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Affaire de la clinique pasteur : la responsabilité médicale en question : Le Dr Lasseni Konaté du comité national d’éthique pour la santé et les sciences de la vie fustige

La propagation de la maladie à virus Ebola semble être maintenue au Mali depuis quelques jours au fait qu’il n’y a pas eu de nouveaux cas détectés ces derniers temps. Dans cet entretient exclusif avec le Dr Lasseni Konaté du Comité national d’éthique pour la santé et les sciences de la vie de la Direction Nationale de la Santé, il est question entre autres de la responsabilité de la Clinique Pasteur dans la propagation de  cette terrible maladie au Mali, les manquements à l’éthique et à la déontologie en la matière et le non respect des multiples  en la matière.   

 docteur medecin professeur Lasseni Konaté Comité national éthique santé science vie direction santeEn effet, selon le Dr Lasseni Konaté, sur la définition de la responsabilité médicale, qu’il faut partir de la définition au sens juridique du terme. Ainsi, selon lui, la responsabilité s’est l’obligation de répondre d’un dommage devant la justice et d’en assumer les conséquences civiles, pénales ou disciplinaire. Notons que cela peut être des conséquences vis-à-vis d’une personne ou de la société. Pour lui, la responsabilité médicale c’est l’obligation pour un agent ou même un établissement de santé de répondre des dommages qui ont été causés lors d’un acte de soin.

A la question de savoir le degré de responsabilité de la clinique dans la propagation de la maladie à virus Ebola au Mali, le Dr Konaté, trouve qu’il faut aller aussi par rapport à notre cadre juridique actuel. Si, dit-il, si vous prenez la loi 98-036, régissant la lutte contre les épidémies et les vaccinations obligatoires contre certaines maladies, son article 11 dit qu’ «un décret pris en Conseil des Ministres détermine la liste des maladies dont la déclaration est obligatoire à l’autorité sanitaire et les conditions de cette déclaration.

Le Dr Konaté poursuit que ce décret a été effectivement, pris en 2007 et donne la liste des maladies à déclaration obligatoire. Et parmi ces maladies, on y trouve la fièvre hémorragique, c’est-à-dire la maladie Ebola.

Ce décret, portant création du Comité permanent de gestion des épidémies, pour le Dr Konaté est chargé entre autres d’élaborer un plan d’action pour la prévention et la gestion des épidémies, de mobiliser les ressources spécifiques locales, nationales et internationales et coordonner les actions des différents intervenants au plan de la prévention et des réponses aux épidémies, de mobiliser, organiser et animer les populations pour la prévention des épidémies et la déclaration rapide des cas, de gérer de manière continue les moyens pré-positionnés tels que vaccins, médicaments et aussi de coordonner et suivre le fonctionnement des mécanismes de communication autour de tous les aspects de la gestion des épidémies.

L’article 4 du même décret déclare que le Comité permanent de gestion des épidémies se réunit une fois par semestre sur convocation de son président (ndlr le ministre en charge de la Santé). En période d’épidémie, il se réunit une fois par mois sur convocation de son président. Il peut se réunir en session extraordinaire chaque fois que les circonstances l’exigent.

Et à l’article 9 de la loi 98-036 d’ajouter qu’«en cas de menace ou face à une propagation des maladies transmissibles, le ministre chargé de la santé propose au Conseil des Ministres l’institution d’un état d’alerte sanitaire sur une partie ou la totalité du territoire.

Dans ce cas, les mesures obligatoires d’hygiène et de prophylaxie sont appliquées durant toute la période d’état d’alerte. Les dépenses afférentes sont à la charge de l’Etat».

Notons au passage que ce comité existant depuis 1997 et la loi 98-036 fonctionnent à peine vue ce qui s’est passé ou ce qui passe dans la gestion de la maladie à fièvre Ebola, car il y a eu de graves manquements aux textes.

«Et par rapport à cette situation, la loi demande à tout agent de santé qui découvre un cas de ces maladies, de les déclarer obligatoirement. Cette déclaration une fois faites, il s’agit de vérifier l’effectivité de la situation avec le concours de laboratoires (national ou international), l’opinion doit être informée » poursuit-il.

Pour en venir sur ce qui s’est passé dans l’établissement de la Clinique Pasteur, dit  notre interlocuteur, «logiquement au moment où le cas a été diagnostiqué, selon les textes il aurait du être déclaré obligatoirement. Si cela n’a pas été formellement déclaré, il peut avoir un problème».

 

Est-ce dans ce cas peut-on engager la responsabilité de la Clinique Pasteur ?

Sur cette question, le Dr Lasseni Konaté répond que si on s’en tient à l’esprit des textes qu’il y a eu des manquements quelque part. Car, dit-il, le secret professionnel dans cette situation, loi fait en quelque sorte dénonciatrice du médecin ou de l’établissement. «Donc, pour protéger la santé et l’ordre publics, la loi oblige les professionnels de la santé dans ces circonstances à déclarer les cas. Maintenant, il peut y avoir un modèle de compte redu suivant lequel la transmission est faite. Le même décret dit que les établissements sanitaires doivent les déclarer au district sanitaire et dans le cas qui nous concerne, la déclaration devait être faite à la commune IV, qui à son tour devait le déclarer à la direction régionale ainsi jusqu’au ministre qui informe le Conseil des ministres» poursuit-il.

A notre interlocuteur de répondre  que c’est aux tribunaux d’apprécier cette situation. «J’ai entendu qu’il y a une plainte qui a été déposée, les tribunaux apprécieront. Mais dans tous les cas comme je le disais ci-haut, quand on s’en tient strictement aux textes, il y a eu des manquements. Et, attendons que la justice fasse son travail» ajoute-il.

 

Manquements au contrôle sanitaire des frontières

Le Dr Lasseni Konaté qui est contre la fermeture des frontières trouve que le contrôle sanitaire aux frontières, régi en République du Mali par les règlements pris par l’Organisation mondiale de la santé (Oms), par les arrangements internationaux, ainsi que les lois et règlements nationaux pris en la matière afin de prévenir la propagation, par voie terrestre, maritime ou aérienne, des maladies transmissibles, n’a pas été respecté. Sinon dit-il, le patient guinéen par qui tout le mal est venu ne saurait pénétrer le sol malien.

L’article 2 de la loi 98-035 du 20 juillet 1998 régissant le contrôle sanitaire aux frontières souligne que «les médecins, officiers et agents assermentés sont chargés de constater les infractions en matière de contrôle aux frontières». Et à son article 3 de poursuivre que «sera puni d’une peine six mois à deux ans d’emprisonnement et d’une amende de soixante mille (60.000) à un million cinq cent mille (1.500.000) francs CFA ou de l’une de ces deux peines, tout fonctionnaire, responsable ou officier d’un navire, d’un aéronef ou d’un transport terrestre qui, dans un document ou une déclaration, aura sciemment altéré ou dissimulé les faits ou qui aura omis d’informer l’autorité sanitaire de faits à sa connaissance, qu’il était dans l’obligation de révéler en application des règlements sanitaires».

Dieudonné Tembely

Encadré

C’est quoi la responsabilité médicale ?

Au XIXe siècle la responsabilité des médecins était délictuelle, fondée sur les articles 1382 et 1383 du Code Civil, et nécessitant la preuve d’une faute, d’un dommage, et d’une relation d’une faute entre le dommage et la faute.

Ce n’est qu’en 1936 que, dans l’arrêt Mercier, la Cour de Cassation a posé le principe selon lequel : « il se forme entre le médecin et son client un véritable contrat comportant pour le praticien, l’engagement sinon, bien évidemment, de guérir le malade, du moins de lui donner des soins consciencieux, attentifs, et réserve faite de circonstances exceptionnelles, conformes aux données acquises de la science ; que la violation, même involontaire, de cette obligation contractuelle, est sanctionnée par une responsabilité de même nature, également contractuelle ».

Il est utile de préciser, au sens juridique, les définitions de quelques concepts clés pour en faciliter la compréhension et l’interprétation. Ainsi, on peut aider les professionnels de la santé à en cerner les enjeux pour la pratique, au quotidien, de leurs professions, et prendre les dispositions subséquentes au meilleur de leurs intérêts et de ceux des patients.

Le service public hospitalier garantit l’accès de toutes les personnes présentes sur  le territoire national à des soins d’urgence ou à des soins de référence de qualité. A ce titre, chaque établissement hospitalier est tenu d’accueillir en urgence et à tout moment, toute personne dont  l’état de santé le justifie.

Sont considérés comme des cas d’urgence, les malades, les femmes enceintes ou les victimes d’accident dont la vie ou l’intégrité physique, y compris celle des enfants qu’elles portent, peuvent être remises en cause à bref délai.

Le devoir  juridique  est  une  norme  comportementale  générale  d’ordre  moral et social, qui s’impose à tous. Le respect d’un devoir juridique peut être obtenu par le bénéficiaire à l’aide  d’une action en justice.

En somme, la responsabilité médicale peut se définir comme une obligation, pour un professionnel de santé ou un établissement de soins, de répondre du dommage causé à l’occasion d’un acte médical et  d’en assumer les conséquences civiles, pénales et disciplinaires.

Tout établissement hospitalier public ou tout établissement hospitalier privé participant au service public hospitalier doit être en mesure d’accueillir et de traiter les cas d’urgence qui sollicitent ses services, en leur apportant tous les soins offerts par l’établissement, ou doit les référer sous sa responsabilité à l’établissement hospitalier le plus proche ayant les compétences requises.

D.T

SOURCE: Inf@sept  du   8 déc 2014.
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