Négocier avec les groupes armés : c’est ce que préconisent des ONG et une partie de la classe politique malienne. Tout le monde n’a pas attendu pour tendre la main.
Même loin de chez lui, Ali Dolo arbore fièrement la tenue traditionnelle de ses ancêtres dogons. Depuis 1999, il est le maire de la commune de Sangha, une ville du centre du Mali, où il n’a pas remis les pieds depuis juin 2020.
En désaccord avec sa politique d’ouverture du dialogue avec les groupes radicaux, les miliciens du groupe d’autodéfense Da Na Ambassagou ( les chasseurs qui se confient à Dieu
) l’ont menacé à maintes reprises pour avoir établi un contact avec les djihadistes liés à Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI), présents dans sa commune et les alentours. J’ai échappé de justesse à un enlèvement en février 2019
, raconte celui qu’on appelle M. Le Maire
même à Bamako, la capitale malienne.
En 2017, alors que le gouvernement ouvre un débat national sur la nécessité ou non de dialoguer avec les groupes djihadistes qui déstabilisent le pays, Ali Dolo est déjà persuadé des vertus de ces échanges. Mais c’est en mai 2020, alors que son neveu est enlevé par les djihadistes, qu’il profite de la brèche pour engager les discussions à l’échelle de sa commune.
Instaurer le dialogue
Rien qu’entre février 2018 et la formulation d’un accord tacite avec les djihadistes en juillet 2020, 269 personnes ont péri dans sa bourgade. Depuis, il n’y a quasiment plus d’incident et les Peuls circulent librement sur le territoire
, assure Ali Dolo.
Pour organiser le dialogue, l’édile a mis en place un comité de cinq personnes issues des communautés peuls et dogon dont il fait partie, le tout en accord avec les chefs de village
, assure-t-il. En partant, je disais à la population de Sangha qu’il était nécessaire de négocier avec ces personnes.
Une ligne que semble adopter aujourd’hui le gouvernement malien. En octobre, alors que le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves le Drian, était en visite dans la capitale malienne, le Premier ministre avait statué qu’au regard des conclusions de différents débats organisés sur le territoire national, il y a une nécessité d’ouvrir le dialogue avec ces groupes armés
.
Une décision que conteste la France, qui fournit une aide d’ampleur à la lutte contre le terrorisme au Mali à travers l’opération Barkhane. Dans une interview à l’hebdomadaire Jeune Afrique, Emmanuel Macron répliquait en octobre qu’avec les terroristes, on ne discute pas, on combat
.
Source : Ouest-France