Le bataillon »Waraba » dont la sortie de fin de formation était prévue pour ce samedi 08 juin fut reportée. Pour bon nombre de Maliens, ces soldats ne sont que des parias à radier de l’armée, au motif qu’ils ont plutôt demandé des grades et refusé d’aller au front. Mais les soldats du bataillon avancent des arguments tout à fait contraires à cette version officielle. Que disent-ils ?
Selon nos interlocuteurs qui ont requis l’anonymat, leur formation a été dans les conditions les plus pitoyables. D’abord aucune autorité ne leur a jamais rendu la moindre visite durant la formation pour les encourager. Nous ne pouvons croire à cette affirmation. Ensuite, ajoutent-ils, il a fallu qu’ils manifestent leur colère pour que les autorités leur offrent à chacun un morceau de savon pour le linge et la toilette durant tout le séjour qui a duré environ trois mois.
Pis, dès qu’ils furent admis à la formation, ils ont perdu le bénéfice de la prime appelée prime Amadou Haya Sanogo d’un montant de 50 000 F CFA. Enfin parmi les soldats en question, certains avaient effectué une formation de 7 ans en Russie et devaient passer du grade d’Aspirant à celui de Lieutenant depuis 2011. Mais de report en report au fil des événements douloureux qui ont émaillé la vie sociopolitique dans notre pays, ils sont restés au grade d’Aspirant. Avec leur admission au Bataillon » Waraba « , ils ont estimé qu’après cet honorable choix porté sur leur personne, ils se devaient de répondre à l’appel de la patrie sans murmure ni hésitation. Mais voilà, lors de cette formation, un de leur promotionnaire du nom de Mariko a été envoyé en mission commandée pour piloter un avion contre les terroristes, il y a perdu la vie.
Avec donc le statut d’Aspirant qui correspond à celui d’élève officier qui ne bénéficie comme tel d’aucun avantage après sa mort. Et il n’a jusqu’ici bénéficié de quoi que ce soit, ou disons ses ayants droit n’ont rien eu après lui. C’est ce qui a conduit les quelques » officiers » au sein du Bataillon » Waraba » à réclamer le grade de Lieutenant qui ne fait pas suite à la présente formation, mais à une formation antérieure.
Autre événement dans l’événement, lorsqu’il s’est agi d’aller échanger le bataillon en vue de sa sortie, le Chef d’Etat Major Général des Armées Dayirou Dembélé a envoyé son adjoint, qui assurément n’était pas au fait des informations concernant la situation qui prévalait. Et il était en face de militaires qui, en signe de révolte, s’étaient débarrassés de leur tenue.
En terme militaire, le supérieur est alors devant des civils et s’abstient d’échanger avec eux jusqu’à ce qu’ils s’habillent correctement. De malentendu à malentendu, les soldats ont failli lyncher l’adjoint qui a eu la sauve grâce à la haie mitoyenne formée les officiers pour le protéger jusqu’à son lieu d’hébergement.
Comprenez là que les soldats s’attendaient à la satisfaction de leurs doléances pour monter directement au front, mais il a été plutôt question de prendre 10 000 F CFA chacun pour aller faire dix jours de permission à domicile.
Pour quelqu’un qui doit quitter Koulikoro pour aller séjourner à Kayes (son lieu de recrutement voire son domicile) durant dix jours avec seulement 10 000 F CFA, imaginer un peu le désarroi que cela provoque auprès de ces hommes, fussent-ils des » Waraba « , et quels Lions ? Ceux-ci expliquent d’ailleurs que lors de leur formation, malgré les centaines d’hommes à nourrir, leur viande était achetée au marché, au lieu d’abattre un bœuf. Raison qui aurait fait qu’un formateur belge a démissionné au motif qu’il ne saurait former des soldats affamés.
En tout état de cause, voilà une version totalement à l’antipode des informations divulguées par la hiérarchie militaire. Cette version est-elle connue des plus hautes autorités ? Est-elle la véritable raison qui a poussé à l’incident malheureux ? Aux autorités de voir au clair ce qui a poussé les uns et les autres à adopter le comportement intolérable que l’on reproche aux » Waraba « .
Mamadou DABO