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Ciel unique africain : déjà 28 Etats signataires, mais encore des réticences

Le Marché unique du transport aérien africain (MUTAA) tend progressivement vers son effectivité. Officiellement lancé le 28 janvier 2018 en Éthiopie, le projet du ciel unique africain fédère aujourd’hui plus de la moitié des 54 pays africains. Alors qu’il s’achemine vers son opérationnalisation, le MUTAA fait cependant face à quelques réticences.

Les attentes escomptées du ciel unique africain

Projet phare de l’Agenda 2063 de l’Union africaine, le Marché unique du transport aérien en Afrique est le résultat de l’application immédiate des principes de la Décision de Yamoussoukro (Côte d’Ivoire) adoptée en 1999 qui libéralise les transports aériens sur le continent.

À ce jour, vingt-huit* pays ont signé l’engagement solennel à l’adhésion au MUTAA, qui représentent une population totale de plus de 710 millions de personnes, soit plus de la moitié de la population du continent.

Pour Dr Amani Abu-Zeid, commissaire aux infrastructures et à l’énergie de l’Union africaine, le MUTAA va permettre « l’amélioration des niveaux de service aérien, renforcera la concurrence entre les itinéraires ce qui entraînera des tarifs plus compétitifs, stimulera le volume des trafics supplémentaires, favorisera le commerce, les investissements et d’autres secteurs de l’économie et entraînera un accroissement de la productivité et une augmentation de la croissance économique et de l’emploi, ainsi qu’une forte contribution à l’intégration africaine ».

Une étude commandée en 2015 par la Commission Africaine de l’aviation Civile (CAFAC) et l’IATA a montré qu’une libéralisation des transports aériens entre douze pays africains (Algérie, Angola, Égypte, Ethiopie, Ghana, Kenya, Namibie, Nigéria, Sénégal, Afrique du Sud, Tunisie et Ouganda) augmenterait le PIB de 1,3 milliard de dollars et créerait plus de 155 000 nouveaux emplois. Le consommateur pourrait bénéficier d’une augmentation de 75% des services directs, de 25 à 35% d’économies tarifaires (estimées à 500 millions de dollars US).

Les réticentes persistent

La libéralisation du ciel africain ne va cependant pas sans crainte. Certains estiment qu’une levée de verrous sur l’exploitation des lignes entraînera des pertes de parts de marché pour leurs compagnies nationales, déjà loin d’être en bonne santé financière.

Ce point de vue est soutenu par les transporteurs eux-mêmes qui évoquent par ailleurs la concurrence déloyale dans un environnement compétitif. Pour eux, l’uniformisation des redevances aéroportuaires, des taxes, et le rééquilibrage du prix du carburant restent trois leviers qui devraient être pris en compte si l’on souhaite faire profiter des bénéfices du ciel unique africain à tous les pays.

D’autres Etats expriment leurs inquiétudes à voir l’apparition de nouvelles compagnies africaines dont les actionnaires pourraient être en réalité des investisseurs occidentaux qui disposent d’importantes ressources financières. Avec des flottes plus modernes et une stratégie d’expansion agressive, ces nouveaux transporteurs entraîneraient la disparition des compagnies aériennes existantes.

Pour l’équité dans MUTAA, ils placent la libre circulation des personnes et du commerce entre pays comme préalable fondamental pour sa bonne implémentation.

Des démarches institutionnelles qui rassurent

Plusieurs mécanismes institutionnels sont en train d’être déployés pour permettre à la Commission Africaine de l’Aviation Civile (CAFAC) de jouer efficacement son rôle d’agence d’exécution de la Décision de Yamoussoukro et du MUTAA.

« Des documents sur les règles de concurrence, le règlement des différends et le cadre institutionnel ont été publiés », explique Tefera Mekonnen, le nouveau secrétaire général de la CAFAC, « nous prévoyons d’organiser des ateliers de sensibilisation dans chaque communauté économique régionale ».

La CAFAC collabore ainsi avec plusieurs intervenants sectoriels dans le processus à l’instar de l’Union africaine, l’OACI et l’IATA. La Banque Africaine de Développement a mis à disposition 4,7 millions de dollars ainsi que l’Union européenne qui a également alloué un million d’euros pour soutenir l’initiative.

La réussite du ciel unique africain, soutient l’Union africaine, passera incontestablement par l’effectivité du Protocole sur la libre circulation des personnes, le passeport unique africain et la Zone continentale africaine de libre-échange (AfCFTA) qui prend de plus en plus forme. Vingt-deux ratifications sont nécessaires pour que l’AfCFTA entre en vigueur. Dix-sept pays ont déjà ratifié.

*Les vingt-huit pays qui ont ratifié le MUTAA sont l’Afrique du Sud, le Bénin, le Burkina Faso, le Botswana, le Cameroun, le Cap-Vert, la République centrafricaine, la République du Congo, la Côte d’Ivoire, l’Égypte, l’Éthiopie, le Gabon, la Gambie, le Ghana, la Guinée, le Kenya, le Lesotho, le Libéria, le Mali, le Mozambique, le Niger, le Nigeria, le Rwanda, la Sierra Leone, le Swaziland, le Tchad, le Togo et le Zimbabwe. (Journal de l’Aviation, photo : ONU)

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