Annoncée par dose homéopathique sur les réseaux par une fuite vraisemblablement bien organisée et confirmée par la suite par un communiqué du Procureur Général près de la Cour Suprême lu sur ORTM jeudi dernier , l’affaire de l’achat d’équipements dans le cadre de la LOPM, objet du contrat passé entre l’entreprise sud-africaine Paramount ( grand fabricant et spécialiste de matériels militaires)et le Ministère de la défense nationale n’a pas arrêté de faire couler beaucoup d’encre dans les salons et grins de Bamako et au sein des milieux des maliens de la diaspora, tous observateurs de l’évolution de la situation politique et sécuritaire de leur pays.
En interrogeant les milieux de l’ Administration publique et financière du pays qui ont connu ce dossier qui n’a rien de sulfureux , on commence à comprendre ce qui s ‘est réellement passé et conduit à l’établissement de mandats d’arrêt internationaux contre 3 personnalités , anciens ministres( Tieman Hubert Coulibaly, Boubou Cissé et Mamadou Igor Diarra, ayant servi dans les gouvernements IBK et un banquier à la retraite Babali Bah précédemment DG de la BMS .Alors Quels sont les faits connus et rien que les faits selon nos loupes? L’instruction étant secrète et nous n’y dérogerons pas, peu de gens savent encore le niveau d’information de la Chambre d’instruction de la Cour Suprême à date au moment du communiqué du 28 juillet 2022 mais nous savons que le dossier a bien pris ses origines au Pôle économique qui contrairement d’ailleurs à ses compétences, à la jurisprudence et en violation avec les dispositions de la constitution désignant la Haute Cour ,Seule capable de juger les anciens ministres ne devrait pas connaître ce dossier. Pourtant ,la brigade du Pôle avait semble-t-il bien interrogé plusieurs fois les dirigeants de la BMS qui selon nos radars ont rendu régulièrement visite à leurs voisins de l’ACI et certaines personnalités ayant connu la phase commande et la livraison partielle de ce marché y ont également apporté des éclaircissements à l’occasion . C’est bien de ce dossier dont la Cour suprême s’est saisie et sans même adresser des convocations en bonne et due forme selon les proches de ces personnalités,(qui sont toutes à l’extérieur du Mali pour diverses raisons personnelles ) a décidé de lancer des mandat d’arrêt internationaux relayés par des nombreux activistes et certains médias rajoutant à la confusion, chacun allant de son commentaire courtois ou insultes . Ce dossier, jamais épinglé par une structure de contrôle de l’Etat n’avait pourtant connu aucune évolution depuis des années pour certainement absence d’éléments probants ou par les éléments d’information manquants nécessaires à se faire une opinion juste, mais pourquoi donc cette précipitation de lancer des missiles en plein vol surtout notamment contre une partie des ceux qui critiquent la transition assez fréquemment et ne s’en cachent pas .Nous espérons bien nous tromper car l’erreur est humaine, mais le recoupement des témoignages lui donne l’air d’ une cabale a un moment où l’actualité est marquée par des multiplications d’attaques, la détention des 49 militaires ivoiriens et une ébullition du microcosme politique avec le débat sur une nouvelle constitution et l’éventualité des candidatures en promotion des tenants du pouvoir en contradiction avec la charte et les injonctions de la CEDEAO. Un tel écho amplifié au niveau national et international sur la réputation de nos compatriotes qui ont occupé des hautes fonctions en s’attaquant à leur honneur et la limitation de leurs mouvements ne peut être un hasard. Il est difficile de comprendre cette situation, d’autant plus que les personnes citées et bien connues des maliens demeurent innocentes jusqu’à preuve du contraire. Revenons-en a l’affaire qui peut pourtant paraître simple. Elle a commencé en fin 2015 où le Conseil Supérieur de la Défense valide sur la proposition du ministère des forces armées l’acquisition de 36 véhicules blindés Marauder équipés d’armements sud-africains pour un montant de l’ordre de 36 milliards de Fcfa. Le contrat prévoyait d’autres prestations connexes dont la formation, des réparations d’aéronefs propriétés des Fama, Etc. C‘est bien le Ministre Tieman Coulibaly en charge de la défense nationale qui a piloté avec les chefs militaires ce dossier de son ministère avant d’organiser des réunions avec ses conseillers, les structures pouvant rendre conformes les conditions du contrat avec la réglementation nationale , à savoir la Direction du Budget, celle du Trésor , la Direction de la Dette publique, la Direction des marchés publics et celle du Contrôle financier. Au terme de ce processus et des négociations entre le Ministère de la Défense ,Autorité contractante et le Fournisseur Paramount un modèle de contrat fut stabilisé et finalement signé en novembre 2015 puis soumis au ministre chargé des finances de l’époque Mamadou Igor Diarra et qui l’a approuvé comme le prescrit la réglementation des finances publiques à partir du moment où la dépense est prévue au budget du département. Début 2016 intervient le changement de gouvernement et voit la sortie du ministre des finances Diarra remplacé par Boubou Cissé. Ce dernier remet en cause le contrat existant en contestant certaines conditions de paiement dont les billets à ordre et la monnaie de la transaction préférant Euros plutôt que le dollar USD, monnaie du contrat initial. Commence alors des allers retours incessants, des cascades de réunions longues ,de nouvelles négociations pour finir par la signature d’un nouveau contrat en juin 2017 et un seul paiement connu. Quel gâchis au moment où cette opération était destinée à équiper les Fama dans l’urgence, les autorités se sont adonnées à des discussions sans fin compromettant la fabrication des équipements et pour lesquels , Paramount avait pourtant reçu une avance de 7 milliards contre caution bancaire délivrée par la BMS et dont les fonds y ont été logés. Last but not least, chacun des ministres chargés de la défense : Abdoulaye Idrissa Maiga, Tiena Coulibaly, Tiémoko Sangare et Dahirou Dembélé se sont battu bec et ongles pour pouvoir faire aboutir l’exécution de ce contrat sans succès. Au finish, les Fama n’ont reçu que 8 véhicules blindés Marauder sur 36 et disposent d’une avance de 3,7 milliards en déposit chez Paramount, ce dernier doutant désormais de la volonté de l’État malien de s’acquitter de ses obligations financières au titre du dernier contrat. Nous sommes donc beaucoup plus dans un contentieux entre un État qui a mal suivi l’exécution d’un contrat en ne respectant pas ses obligations et une Entreprise sud-africaine dont la réputation est connue mondialement dans son domaine et qui doute désormais de son client qu’est l’Etat. Le hic est que depuis 4 ans cette jolie somme de 3,7 milliards, denier public des maliens dort entre les mains des sud-africains qui ne le cachent a personne ( puisque nous en avons bien vu copie par une source )et sont toujours dans l’attente de l’Etat malien pour savoir si le contrat demeure ou doit être rompu. On se croirait dans un film et on a bien voulu faire croire à la justice malienne que ce montant a été soustrait voire à fait l’objet de détournement ,faux ou usage de faux. Une analyse approfondie devrait plutôt conduire à interpeller d’abord les Autorités qui se devraient de réclamer leur avoir de 3,7 milliards ou sa contrepartie en matériel auprès de Paramount et non la chercher auprès de ceux qui ont géré les départements ministériels. La Justice elle-même ,vu la complexité de ce dossier gagnerait à s’entourer d’un avis d’ experts comme le VEGAL ou le Contrôle général des services publics qui auraient pu à la lumière de nos textes et procédures, davantage susciter le contradictoire comme ça se fait dans tous les aspects administratifs et éclairer la lanterne de nos magistrats plutôt que de lancer en pâture et aux yeux du monde entier des compatriotes ayant occupé des hautes fonctions par l’émission catégorique et immédiate de mandats d’arrêt diffamatoires pour l’image des intéressés et du Mali car après tout il s’agit d’une affaire de maliens. En tous les cas il sera difficile pour une large partie de l’opinion de ne pas faire le rapprochement avec le fait que les 3 anciens ministres objet de ces mandats sont bien des présidentiables à l’orée des élections qui ne seront plus reportées et leur élimination par des artifices comme ça s’est produit dans certains pays et arrangerait plus d’un, mais empêcherait bien la paix des braves et la réconciliation tant souhaitée par nos compatriotes. Les maliens témoins, observateurs avisés et qui feront ces choix ne se tromperont pas et apprécieront.
Youssouf Sissoko
Source: L’Alternance