agraffé à la carte grise et le deuxième volet vous est remis. Si vous avez les ressources pour payer les 2.000 francs, vous le faites. Sinon, vous avez un délai de huit jours pour le faire au GMS. Le troisième volet est conservé à titre de témoin en cas de désaccord et de contrôle. C’est dire que si vous avez l’argent vous payez, vous aurez votre reçu sur le champ.

Si vous n’êtes pas en mesure de payer sur place, vous repartez avec un volet. Votre carte grise est saisie à laquelle est apposée le deuxième volet et le troisième reste à la souche. Lorsque vous venez au GMS, on vérifie et on trouve que votre volet correspond à celui apposé à votre carte crise. C’est en ce moment que vous payez pour récupérer votre carte grise.

Cette opération a commencé le 25 septembre 2019. Nous avons fait un bilan et identifié les difficultés et les perspectives. En une année, nous avons obtenu un montant de 144 millions 500 mille francs CFA. C’est ce montant que nous avons mobilisé et versé au Trésor public. Nous n’allons pas nous vanter de cette mobilisation de fonds. Notre souci est de faire en sorte que nos compatriotes puissent changer de comportement et de mentalité.

L’Essor : Le policier peut-il contrôler à tout moment et en tout lieu ?

Abdoulaye Coulibaly : Tous les problèmes au niveau de la circulation routière se résument au non-respect des règles du code de la route. Par rapport au contrôle routier, les policiers sont chargés de contrôler tous les usagers qui sont sur la place publique. Je prends un exemple du contrôle des vignettes. Qu’il s’agisse des engins à deux, trois et quatre roues voire plus, il y a deux types de contrôle. Le premier consiste pour les policiers qui sont au niveau des carrefours de contrôler à tout moment les vignettes, à condition que les usagers commettent une contravention sur la voie publique.

Cela veut dire qu’il ne s’agit pas là de contrôles systématiques mais occasionnels à la suite de la commission d’une contravention sur la voie publique. Le deuxième type est le contrôle ciblé sur un axe ou un certain nombre de carrefours à travers la ville où toutes les vignettes seront systématiquement contrôlées. Mais ce contrôle systématique se fait en présence des agents de la Mairie et des Impôts. Aujourd’hui, les difficultés que nous rencontrons concernant le contrôle routier se résument notamment aux usagers circulant avec des engins non identifiés.

Lorsque ceux-ci venaient à être à l’origine d’un accident sur la voie publique, c’est difficile de les retrouver. Cependant, nous reconnaissons que certains compatriotes sont victimes de lenteurs administratives et circulent dans des véhicules immatriculés en «CH» alors même qu’ils se sont acquittés de toutes les formalités requises.

Nous avons donné instruction à nos agents pour que tout usager en règle et qui dispose d’une carte grise provisoire en cours de validité, dispose du droit de circuler librement sur toute l’étendue du territoire national. Mais, lorsque ce document provisoire est périmé, le citoyen en question se verra dans l’obligation de garer son engin et de se retourner vers l’administration pour récupérer sa carte grise et la plaque d’immatriculation.

L’Essor : Les véhicules des membres des forces armées et de sécurité ne sont généralement pas immatriculés. Qu’en dites-vous ?

Abdoulaye Coulibaly : À ce sujet, il faut rappeler qu’il y’a un projet en cours pour permettre à ces porteurs d’uniformes d’être subventionnés à travers une exonération pour que leurs véhicules soient dédouanés. Ce, pour que tout le monde soit au même niveau par rapport au respect des règles du code la route. Nous pensons que les jours à venir ce projet sera une réalité pour que les Maliens soient tous égaux devant la loi.

L’Essor : Le policier doit-il s’adonner à une poursuite à vue sur la voie publique ?

Abdoulaye Coulibaly : Nous allons continuer à travailler avec le plus de professionnalisme, puisqu’il ne sert à rien de courir derrière les gens dans la ville de Bamako et provoquer de l’insécurité que nous sommes censés combattre. Notre mission est de faire en sorte, que tous ceux qui ne sont pas en règle puissent être interpellés et verbalisés dans les règles de l’art. C’est pourquoi nous avons clairement donné l’instruction d’éviter de poursuivre les gens à cause d’une simple contravention.

Toutefois les usagers, auteurs d’accident avec délit de fuite, de vol, c’est-à-dire soustraction d’objets d’autrui (téléphones ou sacs à main, braquage…) peuvent être poursuivis et interpellés par tout policier, afin d’être mis à la disposition d’un commissariat qui se chargera de le déférer devant un tribunal compétent.

L’Essor : Les missions se résument-elles uniquement à la répression pure et dure ?

Abdoulaye Coulibaly : Il faut d’abord rappeler aux usagers que nous sommes la police nationale, et que notre mission fondamentale est la sécurisation des usagers de la voie publique. À ce titre, nous procédons à des campagnes de sensibilisation, d’information et d’éducation. Notre rôle ne se résume pas seulement à la répression des infractions sur la voie publique. Donc au-delà de la prévention, nous verbalisons.

Notre mission est un service d’État très délicate comme celle de toutes les polices dans tous les pays du monde. Nous demandons à la population de nous comprendre. Plus l’usager est correct sur la voie publique, plus le policier rend un service de qualité.

Chaque fois qu’il y a des incompréhensions dans l’interprétation d’une infraction, le comportement d’un agent, la hiérarchie est la voie de recours au niveau du GMS, précisément auprès du bureau du commandant de la CCR. Celui-ci réexamine les interprétations et si possible mène des enquêtes pour voir qui a raison et qui a tort. Si c’est le policier, immédiatement des sanctions sont infligées et si c’est l’usager, il sera recadré et verbalisé. Par ailleurs, j’invite les usagers à respecter les policiers et la police nationale, parce que nous ne sommes pas des ennemis. Le policier est là pour servir la population sans laquelle notre présence ne se justifie pas sur la voie publique.

Propos recueillis par Aboubacar TRAORÉ

Source : L’ESSOR

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