« L’eau, c’est la vie ». Cet adage décrit bien l’importance de cette source vitale et précieuse dans certaines localités du Mali et même dans la ville de Bamako, la capitale. Comme à quelque chose malheur est bon, cette crise d’eau est devenue également une source de revenus pour certains citoyens. Le transport d’eau est aujourd’hui une activité assez rentable au Mali, même si le métier bénéficie de peu de considérations.
Gagner des millions dans la vente d’eau
À Sénou, à la périphérie de Bamako, Lamine, un jeune homme évolue quotidiennement dans le ravitaillement des chantiers en eau. Il explique qu’en cette période de fraîcheur, il y a moins de difficultés en ce qui concerne l’accès à l’eau. Néanmoins, il souligne que dans les chantiers, une barrique est remplie à 500 FCFA. En période de chaleur, le prix augmente à 750F ou à 1000F, indique-t-il. Selon Lamine, durant cette période froide, il peut remplir jusqu’à cinq barriques par jour. Mais en saison chaude, ce nombre diminue à quatre en raison du tarissement des puits.
Sur la base de ces informations communiquées, on peut estimer le revenu journalier de ce jeune homme à 2500 FCFA ou 4000 FCFA selon les saisons. Ainsi, dans le mois, ce jeune peut empocher jusqu’à 75 000 FCFA ou 120 000 FCFA.
Ce travail n’est pas exercé uniquement par les hommes, les femmes aussi tirent leur épingle du jeu. En effet, Kadiatou, une ravitailleuse d’eau, nous confirme les propos de Lamine. Selon celle, par jour, elle pouvait gagner jusqu’à 10 500 FCFA. Cette dame puise de l’eau dans un puits et vend un bidon de 20L à 50F et une barrique à 500F. Pour cette activité, elle possède une charrette et un âne. Par chargement, elle transporte 20 bidons de 20L et une barrique. À l’en croire, du lever au coucher du soleil, elle peut faire sept chargements. Ainsi, on estime le revenu mensuel de cette dame à près de 315 000 FCFA.
Toutefois, elle précise que les prix peuvent varier en fonction des saisons. « Maintenant les puits ne sont pas trop d’actualité, car les forages et les robinets commencent à faire leur apparition dans notre secteur. On doit acheter de l’eau avec ces gens-là [les propriétaires de robinets NDLR] pour la revendre ensuite. Ce qui fait qu’il y a moins de marchés », a-t-elle souligné.
Dans un reportage de l’Agence Malienne de Presse et de Publicité (AMAP) réalisé en janvier 2020, on peut lire ce témoignage de Korotoumou, habitant de Sirakoro : « Souvent, on peut gagner 50.000 FCFA par mois et même plus. Ce qui nous permet de subvenir à nos besoins comme on peut. Mon frère aussi est arroseur de briques comme moi. Puisqu’il a des relations avec des maçons, il nous informe à chaque fois que des chantiers démarrent ». On peut estimer ainsi le revenu annuel de cette dame à près de 600 000 FCFA, si toutefois elle trouvait des marchés tous les jours. Car, il convient de faire remarquer que durant certaines périodes, les travaux au niveau des chantiers se mettent en arrêt.
Dans le reportage susmentionné, Moustapha Diarra, propriétaire d’un chantier en construction, explique que les femmes travaillent en groupe généralement au sein des chantiers. Un groupe peut se composer jusqu’à cinq femmes, indique-t-il avant de préciser : « Elles remplissent un baril à 750 FCFA et peuvent en remplir jusqu’à 10 par jour. Nous, les propriétaires, donnons cet argent aux maçons qui le leur remettent. » Ainsi, à la fin de la journée, chacune de ces dames peut se retrouver avec 1500 FCFA. Ce qui leur fera par mois, près de 45 000 FCFA.
Même pour se laver, il faut acheter
Cette problématique liée à l’accès à l’eau est propre à plusieurs localités. Selon cet autre jeune homme, qui a préféré garder l’anonymat, son expérience vécue à Kofladjè, une localité minière hors de Bamako, lui a permis de comprendre davantage la nécessité de l’eau. « À Kofladjè, un bidon de 20L est vendu à 100F. Là-bas, ils n’acceptent pas la vente des barriques remplies. Ils peuvent transportés 8 bidons, au minimum, ensemble dans un pousse-pousse et 10 au maximum pour les plus forts. Avant, ses transporteurs utilisaient des petits groupes électrogènes pour tirer de l’eau dans les puits ou dans les marigots et s’entraidaient avec ça. Mais maintenant, c’est ceux qui font les lavages de motos et voitures qui en possèdent et c’est avec eux que les transporteurs achètent maintenant », a-t-il expliqué.
Il ajoute que ceux-ci vendent aux transporteurs huit bidons remplis à 250F et dix bidons à 300F. Ces derniers à leur tour les revendent à 100f par bidon. Notre interlocuteur confie que même pour se laver dans cette zone, il faut payer. « Il y’a de l’eau chaude et de l’eau fraiche ou si tu veux le mélange. Un seau d’eau est à 25F », a-t-il dit.
Oumou Kouttoum Cissé, stagiaire
Source: Journal le Pays- Mali