Le dernier coup d’État réussi en Afrique de l’Ouest, au Burkina Faso le 30 septembre 2022, vient raviver le malaise face au « retour » des coups d’État et à la « mise à mort » méthodique des démocraties en Afrique. On dénombrait déjà en 2012 plus de 200 coups d’État et tentatives de coups d’État en Afrique depuis la période des indépendances. Il y a eu une tentative de coup d’État tous les 55 jours dans les années 1960 et 1970, et plus de 90 % des États africains ont connu un coup d’État.
Comment éviter les coups d’État en Afrique de l’ouest ?
Après la guerre froide et l’effondrement du rideau de fer, un nouveau vent démocratique commença à souffler en Afrique. L’espoir de voir libérer le continent africain pour toujours de l’autoritarisme et des prises de pouvoir militaires était grand. Le pluralisme politique et l’instauration de l’État de droit étaient censés en finir avec les coups voire les reléguer aux calendes grecques. Mais depuis les années 2000, on assiste à une recrudescence des coups d’État qui sont généralement présentés comme un moyen de restaurer l’autorité de l’État, voire de la démocratie. Depuis 2010, il y a eu plus de 40 coups d’État et tentatives de coup d’État en Afrique ; une vingtaine ont eu lieu en Afrique de l’Ouest.
Malgré la pertinence des raisons évoquées ( corruption, exclusion, tribalisme…) pour recourir à ce mode violent de prise du pouvoir d’État, il faut admettre que les coups d’État sont rarement une solution à la mauvaise gouvernance. La tendance doit être stoppée net. Cependant, il invite également à une réévaluation du projet démocratique néolibéral en Afrique. Nos recherches sur l’histoire politique de la région montrent que la démocratie dans la région a tendance à être superficielle. Malgré quelques gains, la démocratie reste largement cosmétique et les conditions qui provoquent les coups d’État persistent. Un regard sur l’histoire des coups d’État en Afrique de l’Ouest suggère certains thèmes récurrents comme causes.
“Pour éviter de futurs coups d’État et répondre à ceux d’aujourd’hui, il doit y avoir un changement radical de cap”
Ceux-ci montrent à quel point il est probable qu’il y ait plus de coups d’État et ce qui doit changer pour les empêcher. Pour éviter de futurs coups d’État et répondre à ceux d’aujourd’hui, il doit y avoir un changement radical de cap. Les pays, avec l’aide de partenaires régionaux et internationaux doivent remédier aux déficits de gouvernance reconnaissable sous la forme du non-respect des droits de la citoyenneté, de la frustration socio-économique et de l’insécurité croissante. Les organismes régionaux comme la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest et l’Union africaine, doivent également être fermes et impartiaux dans leur condamnation pour tous les types de coups d’État.
Les voies internationales pour punir les putschistes doivent être soutenues par les puissances mondiales. Les structures intergouvernementales à l’échelle mondiale doivent également contrôler – et les organisations régionales africaines doivent résister – l’ingérence étrangère dans les affaires intérieures des pays africains qui conduit à l’instabilité politique. La démocratisation en Afrique nécessite également une réorientation en fonction des circonstances locales. Enfin, une réponse plus durable aux coups d’État consiste à éliminer les conditions socio-économiques et politiques défavorables dans la politique nationale et internationale qui permettent aux causes immédiates de l’instabilité politique de se cacher derrière une démocratie de façade.
Mamady Kourouma
Docteur en droit à l’Université de Bouaké
Avocat à la cour.