La France vient de décider d’augmenter substantiellement les frais de scolarité des étudiants étrangers. Compte tenu des répercussions de cette augmentation, l’Ambassadeur Moussa Makan Camara lance un appel aux autorités françaises pour la prise de mesures d’exception, au nom des ressortissants des pays africains francophones, afin que la solidarité francophone soit entretenue et même renforcée.
L’augmentation des frais de scolarité des étudiants internationaux hors Union Européenne en France constitue une mesure nationale que nous devons respecter à sa juste valeur. En effet, la France a le droit et même le devoir d’outiller ses Universités pour leur permettre de faire face à la compétition éducative mondiale. Dans cette compétition mondiale, les Universités françaises venant loin derrière les Universités de plusieurs pays occidentaux, toutes mesures visant à rendre celles-ci plus performantes, sont les bienvenues et pour la France et pour l’Espace francophone. L’augmentation des frais d’inscription s’inscrit dans ce cadre car entrainant l’augmentation des ressources indispensables pour faire face aux défis à surmonter.
Toutefois, la France doit faire un discernement entre les pays et se rappeler des solidarités qu’elle doit entretenir pour continuer à tenir son rang dans le concert des nations. Parmi ces solidarités figure en bonne place la Francophonie, Espace de partage de la langue française, cordon ombilical entre la France et certains Etats sur le continent africain en l’occurrence.
Au-delà d’être un Espace de partage de la langue française, la Francophonie est devenue de nos jours, un Espace politique et diplomatique au service de tous ses Etats membres. Elle se prépare à devenir davantage un Espace de Coopération économique et sociale. Ayant assumé les fonctions, de chef de cabinet du Secrétaire Général de la Francophonie, de Directeur de l’Education et la Formation à l’Ecole Internationale de Bordeaux, ayant défendu la pertinence de la Francophonie en Europe Centrale, en Asie-Pacifique , auprès de l’Organisation de l’Unité Africaine puis de l’Union Africaine et auprès de l’Organisation des Nations Unies à New York, je crois être en mesure de dire que la Francophonie constitue un bel outil politique et diplomatique.
Le Président Alpha Oumar Konaré, en sa qualité de Président de la Commission de l’Union Africaine, recevant le Président Abdou Diouf, alors Secrétaire Général de la Francophonie, disait si opportunément, je cite de mémoire : la France doit comprendre que son rang de puissance mondiale, y compris au sein de l’Organisation de Nations Unies, se joue essentiellement au sein de l’Union Européenne et de la Francophonie, donc des pays francophones africains. Pour dire l’importance de la francophonie pour la France et l’interdépendance de celle-ci d’avec les Pays africains francophones. Tous comme la solidarité envers les Ressortissants de l’Union Européenne, la solidarité issue de l’histoire commune récente de la France et des Etats africains francophones, mérite d’être entretenue et même renforcée.
En effet, si la mesure consistant à augmenter substantiellement les frais de scolarité des étudiants étrangers en France frappe tous les pays, son impact est beaucoup plus important pour les pays francophones africains qui n’ont pas suffisamment de ressources pour y faire face, et prendre en outre en charge les frais de séjour des étudiants. C’est là que la solidarité francophone doit être activée afin d’obtenir des autorités françaises, une dérogation spéciale, si non pour tous les pays membres de l’Organisation Internationale de la Francophonie, du moins pour les pays francophones africains. Si cette solidarité n’est pas effective à cette occasion, alors l’Organisation Internationale de la Francophonie sera questionnable et questionnée et à juste titre.
C’est dans ce sens que , de ma modeste position de diplomate Malien à la retraite, et d’ancien Haut Fonctionnaire de l’Organisation Internationale de la Francophonie, je lance un appel, aux membres du Conseil des Ministres de la Francophonie, aux membres du Conseil Permanent de la Francophonie, à la Secrétaire Générale tant sortant , qu’entrant, au Président et aux membres de l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie, au Recteur de l’Agence Universitaire de la Francophonie, aux fins de solliciter auprès des plus Hautes Autorités de la France, des mesures d’exception en faveur des pays africains membres de l’OIF pour ce qui concerne les frais de scolarité, comme c’est le cas pour les ressortissants des pays européens. Cela donnerait davantage d’opportunités aux pays concernés et laisserait à la Francophonie tout son sens : Solidarité et Partage.
Il reste pour les moyens et longs termes, que les pays africains intensifient la coopération interuniversitaire non seulement avec toutes les Universités francophones, mais aussi et surtout entre les Universités africaines, afin qu’à terme, les formations universitaires que les Africains viennent chercher en France soient disponibles sur place. /.
Moussa Makan Camara
Président de la Fondation Balanzan
Pour la Gouvernance et la Stabilité
Maliweb