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Andrew Chimphondah, directeur général de Shelter Afrique: «NOUS N’ACCEPTONS AUCUN PROJET DE MOINS DE 100 UNITÉS DE LOGEMENTS POUR UN INVESTISSEMENT DE 2 À 4 MILLIONS DE DOLLARS US»

Le directeur général de Shelter Afrique, une entreprise panafricaine évoluant dans le financement de l’habitat et du logement en Afrique, était la semaine dernière, en visite dans notre pays. Il a rencontré les autorités pour parler du rôle du Mali au sein de ladite entreprise, d’une solution de sortie de crise sur le dossier de financement de certains logements sociaux ainsi que des possibilités de renforcement de capacité. Nous avons rencontré le DG de Shelter Afrique, le Zimbabwéen Andrew Chimphondah, qui était à la tête d’une délégation composée de Mme Ag Oumar Néné Thiam, responsable de la gestion des prêts de Shelter Afrique. Il a accepté de répondre à nos questions

L’ESSOR : Parlez-nous de Shelter Afrique et de son importance pour le Mali?

Andrew Chimphondah : Shelter Afrique est une entreprise panafricaine de financement de l’habitat et du logement en Afrique. Nous sommes une institution internationale de développement et de financement du logement basée à Nairobi, avec des bureaux régionaux au Nigeria et en Côte d’Ivoire. Nous sommes soutenus par 44 pays membres, par la Banque africaine de développement (BAD) et par la Société africaine de réassurance (Africa RE).
Nous pouvons mobiliser des ressources et des fonds uniquement destinés aux projets de construction et de logements. Voilà ce que nous pouvons apporter au Mali, et tous nos États membres. Nous avons également l’expertise requise pour structurer des partenariats public-privé, en vue de la réalisation de projets immobiliers d’envergure et de la mise en place d’institutions de prêts hypothécaires de premier rang. Nous l’avons fait au Nigéria et en Tanzanie, et nous sommes convaincus de leur importance pour le Mali au-delà du financement, nous jouissons de plus de 30 années d’expérience. Ainsi, nous pouvons mobiliser une mémoire institutionnelle très étendue et des connaissances bien pétries.

L’ESSOR : Avez-vous mis en place des projets immobiliers d’envergure au Mali ?

Andrew Chimphondah : Oui. Nous avons déjà collaboré avec la Banque de l’Habitat du Mali (NDLR, elle a été absorbée par la Banque malienne de solidarité-BMS), l’Agence de cessions immobilières (ACI), SAPI (Group Tomota) ainsi que la SIFMA avec qui nous avons réalisé 4 projets, le dernier étant les 600 logements sociaux de Kati Sicoro. Au total, nous avons investi 23.394.704 de dollars US au Mali.

L’ESSOR : Comment vous financez vos projets ?

Andrew Chimphondah : Nous levons nos financements sur les marchés de capitaux pour des prêts en monnaies locales, le dollar étant notre monnaie de référence. En effet, nous avons mobilisé 24,7 milliards de Fcfa (51 millions de dollars US) auprès du marché obligataire de la zone UEMOA à travers nos courtiers, dont CGF Bourse. Nous obtenons d’autres financements auprès de nos partenaires tels la Banque africaine de développement et l’Agence française de développement. Comme je l’ai souligné tout à l’heure, nous existons depuis 30 ans. Nous pouvons tirer partie de nos partenariats, au bénéfice de nos pays membres. Par ailleurs, nous bénéficions des ressources des contributions de nos États membres. L’an dernier, nous avons pu lever 52 millions de dollars auprès de nos actionnaires, le Mali était un contributeur majeur à hauteur de 4 360 973,78 euros, et nous remercions fortement l’État malien pour son dynamisme en tant qu’actionnaire de SHAF.

L’ESSOR : Quel est l’objet de votre visite au Mali ?

Andrew Chimphondah : Shelter Afrique est venu rencontrer les autorités maliennes, afin qu’ensemble, nous recherchions les solutions sur les 3 points ci-dessous : (1) le rôle prépondérant que le Mali doit jouer au sein de Shelter Afrique, en continuant à s’acquitter de ses contributions conformément au plan établi ; (2) trouver une solution de sortie de crise sur un dossier de financement pour la construction de logements sociaux qui ne s’est pas dénouée comme prévu ; (3) explorer les possibilités de formation et de renforcement de capacités. Nous voulons également saisir cette opportunité pour annoncer la relance de nos activités à travers le déploiement de la nouvelle stratégie de l’entreprise pour répondre aux besoins de nos États membres. Cette nouvelle stratégie s’appuie principalement sur une collaboration plus étroite avec les gouvernements et nos actionnaires, un accent particulier étant mis sur la réalisation de projets immobiliers de grande envergure, à travers les partenariats public-privé (PPP).
Le gouvernement du Mali dispose d’un potentiel énorme de construction de logements abordables. Nous souhaitons entamer le débat avec le gouvernement, afin de déterminer les moyens par lesquels nous pouvons jouer un rôle majeur en matière de construction de ces logements.

L’ESSOR : Quelles sont vos visées pour le Mali ?

Andrew Chimphondah : Cette année, notre leitmotiv est de mettre sur pied de grands projets, qui auront un impact dans les pays bénéficiaires. Nous voulons commencer à nous attaquer sérieusement aux problèmes de manque de logements à travers l’Afrique et il s’avère que ce problème ne peut être résolu par des projets marginaux. Ce dont nous avons besoin, ce sont des projets d’envergure et à impact, qui permettent la construction de 1000 unités de logement au minimum.
Mais en particulier, notre but est d’apporter un appui à l’élaboration de concepts, d’études de faisabilité, puis à la mise en place de structures de financement et des opérations. Nous souhaitons également étendre les instruments de financement de la dette et de fonds propres à la réalisation de projets viables au sein du pays. Récemment, nous avons relancé nos plans au Rwanda, en vue de la construction de 2800 logements abordables à Kigali, en partenariat avec la Ville de Kigali et la Banque rwandaise de développement. Tels sont les types de projets que nous souhaitons mettre sur pied au Mali.
Nous souhaitons emmener les populations à comprendre notre dynamisme sur le marché malien. Nous disposons d’un bureau régional à Abidjan, qui nous assure une meilleure proximité avec le marché et une focalisation sur l’Afrique de l’Ouest.

L’ESSOR: Quels conseils vous prodiguerez à des promoteurs désireux d’avoir accès à vos financements?

Andrew Chimphondah : Nous encourageons les promoteurs à comprendre les spécificités de leurs marchés. La plupart du temps, nous sommes abordés par des promoteurs qui fixent des prix d’acquisition si élevés qu’il est impossible d’écouler les logements construits. Chaque économie à ses particularités. Toutefois, on observe des tendances. Dans la plupart des marchés, la première tranche du marché de l’immobilier est déjà saturée. Cependant, les promoteurs gravissent les échelons dans le but d’accéder à cette niche du marché, et de réaliser des bénéfices colossaux, ce qui arrive rarement. Notre conseil aux promoteurs est de comprendre leurs marchés, de cibler les besoins, lesquels sont généralement plus importants dans la tranche moyenne du marché.
Nous revenons sur le fait que notre priorité, désormais, est orientée vers les projets immobiliers d’envergure. Nous n’acceptons aucun projet de moins de 100 unités de logement pour un investissement de 2 à 4 millions de dollars US. Ces chiffres constituent également notre domaine d’action, car ils créent un impact et nous pouvons réaliser de grands projets. Nous recommandons également aux promoteurs de comprendre les processus. La construction est un domaine nécessitant énormément de capitaux et de la patience. Rien ne doit être fait à la hâte. Nous avons également remarqué un manque de capacités. De nombreux promoteurs disposent du terrain, notamment les promoteurs non expérimentés, mais ils en ignorent les implications. Pour pallier ce problème, nous avons organisé un atelier, en 2016, à Yaoundé, à l’intention des promoteurs, et nous comptons en organiser un autre en Côte d’Ivoire en 2019.

Propos recueillis par Khalifa DIAKITÉ

L’Essor

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