Rien ne va plus entre l’Agence malienne pour le développement de l’énergie domestique et l’électrification rurale (Amader) et la société Abis Distribution. À la base de cette discorde, le non-respect des clauses contractuelles de fourniture d’électricité. L’Amader a été condamnée à payer plus de 200 millions Fcfa à la société Abis Distribution et ses comptes bancaires ont été saisis. Dans cette interview, le gérant de la société Abis Distribution, Binafou Sidibé, nous en dit davantage.
Qu’est-ce qui est à l’origine de cette affaire de 200 millions FCFA ?
Binafou Sidibé : Dans le cadre de l’électrification de la localité de Lambidou, dans la région de Kayes, à travers un projet de la Banque mondiale, notre société a signé un contrat avec l’Amader. C’était en 2009 que nous avons signé le contrat pour l’électrification de cette zone ; le coût global s’élevait à près de 200 millions de Fcfa. Notre participation au financement du projet était de 20%, soit 44 millions de Fcfa, que nous avons pu mobiliser grâce à notre banque, la BCS, et le reste du montant devait être payé par l’Amader sur financement de la Banque mondiale.
Dans le procédé, c’est l’opérateur (Abis distribution) qui doit faire le choix de la banque. C’était un compte joint dont le signataire était moi et le DAF (Directeur administratif et financier) de l’Amader, à l’époque, un certain Diarra. Après avoir apporté et utilisé notre apport, à savoir nos 20% dans le cadre du projet, l’Amader a refusé de verser les 150 millions de FCFA sur notre compte.
L’Amader a demandé une lettre de confort attestant que le compte joint ouvert par Abis à la BCS n’avait pas d’antécédent. Toute chose qui nous a surpris dans la mesure où le DAF de l’Amader est cosignataire avec moi. Donc, comment peut-on mener des opérations à l’insu de ce dernier ? La BCS a rassuré l’Amader de sa crédibilité pour avoir mené beaucoup d’opérations ensemble.
Malgré ces assurances, qu’est-ce qui a bloqué le décaissement de l’argent ?
En dépit de cette assurance, l’Amader ne s’est pas exécutée. Dès lors, nous avons commencé à douter de la bonne foi de nos partenaires et les choses ont commencé à traîner, car il était prévu de finaliser le projet en 2011 et en fin 2011, on devait commencer l’exploitation et le coup d’Etat a tout chamboulé.
Le non versement de ce montant nous a décrédibilisés au niveau de notre banque. L’Amader a refusé de verser le montant du projet sur notre compte ; elle a en revanche demandé de payer directement toutes les entreprises avec lesquelles ils évoluent sur le terrain. C’est ainsi que l’entreprise qui a fait les poteaux électriques et l’installation des fils a été directement payée par l’Amader.
Est-ce que le travail a été convenablement fait ?
Mais le projet d’électrification de Lambidou est un investissement de plus de 150 millions de Fcfa de la Banque mondiale et d’Abis ; le courant n’a jamais été allumé à Lambidou. Et pour cause, le groupe électrogène servant à alimenter la petite centrale et le véhicule pour le déplacement, qui était aussi prévu, n’ont pas été achetés. Donc tous les investissements sur le terrain sont partis à l’eau dont notre apport personnel et la centaine de millions de FCFA de la Banque mondiale. Un montant total de 150 millions de FCFA. Ce n’est pas tout.
Cette production d’électricité devait générer des ressources financières pour notre société. Au lieu de cela, nous avons perdu non seulement notre argent, mais aussi la crédibilité auprès de notre banque que nous avons remboursée à plus de 77 millions de FCFA. C’est après cela que nous nous sommes tournés vers l’Amader pour la traîner devant le Tribunal de la Commune V, car ce genre de comportement tue à longueur de journée des petites entreprises comme nous.
Nous nous félicitons du verdict de la Commune V qui a condamné l’Amader à payer plus de 200 millions de FCFA au titre de réparation et dommages et intérêts. Ils ont fait appel de ce verdict au niveau de la Cour d’appel et sont partis jusqu’à la Cour suprême. Dans toutes ces juridictions, ils ont perdu et d’ailleurs notre huissier a pu bloquer leurs comptes bancaires dans toutes les banques du Mali. Nous ne demandons qu’à être remis dans nos droits.
Propos recueillis par Kassim TRAORE
Source: Le Reporter