La tête du maire du district du district, Adama Sangaré, déplait-elle autant au ministre de la justice qui cherche à obtenir son incarcération à tout prix? L’on peut se poser la question vu les tournures juridico judiciaires que l’affaire est entrain de prendre avec le refus de deux magistrats, Daniel Tessougé et Mohamed Sidda Dicko, respectivement Procureur Général près de la Cour d’Appel, et juge anti-corruption, de céder à la pression du Ministre de la justice Garde des Seaux, Mohamed Ali Batchily.
Ministre de la justice, chef hiérarchique du corps de la magistrature, Me Mohamed Ali Bathily, connaît très bien la manière dont fonctionne la justice. Pourtant, dans l’affaire qui l’oppose au maire du district Adama Sangaré, on a comme l’impression que le garde des Seaux -pour des raisons que le commun des Maliens ignore, -veut tourner voire contourner la procédure, préférant user de ses pouvoirs de ministre et dicter au juge Tessougé (Procureur Général près de la Cour d’Appel de Bamako) et Mohamed Sidda Dicko (Juge anti-corruption et non moins Procureur de la République près du tribunal de première instance de la commune III) la conduite à tenir, où qu’il veut qu’ils tiennent dans cette affaire pour laquelle il semble avoir un intérêt tout particulier.
Enfilant quasiment sa toge d’avocat, le ministre Batchily, depuis quelque temps, défraie la chronique par ses sorties spectaculaires dans une de cette affaire où il cherche, de toute évidence, à rendre justice; Mais à qui ?
L’avocat garde des Seaux y gardera longtemps le mystère. Mais, la pression qu’il exerce sur la magistrature et les orientations qu’il veut donner à d’éminents procéduriers, permet de se poser cette autre question : Pour qui roule M. le ministre de la justice ? Car, il faut dire que dans cette affaire on a de la peine à faire la distinction entre le ministre de la justice et…l’avocat. Surtout après la conférence de presse qu’il a organisé, la semaine dernière, pour étaler en public le conflit qui l’oppose à deux éminents magistrats et dans une affaire qui n’a rien d’extraordinaire pour ces magistrats de plusieurs années d’expérience professionnelle : Daniel Tessougué et Mohamed Sidda Dicko.
Dans une première correspondance (en date du 3 octobre 2013), le ministre de la justice adresse au Procureur général près de la Cour d’appel une plainte «Pour ouverture d’enquêtes». La lettre est signée du secrétaire général de son département et fait référence dans l’affaire Mairie de la commune IV contre le maire du district de Bamako.
Dans une deuxième correspondance en date du 14 octobre 2013, le ministre envoie directement au Procureur de la République du tribunal de la commune III, une plainte contre Adama Sangaré pour «Faux et usage de faux ». Dans ses conclusions (pardon dans sa lettre) le ministre Batchily écrit ceci : «Selon les renseignements, de graves suspicions de faux et usage de faux pèserait sur le sieur Adama Sangaré, maire du District dans l’attribution des terres dans sa circonscription se traduisant par l’extorsion de biens d’autrui, des attributions de parcelles sur les titres fonciers d’autrui. C’est pourquoi, je vous instruis de faire procéder par le Procureur près du tribunal de première instance de la commune III à l’ouverture d’une enquête sur ces faits pour établir la vérité, en rassembler les preuves et procéder à l’arrestation d’Adama Sangaré pour les besoins de la dite enquête.. ».
Il faut dire que le ministre de la justice n’a pas été satisfait des résultats auquel est parvenu le juge anti corruption.
En effet, celui-ci, quelques jours après la lettre du ministre, écrit à son tour au Garde des Seaux, à qui il explique l’impossibilité qu’il y a d’incarcérer Adama Sangaré contre lequel ses enquêtes n’ont, selon lui, révélé aucune faute susceptible d’être retenue comme infraction commise par le maire du district.
Le Garde des Seaux ne s’attend pas à une telle conclusion et pique une colère. Il demande néanmoins au juge anticorruption d’incarcérer le maire du district disant détenir lui-même les preuves ( ?) que celui-ci a bel et bien fauté. Une méthode cavalière que le juge Dicko n’a pas voulu cautionner, disant au ministre qu’il préfère bien perdre son poste que de perdre sa dignité.
En prenant en main les destinées du pays, le Président de la République, Ibrahim Boubacar Keita (nul ne l’en veut pour ça), a déclaré qu’il sera intraitable sur la lutte à mener contre la corruption et la délinquance financière. Mais, il a aussi dit et redit que cela se fera dans le strict respect du droit.
Le Ministre de la justice doit dès lors se doit de se conformer à cette volonté politique. Le bras de fer qu’il a engagé avec la magistrature n’augmentera pas forcément sa cote auprès du chef de l’Etat, dont le combat est de refonder l’Etat dans tous ses pans, sans tomber dans l’abus de pouvoir…
Papa Sow/Maliweb.net
SOURCE: Autre Presse