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Arabie Saoudite : les échecs, un jeu d’enfer ? Un non-évènement monté en neige

L’Arabie Saoudite et les habitants de la planète entière, et même ceux de l’univers connu, ont été secoués ces derniers jours par un immense fou rire à cause d’une fatwa. Le grand mufti d’Arabie saoudite, le Cheikh Abdelaziz Al-Cheikh a décrété que le jeu d’échecs était « haram », c’est-à-dire illicite et proscrit en Islam.

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L’Arabie Saoudite actionne la polémique

L’Arabie Saoudite est au centre d’une polémique qui va au-delà de ses frontières. A l’origine de la polémique, une fatwa qui désapprouve les jeux d’échec. L’annonce a fait le buzz, comme on dit dans la blogosphère, et des journaux sérieux comme le Times de Londres lui ont consacré leurs éditoriaux. Sur la vidéo mise en ligne mercredi dernier par un trublion de la toile, le cheikh saoudien nous explique que le jeu d’échecs est une « invention du diable » toujours là quand il s’agit de distraire le croyant de ses dévotions. Il a assimilé la pratique à la consommation de boissons alcoolisées et aux jeux de hasard, sachant que le hasard n’a rien à voir, en général, dans les échecs. En pratique, la fatwa du grand mufti n’a pas force de loi en Arabie saoudite, mais les autorités peuvent s’en servir comme argument pour interdire une manifestation. Or, la fatwa déclarant le jeu d’échecs hors-la-loi est apparue justement la veille de l’ouverture officielle d’un tournoi d’échecs à La Mecque où ce jeu est pratiqué depuis des temps immémoriaux.

Le tournoi a eu lieu quand même, en dépit de la fatwa, et certains internautes se sont demandés si le petit malin qui a diffusé la vidéo sur YouTube n’était pas justement un joueur exclu de la manifestation. D’autres ont fait dans l’humour, le sujet s’y prêtant volontiers, en expliquant l’interdiction par le fait que les échecs sont une invention persane. L’Iran et l’Arabie saoudite étant engagés dans un conflit politico-religieux impliquant quasiment toute la communauté musulmane, faire barrage à l’influence persane semblait être de bonne guerre. Le royaume wahhabite est en effet tellement engagé au Yémencontre l’insurrection chiite, qu’il en a délaissé la bataille contre Daech, au grand dam des Américains. Pour les Saoudiens, l’État islamique qui fonctionne selon les mêmes ressorts idéologiques que le royaume wahhabite peut attendre, l’urgence étant l’Iran, et son dangereux potentiel nucléaire. Sans compter les menaces que représentent, dans l’immédiat et le proche avenir, la guerre civile au Yémen voisin, le pays voisin, et l’agitation chiite dans les États du Golfe.

Du neuf avec du vieux

Toute cette agitation et ce tapage médiatique auraient pu s’inscrire dans l’ordre naturel des choses et relever du fonctionnement normal de la communication s’il n’y avait pas un os. Cet os, c’est le fait que la fameuse fatwa interdisant les échecs remonte à plus d’un an et que l’évènement était du réchauffé. Simplement, il y a un tel afflux de fatwas dont beaucoup relèvent du farfelu et du grotesque, que certaines peuvent franchir, sans visa, les frontières du vraisemblable. Ce qui peut expliquer pourquoi les médias occidentaux, toujours aussi mal outillés pour la compréhension des évènements et des faits en pays arabes et musulmans, ont gobé cette vieille lune. Depuis des décennies et même des siècles, les théologiens musulmans ne cessent de proclamer de vendredi en vendredi (jour de la grande prière collective en Islam) que le jeu d’échecs est « haram ».

Les chaînes de télévision satellitaires du Moyen-Orient consacrées aux fatwas et aux prêches religieuses se comptent par dizaines et elles sont d’accès gratuit. Bien avant Abdelaziz Al-Cheikh, des imams ont disserté à longueur d’année et références à l’appui, sur les causes de l’interdiction du jeu d’échecs et des jeux de hasard en général. Ces fatwas, sous forme de réponses à des questions posées par les téléspectateurs, disent généralement la même chose, que ce soit pour les échecs, pour les dominos, ou pour le poker. Certes, ces jeux ne sont pas nommément cités dans le Coran, mais ils sont clairement prohibés dans les « hadiths » rapportant les propos, faits et gestes du prophète de l’Islam et de ses compagnons.

L’argument le plus connu étant que ces jeux étaient une perte de temps et ne servaient qu’à distraire le croyant de ses devoirs religieux et à lui faire oublier d’invoquer Dieu, son créateur. Concernant précisément les échecs, on évoque souvent cette anecdote du califeOmar (2ème calife de l’Islam après Abou-Bakr) exhortant des joueurs d’échecs à cesser de « perdre du temps avec des figurines », les figurines, comme les images, étant interdites en Islam. Autrement dit, le scoop n’en était pas un et en montant en neige une fatwa ancienne et rabâchée, on a fait du neuf avec du vieux. Ce qui n’est pas très novateur pour des systèmes censés être de pointe.

Salah AREZKI

Source: Afrique sur 7

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