« Halidou Bouaré a été touché alors qu’il se trouvait à la station de lavage de voiture, où il travaillait. Il ne manifestait pas, mais comme il se trouvait à proximité, il a été touché par deux balles, qui l’ont atteint l’une à l’estomac et l’autre à l’épaule, alors qu’il faisait son travail. Il a perdu connaissance pendant que je le transportais à l’hôpital. Le sang coulait abondamment de sa bouche. Il est mort à l’hôpital peu après notre arrivée », rapporte Amnesty International, une organisation internationale de défense des droits de l’homme, de la part d’un proche de victime de ces manifestations récentes à Bamako. C’était dans un communiqué, le mercredi 5 août 2020.
Selon les témoignages recueillis par cette organisation, la plupart des personnes tuées les 10,11 et 12 juillet 2020 lors des manifestations de désobéissance civile du Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP) l’ont été alors qu’elles ne participaient pas à la manifestation. « Plusieurs des personnes tuées pendant les trois jours de répression ne participaient pas aux manifestations », lit-on dans le communiqué qui indique que Fayçal Cissé, âgé de 25 ans, qui a été la première victime de ces manifestations, a été tué dans une mosquée située à 300 mètres environ de l’Assemblée nationale. Alors qu’il ne participait pas à la manifestation. « Un proche de cet homme a dit à Amnesty International qu’il a été touché par une balle tirée depuis l’Assemblée nationale, alors qu’il se trouvait entre la zone des ablutions et la salle de prière », rapporte l’organisation de défense des droits de l’homme avant de préciser que « parmi les personnes tuées figure Halidou Bouaré, 21 ans. Comme Sidi Mohamed Doumbia, Halidou Bouaré était au travail quand il a été touché par une balle tirée par les forces de sécurité. »
Rapportant que plusieurs personnes sont mortes alors qu’ils étaient à leur travail ou plutôt ne prenaient pas part à la manifestation, Amnesty International indique que maintes sources indiquent l’implication des gardes du corps du président de la cour constitutionnelle, Manassa Danioko. « Lors des affrontements avec la police, Aly a reçu une balle dans la tête. Plusieurs jeunes ont vu que le tireur était l’un des gardes du corps de Manassa Danioko. Il était avec un ami qui a pris des photos du garde du corps et qui l’a identifié. Il a dit au tireur qu’il avait pris une bonne photo de lui et qu’il allait payer pour ce crime. La police a essayé de l’arrêter, mais il a réussi à s’échapper », souligne Amnesty avant de souligner également « l’implication des Forsat (forces spéciales antiterroristes) dans l’arrestation de dirigeants du M5-RFP et dans l’attaque de la mosquée de l’imam Mahmoud Dicko ». Une situation que l’organisation trouve « très préoccupante » et qui « doit donner lieu à une enquête approfondie. »
En dénonçant toutes les violations des droits de l’homme survenus lors de ces manifestations, Amnesty International estime que « l’utilisation par les forces de sécurité de la force meurtrière doit faire l’objet d’une enquête. Les manifestants et leurs proches ont le droit de savoir qui a autorisé les forces de sécurité à tirer sur eux, et il ne pourra pas y avoir de solution crédible à la crise politique si les droits humains ne sont pas respectés et si justice n’est pas rendue ».
Ces témoignages provenant d’une organisation internationale reconnue peuvent servir de point de départ aux autorités maliennes pour faire toute la lumière sur les violences ayant conduit à des morts d’hommes au Mali lors des récentes manifestations. Le retour à la stabilité passe par la détermination des circonstances réelles dans lesquelles ces personnes sont mortes. Comment arriver à déterminer ces circonstances sans une enquête approfondie et impartiale ? Quasiment impossible. Les autorités maliennes ont alors toutes les cartes entre leurs mains pour stabiliser le pays.
F.T
Source: Journal le Pays-Mali