Comme l’on pouvait s’y attendre après les déclarations présidentielles, jeudi 25 avril, lors de la cérémonie officielle d’installation des membres de la Commission dialogue et réconciliation, la question de la composition de la CDR est revenue dans les discours ce week-end, au Cicb. C’était à l’occasion du forum national du Collectif des ressortissants du Nord du Mali, tenu enfin au cours du week-end dernier.
Le forum national sur « la gestion de la crise du nord du Mali », organisé par le Coren (Collectif des ressortissants du nord), a regroupé, deux jours durant, les 27 et 28 avril, les différentes communautés du Nord du Mali, venues de l’intérieur comme de l’extérieur de notre pays. Il s’est agi pour eux de débattre des thèmes ayant trait à la paix, à la sécurité, à la question du genre, aux futures négociations, à la gouvernance et au développement local entre autres. L’objectif est de mieux contribuer à la résolution de la crise actuelle mais aussi et surtout de prévenir d’autres crises.
Ainsi, le samedi dernier, l’honneur est revenu au Chef de l’Etat, Dioncounda Traoré, de présider la cérémonie d’ouverture qui aura drainé, outre les ressortissants du Nord, des membres du Gouvernement, des représentants de missions diplomatiques et de coopération, ceux des pays frères et amis du Mali et plusieurs autres acteurs impliqués dans la recherche de solutions à la crise sécuritaire qui sévit dans cette partie de notre territoire.
Du haut de la tribune de la salle Djéli Baba Sissoko, le président d’honneur du Coren, M. Ousmane Issoufi Maïga, a particulièrement remercié le président de la République par intérim d’avoir bien voulu honorer de sa présence ladite cérémonie. Celle-ci, faut-il le rappeler, consacrait l’ouverture des travaux d’un forum qui avait été maintes fois reporté sur demande expresse du Chef de l’Etat. De l’avis de M. Maïga, en s’attaquant à l’Etat malien en janvier 2012, le Mnla et toute la horde de terroristes avaient l’intention délibérée de miner notre cohésion sociale en provocant une rupture de confiance entre communautés du Nord et entre ces dernières et les autres communautés du Mali. C’est pourquoi, le Mnla a, dit-il, eu une démarche de stigmatisation et de ségrégation. De mémoire de l’ancien Premier ministre du Mali, cette rébellion que le Mnla nous impose est la pire de toutes celles que nous avons connues jusque là, avec son corolaire d’injustice, d’arbitraire, d’impunité, de destructions d’infrastructures publiques et culturelles, entre autres. Pire, des milliers de citoyens honnêtes ont été contraints à l’exil, abandonnant maisons et lieux de mémoire. Aussi, Ousmane Issoufi n’a pas fait mystère de sa conviction que c’est le Mnla qui a apporté dans sa valise tous les autres groupes qui nourrissaient l’ambition de faire du Mali et même de la sous région, une zone propice au terrorisme et au trafic de tout genre. Notre pays, pendant tout le temps que le Mnla et les siens semaient la terreur, était malheureusement resté spectateur de ce désastre, a reconnu, M. Maïga, alias Pinochet. C’est pourquoi il a salué l’engagement et la détermination sans faille de la communauté internationale à aider notre pays à juguler cette crise.
Conscient des défis sécuritaires et sociaux qu’impose la crise actuelle, Pinochet a souhaité que ce forum soit le cadre d’intenses échanges pour examiner les tensions sociétales qu’elle a suscitées. Il s’agit, dit-il, de définir et de mieux asseoir la fonctionnalité du binôme paix et sécurité pour une solution définitive aux rebellions récurrentes dans le Nord de notre pays.
Par ailleurs, Ousmane Issoufi a indiqué que le Coren n’est pas réfractaire au dialogue, pourvu qu’il se fasse dans la justice et non dans l’impunité. Mais, a-t-il précisé, le Coren ne veut occuper la place de qui que ce soit. Il reste une organisation active de la société civile et, de ce fait, il entend jouer son rôle dans l’édification de la société malienne. Mais, au sujet de la commission dialogue et réconciliation, question sur laquelle il était certainement attendu, l’ancien Premier ministre a laissé entendre que le débat était désormais clos. « Nous souhaitons bon vent et plein succès à la commission dialogue et réconciliation », a-t-il dit, ajoutant que le Coren, avec la vigilance requise, adhère à toute initiative de recherche de la paix.
A sa suite, le président Dioncounda, après avoir salué la portée stratégique de ce forum, a remercié les organisateurs pour les reports initiaux à sa demande. De son avis, il n’y a nul doute que l’occasion de cette rencontre était opportune car, cela faisait seulement deux jours que la CDR a été officiellement installée dans ses fonctions. Cérémonie au cours de laquelle le chef de l’Etat avait fait part de son étonnement face aux agissements du Coren, relatifs à la composition de ladite structure. A en croire Dioncounda Traoré, cette réaction lui avait paru comme un devoir face au procès d’exclusion qui lui avait été fait après la composition de la Commission. C’était seulement par peur pour la crédibilité de cette structure, mais aussi par souci d’écrire une vérité historique et de dissiper le malentendu qui, petit à petit, s’installait, s’est justifié le Professeur-président. « C’était donc par peur pour la nation car je n’ai d’autres agendas que le Mali », a-t-il poursuivi. Ainsi, il a demandé au Coren d’être une des locomotives de la CDR, renouant de ce fait avec leur engagement et leur dédicace. Car, la crise ne sera nullement réglée dans le boycott de la Commission qui, a-t-il dit, n’est pas une structure régionale mais nationale. Par ailleurs, Dioncounda a promis qu’aucune partie du Mali ne sera plus une partie de non droit. « Plus jamais des Maliens au dessus des autres, encore moins des pratiques mafieuses sur laquelle la puissance publique fermera les yeux », s’est-il engagé.
Bakary SOGODOGO
Les brèves : Dialogue et réconciliation :
Vers une commission bis
Bien qu’ayant affirmé que le débat sur la Commission était clos au sein du Coren, il semble selon certaines indiscrétions, que le Coren ne se reconnait toujours pas dans l’actuelle Cdr. Raison qui aurait poussé plusieurs de ses responsables, la quasi-totalité, à aller dans le sens de la création de leur propre commission de négociations. Cette commission bis, dont la commission sera beaucoup plus «représentative» des populations du nord, principalement concernées par le processus de retour de la paix et de la sécurité dans leurs terroirs naturels, serait également beaucoup plus «légitime» qu’une Cdr «club» concoctée dans quelques bureaux feutrés de la capitale. Mais pour cette commission de négociations, point de dialogue et de réconciliation dans l’impunité et l’injustice. Pour une fois, il faudrait que justice soit rendue pour «éviter les erreurs du passé». Que ceux qui ont usé du «viol comme arme de guerre et de destruction psychologique», soient punis d’abord, ensuite viendront le dialogue et la réconciliation, et peut-être le pardon.
Absence remarquée au forum
Oumou Traoré de la Cafo et la ministre Deïdia Kattra boudent
Des responsables du Coren affirment avoir invité au Forum la présidente de la Cafo, Oumou Traoré, et la ministre en charge de l’emploi, Mme Diallo Deïdia Mahamane Kattra, les documents de travail leur ont été envoyés bien avant la date de la rencontre. Ni l’une ni l’autre n’ont daigné participer aux travaux. La première, fière de son récent titre de vice-présidente de la Commission dialogue et réconciliation, et des substantiels revenus, n’a sans doute pas apprécié que sa nomination soit contestée par des responsables du Coren. Le Collectif, selon certains, n’a rien contre la vice-présidente en particulier, c’est toute la composition qu’elle déplore. Quant à la ministre, qui doit d’ailleurs son poste au Coren qui l’a proposée au président Dioncounda Traoré, elle a tendance à faire la «grosse tête». Récemment, elle aurait affirmé se désolidariser du Coren sur la question de la composition de la Cdr. Par solidarité gouvernementale ? En tout cas, elle s’est vite habituée à son nouveau rôle dans le gouvernement catastrophique de la transition. Ne luttant plus pour la justice et l’équité, elle semble faire le jeu de ceux qui veulent s’éterniser au pouvoir de transition. Pour excuser son absence, certains affirment que c’est parce qu’elle est en voyage. Toujours est-il qu’elle aurait été informée depuis longtemps et qu’elle aurait pu prendre toutes les dispositions nécessaires pour être là à temps.
La présence remarquée
D’anciens premiers ministres à l’honneur
La cérémonie d’ouverture du forum national sur la gestion de la crise du nord du Mali a enregistré la présence de Soumana Sako, Mohamed Ahmed Ag Hamani, Younoussi Touré et Ousmane Issoufi Maïga. Qu’est-ce que ces quatre personnalités ont en commun ? Chacun d’eux a été Premier ministre du Mali à un moment donné de l’histoire de ce pays. Mais si les deux premiers étaient à la cérémonie en leur qualité d’anciens chefs de gouvernement, Soumana Sako pendant la première transition politique, Ag Hamani au cours du premier quinquennat d’Amadou Toumani Touré, les deux derniers étaient présents, Younoussi Touré, en sa qualité de président de l’Assemblée nationale par intérim, Ousmane Issoufi Maïga comme président d’honneur du Coren. Seul ce dernier a fait une intervention. Très remarquée d’ailleurs.
Sécurisation du forum
Retard anormal et insécurité assurée
La police est censée assurer les participants à certains événements dont le forum sur la gestion de la crise du nord du Mali. Et normalement, les agents de police sont présents sur les lieux bien avant l’arrivée des organisateurs. Mais hier, c’est à 9h30 minutes que les éléments du Groupement mobile de sécurité (Gms) ont débarqué au Cicb (Centre international des conférences de Bamako) où le début des travaux étaient prévus à 9h. Pourtant, vingt-quatre auparavant, les agents, qui étaient à cran, ont bien fait leur travail. Avant d’accéder à la salle, tout le monde passait au détecteur, les sacs, notamment ceux des dames, étaient minutieusement fouillés. Tout cela, c’était parce que le chef de l’Etat devait présider la cérémonie d’ouverture du forum. D’ailleurs, une fois Dioncounda Traoré à l’intérieur de l’enceinte, les portes ont été soigneusement fermées et des centaines de personnes ont dû patienter au dehors. Après son départ, et le lendemain des travaux également, il n’y avait plus aucun contrôle, et n’importe qui pouvait entrer avec n’importe quoi, et faire ce qu’il voulait. C’est dire qu’après Dioncounda Traoré, le déluge. On s’en f…
Quant à la protection civile, qui est pourtant un des rares services à fonctionner normalement, à faire correctement son travail, elle n’est arrivée qu’à 9h50mn. Connaitrait-elle, elle aussi, la crise financière qui sévit au Mali depuis le 22 mars 2012, crise qui ferait qu’elle manque de carburant ?
six panels de travail
De belles résolutions en perspectives
C’est un volumineux document, plusieurs centaines de pages, qui a servi de base de travail aux centaines de participants au forum sur la gestion de la crise du nord du Mali. Mais pour bien faire le travail, ceux-ci ont été invités à s’inscrire dans six panels de travail. Ce sont : 1) présentation et bilan de la mise en œuvre des différents instruments juridiques ayant mis fin aux rébellions passées et la préparation des futures négociations, 2) questions de sécurité et de paix, enjeux géostratégiques, perspectives à moyen et long termes, 3) gestion des populations en cas de guerre, 4) place et rôle des médias en temps de conflit, 5) questions juridiques, 6) questions genre et conflits. Ces panels ont effectivement commencé à travailler de la fin de la cérémonie d’ouverture, samedi, au dimanche à 13h.
Rassemblées par Cheick TANDINA