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Cantonnement au nord: 50.000 FCFA pour entrer dans l’armée

 

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Après avoir fait du cantonnement un vaste marché de recrutement des jeunes chômeurs, les groupes rebelles, qui contrôlent déjà le territoire du nord, travaillent à rallier à leur cause la majorité non-touarègue. Un véritable péril pour l’unité du Mali!

Le nord du Mali est devenu une foire. A défaut d’y vendre des chameaux, denrée rare par les temps qui courent, on y vend des emplois, singulièrement des postes dans l’armée malienne. Avis aux intéressés: ne perdez plus votre temps à vous entraîner ou à lire des livres de guerre; pour réserver une place de choix dans la future armée malienne, il suffit de s’inscrire dans les registres tenus par les groupes armés qui squattent le nord. Les accords de paix, notamment celui du 20 juin 2015, prévoient, en effet, que 80% des forces armées et de sécurité du nord seront composés de « ressortissants du nord » (entendez: « combattants des groupes armés »). Mieux, lesdits accords stipulent que la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA) fournira les noms et grades des combattants à intégrer dans l’armée.

Forte de ces assurances dûment couchées sur le papier, la CMA ouvre les enchères. Jour et nuit, ses agents recenseurs reçoivent des jeunes gens du nord désireux de devenir soldats ou officiers dans l’armée malienne, laquelle est perçue, en ces hauts lieux de rébellion, comme un moulin. Le candidat paie de 50.000 à 100.000 FCFA selon le poste et le grade convoités; moyennant quoi, les recenseurs l’incluent dans une liste de « combattants » promis au cantonnement puis à l’intégration. Comme tout combattant doit prouver à la Commision de Suivi des accords qu’il ne dormait pas dans un puits, notre brave candidat reçoit des agents recenseurs les insignes de son statut de combattant: un vieux fusil de chasse, un pistolet artisanal, un canon rayé ou, en cas de pénurie,deux ou trois balles de mitraillette. Quand bien même il n’aurait que des cailloux à présenter, il arriverait à ses fins car nul ne pousserait la témérité jusqu’à douter des listes de combattants produites par la toute-puissante CMA. Les armes d’assaut et les armes lourdes sont, bien entendu, réservées aux grands seigneurs azawadiens appelés à siéger dans l’armée malienne en qualité de colonels-majors ou de généraux. Grâce à ce micmac, la CMA ne cesse de faire des recrues dans la jeunesse du nord qui, du coup, voit dans le conglomérat rebelle, non plus un ramassis d’égorgeurs, mais une vénérable armée de bienfaisance. Le processus de cantonnement tourne, par conséquent, au cirque et les futurs cantonnés des comédiens dignes de la troupe « Niogolon » de Guimba.

Pour ne pas rater la poule aux oeufs d’or, les groupes d’autodéfense qui composent la Plateforme emboîtent le pas à la CMA. De Gao à Ségou, de Mopti à Bamako, des foules de jeunes affluent au nord dans le but de payer les 50.000 FCFA correspondant au ticket d’intégration dans l’armée malienne. Il y a là des bergers, des mécaniciens, des bûcherons et même des repris de justice. L’histoire ne dit pas si certains de ces fameux « combattants » manquent d’un oeil ou d’une jambe comme c’était le cas des douaniers recrutés sous le « Vieux Commando »; mais une chose est sûre: nos bonshommes seront bel et bien soldats du Mali, quitte à observer des « replis tactiques » en cas de chauds combats. Après tout, ce genre de « replis » est une vieille technique made in Mali dont on mesure les brillants effets depuis l’invasion du pays en 2012. Question: avec tant de faux combattants à cantonner, la CMA ne gardera-t-elle pas ses vrais combattants en reserve pour de nouvelles guerres ? Personne ne se pose la question. Tout le monde, MINUSMA en tête, se préoccupe plutôt de mettre en état les 24 sites de cantonnement prévus, dont Likrakar (région de Tombouctou), Fafa et Innegar (région de Gao).

Séduire la majorité noire

Pourtant, le gouvernement ferait bien de se pencher sur ces cantonnements bidons. Ils constituent un redoutable instrument de propagande de la CMA pour rallier à sa cause la majorité noire de la population du nord. Ayant déjà le contrôle du territoire, les rebelles de la CMA, qui ne se distinguent des « jihadistes » d’Iyad Ag Ghali que sur le papier, ne sont bloqués dans leur élan indépendantiste que par leur faiblesse numérique au sein de la population du nord. Or à quoi sert de contrôler un territoire si la majorité noire de la population n’adhère pas à la cause de l’occupant ? Pour résoudre cette équation, la CMA a résolu de s’attirer la sympathie de la majorité. Depuis plusieurs mois, des émissaires rebelles parcourent les fractions nomades et les tribus pour apporter la bonne parole. Le discours de ces propagandistes se résume ainsi: « Rejoignez-nous; sinon, vous risquez de tout perdre ! L’Etat malien ne récupérera jamais plus le nord.

A la faveur des accords de paix, nous aurons la mainmise militaire officielle sur tout le nord; c’est nous qui traiterons avec les bailleurs de fonds. Nous allons, avec leur appui, équiper le nord de toutes les infrastructures qui lui manquent depuis 1960. Et c’est vous, la majorité Songhoi, bambara, dogon et peulhe, qui en profiterez les premiers ! ».Leurs interlocuteurs ont tendance à ajouter foi aux assurances des rebelles. Il n’existe, en effet, pas d’offre parallèle puisque l’Etat, quasiment absent du nord, donne l’impression d’avoir abandonné les populations locales à leur sort. Selon de hauts responsables de la Plateforme (regroupement des mouvements d’autodéfense noirs), « la Plateforme a passé avec la CMA les accords d’Anéfis puis a, le 2 février 2016, pénétré à Kidal parce qu’elle se sent lâchée par l’Etat. Les autorités maliennes ont été sommées de ne pas s’approcher de la Plateforme pour ne pas perdre le soutien politique, financier et militaire de Paris. Pour cette raison, la Plateforme n’est pas reçue par le moindre ministre malien. Seule lui est restée tendue la main de la CMA. Elle a donc décidé de rallier ce groupe pour survivre car elle entretient à ses propres frais des milliers de combattants qu’elle ne peut abandonner. Elle a aussi acheté à prix d’or des armes et munitions qu’elle ne peut jeter sans contrepartie. ».
Le ralliement de la Plateforme à la CMA marque une étape décisive dans la conquête du peuple par la rébellion. Désormais, cette dernière dispose de relais solides au sein de la majorité de la population. Un élu local raconte: « A Gao comme à Tombouctou, des foules de jeunes s’affilient, sans se cacher, à la CMA où, à leur sens, se trouve l’avenir. Quand un élément de la CMA commet un délit, les chefs militaires et administrateurs du nord sont inondés d’appels téléphoniques en provenance de Bamako pour leur intimer l’ordre de ne pas sévir contre les coupables ou de le relâcher s’ils ont été arrêtés. C’est tout le contraire pour un délinquant n’appartenant pas à la CMA! Tout le monde a la certitude qu’adhérer à la CMA, c’est obtenir des vivres et, surtout, l’impunité! ».

Source : proces-verbal

 

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