Du 6 au 13 septembre 2020, Ali Thienou, chargé de plaidoyer sur le programme MTBA (le mariage n’est pas un jeu d’enfant) au sein de l’Organisation non gouvernementale (ONG) Save the children a conduit une mission dans les communes de Kiffosso I, Ourikéla dans le cercle de Yorosso (Région de Sikasso) et de Nièna dans la région de Sikasso pour l’élaboration et la signature des conventions sur l’abandon de la pratique du mariage des enfants. Au cours de cette mission, Ali Thienou a bien voulu nous accorder une interview dans laquelle il met l’accent sur les dangers du mariage des enfants au Mali. « Les chiffres par rapport au mariage des enfants sont alarmants au Mali. Sur le taux du décès néonatal, nous sommes à 55%. Nous appelons les communautés à nous aider à réduire ces indicateurs. Ce sont des taux qui nous interpellent tous…», a-t-il dit. Lisez !
Le Républicain : Vous avez effectué une mission dans la région de Sikasso du 6 au 13 septembre 2020, quel était l’objectif de cette mission ?
Ali THIENOU : L’objectif de la mission est d’amener la communauté, les communes et les chefs de village à signer une convention pour l’abandon du mariage des enfants. Depuis janvier 2016, le projet MTBA (le mariage n’est pas un jeu d’enfant) est en train d’être mis en œuvre dans les communes dans la région de Sikasso.
Selon vous, quelles sont les causes et les conséquences du mariage des enfants ?
Les causes du mariage des enfants sont multiples. Il y a des causes socioculturelles. Il y a la pauvreté. Il y a des causes d’ordre religieux etc. Nous sommes dans une société multidimensionnelle. Généralement, le mariage des enfants est basé sur nos cultures, sur nos mœurs et quelque part, sur nos valeurs sociétales. C’est vraiment une habitude de nos communautés mais pour amener ces communautés à abandonner la pratique, ce n’est pas immédiatement. C’est un long processus, c’est un changement de comportement qui va prendre du temps. Les actions qui peuvent amener ces communautés à changer de comportement, c’est la sensibilisation. C’est pourquoi, nous avons en place des pères éducateurs, des organisations qui œuvrent dans ce sens. Les conséquences du mariage des enfants sont aussi multiples. Il y a des conséquences socio-sanitaires, la mort néonatale. Quant une fille est mariée à bas âge, il ya cet aspect enfantin. Elle ne maîtrise pas tous les contours du mariage. Il va de soit qu’elle commence à faire des caprices enfantines. Les chiffres par rapport au mariage des enfants sont alarmants au Mali. Sur le taux du décès néonatal, nous sommes à 55%. Nous appelons les communautés à nous aider à réduire ces indicateurs. Ce sont des taux qui nous interpellent tous en tant que chef de famille, en tant que décideur, en tant que société civile.
Pensez-vous qu’avec la signature de la convention seulement, la pratique du mariage des enfants sera totalement bannie dans les différentes communes que vous avez sillonnées ?
Depuis 2016 jusqu’à nos jours, 5 ans de sensibilisation, une prise de conscience collective est là. Pour l’abandon du mariage des enfants, il faut un changement de comportement. Les comités de réflexion sur les violences basées sur le genre et le comité de suivi mis en place nous permettront de suivre les actions de la convention. C’est une signature de tous les chefs de village plus les maires et les autorités. Donc ensemble, si on mène nos efforts, dans quelques années, le phénomène sera réduit.
Au-delà de la convention, qu’est ce qu’il faut encore plus pour la fin de la pratique du mariage des enfants au Mali ?
Il ne s’agit pas de signer une convention et aller déposer dans les tiroirs mais, il faut des actions concrètes comme un plan de suivi, un plan d’action à tous les niveaux. Les ONG, c’est juste un passage, mais il faudrait un plan d’action de mise en œuvre pour réduire et suivre à tous les niveaux les actions de la convention.
Quel est le message que vous avez à lancer ?
Je demande à nos braves communautés d’essayer de prioriser la sensibilisation. Tant que nous partons avec la sensibilisation, de génération en génération, le mariage des enfants va disparaître.
Propos recueillis par Aguibou Sogodogo