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Au Soudan, les leaders de la contestation appellent à poursuivre la mobilisation

Après l’annonce de la destitution d’Omar el-Béchir et la création d’un Conseil militaire de transition par l’armée, les leaders de la contestation appellent à maintenir le cap pour en finir avec un régime militaire.

 

Les meneurs du mouvement de contestation au Soudan se disent extrêmement « déçus » du maintien de l’armée au pouvoir, jeudi 11 avril, après la destitution du président Omar el-Béchir, remplacé par un Conseil militaire de transition. Ils rejettent le « coup d’État militaire » et appellent à poursuivre la mobilisation.

Malgré un couvre-feu instauré par l’armée, des milliers de personnent étaient encore rassemblées devant le QG de l’armée, lieu emblématique de la contestation depuis samedi 6 avril, à Khartoum.

« La rue n’est pas prête à accepter l’option d’une transition militaire parce que les principales figures de ce régime, dont le ministre de la Défense, qui était vice-président, sont dans la junte militaire », explique l’invité de France 24, Seidik Abba, journaliste, écrivain et spécialiste de l’Afrique.

Les militaires n’ont pas rendu publique la composition complète du Conseil, mais le ministre de la Défense, Awad Ahmed Benawf, est à sa tête. Le chef d’état-major de l’armée, le général Kamal Abdelmarouf, a été nommé adjoint de ce Conseil militaire.

De son côté, l’Alliance pour la liberté et le changement – composée de l’Association des professionnels soudanais (APS), qui a initié le mouvement de protestation depuis décembre, et de l’opposition – accuse le régime d’avoir « mené un coup d’État militaire en présentant encore les mêmes visages » contre lesquels le peuple s’est élevé. Pour Seidik Abba, l’éviction d’el-Béchir est un « sacrifice » pour permettre au système, instauré par le président lui-même, de survivre aux contestations qui ont pris plus d’ampleur depuis samedi 6 avril.

« Nous ne partons pas ! »

Alaa Salah, l’étudiante devenue depuis « l’icône » du mouvement, a déclaré sur Twitter vouloir un Conseil civil pour mener la transition et non « un Conseil militaire de transition ».

« Nous savons qu’il n’y aura pas de différence entre el-Béchir et Benawf, a témoigné Lina sur France 24, jeune soudanaise qui manifeste depuis le début de la contestation. Nous n’arrêterons pas jusqu’à la chute de ce système ». Pour elle, la destitution d’el-Béchir n’a pas d’importance si un homme du même sérail le remplace. Bien consciente des risques de répression, elle dit ne pas avoir peur.

C’est le mot d’ordre scandé par les manifestants. « Nous ne partons pas ! Nous ne partons pas », martelaient-ils jeudi devant le QG de l’armée. « Un voleur a été remplacé par un autre voleur », scandaient d’autres. « Nous ne quitterons pas le site jusqu’à ce que nous emportions la victoire », pouvait-on également lire sur une banderole.

Les Soudanais prévoient de continuer de manifester les prochaines heures et prochains jours « si les militaires les laissent faire », rapporte Bastien Renouil, correspondant de France 24 au Kenya.

Un couvre-feu dès menace la mobilisation

Mais un couvre-feu nocturne, de 22 h à 4 h, annoncé par Awad Ahmed Benawf, met en péril la mobilisation. Cette interdiction vise à empêcher les manifestants à se rassembler devant le QG de l’armée, explique Bastien Renouil.

L’armée va-t-elle ouvrir le feu si le couvre-feu n’est pas respecté ou va-t-elle protéger les manifestants, comme elle l’a fait depuis samedi dernier ? L’APS a réitéré son appel à l’armée sur Twitter pour qu’elle soutienne le peuple et non le nouveau régime militaire.

À l’heure du couvre-feu, des milliers de manifestants étaient encore mobilisés dans la capitale, devant le QG de l’armée. Alaa Salah étaient avec eux, entamant des chants révolutionnaires et suivie par les protestataires qui criaient « Thawra ! », révolution, après chacun de ses vers.

Donner des « gages de changement »

Dans son communiqué, le ministre de la Défense a annoncé vouloir donner une place aux civiles dans le Conseil de transition. Mais il semble « peu probable » que des civils aient une place importante dans ce gouvernement », explique Bastien Renouil.

« La première tâche à laquelle les militaires doivent s’atteler est de dissoudre le parti gouvernemental – une sorte de parti unique qui écrasait la vie politique soudanaise – pour donner des gages de changement à la population et l’amener à accepter cette transition de deux ans, ajoute Seidik Abba. Tout va se jouer au rapport de force. Je ne vois pas l’armée, compte tenu de l’enthousiasme et de la détermination de la population, aller vers une répression sanglante qui pourrait l’affaiblir sur le plan africain. Les choses pourraient évoluer vers un Conseil de transition militaro-civil ».

Avec AFP

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