La taxe sur les activités financières (TAF) constitue un véritable frein au développement industriel. Depuis des années, l’Organisation patronale des industriels se bat pour sa suppression pure et simple. Et l’actuel bureau de l’Opi en fait sa deuxième action conjoncturelle (après la réduction de la TVA à 5% uniquement pour les produits manufacturés et non importés) dans la liste des mesures d’accompagnement (à court teme) proposées dans son Programme triennal 2013-2015.
Aujourd’hui, cette lutte menée auprès des autorités, serait en voie d’aboutir, car la direction générale des impôts se dit favorable à la disparition de la TAF sur la prochaine loi de finances, celle de 2014 et se met dans une logique de suivre les (futures) instructions de l’Uemoa qui n’apprécierait pas elle-même cette taxe fortement décriée par ses citoyens et assez handicapante pour l’industrialisation des pays l’espace. Et, la très forte nuisance de cette TAF non récuparable pour l’économie nationale commande les autorités maliennes à aller vite au-delà des quitus d’intention. Et l’Opi veille à ce qu’il en soit ainsi.
« Une industrie forte crée des richesses, des emplois et améliore le niveau de vie des citoyens ». Telle est la conviction du bureau de l’Opi, qui envisage de ramener l’industrie malienne à la normalité, c’est-à-dire une industrie qui pèse entre 10% et 20% du Pib. Mais, cette ambition est-elle réalisable dans un pays qui reste l’un des rares de la sous-région à appliquer la taxe sur les activités financières ? Très difficile. C’est pourquoi, dans son Programme 2013-2015, le bureau de l’Opi a fait de la suppression de cette taxe la priorité de ses priorités.
Avant de revenir sur le combat proprement dit de l’Organisation patronale, un rappel des implications de la TAF édifierait suffisamment sur le sens de cette action.
Un taux de 15%
La taxe sur les activités financières résulte de la particularité du secteur financier qui n’est pas assujetti à la TVA, pour les opérations financières.
Elle est calculée sur les intérêts des prêts octroyés par les banques ou ceux des dépôts et créances rémunérées par les banques.
Cette taxation des intérêts dans les deux opérations est une particularité malienne qui peut pénaliser l’activité bancaire. Son taux est de 15%.
Selon l’article 244 du Code général des impôts, sont soumises à la TAF, les opérations qui se rattachent aux activités bancaires, financières, et d’une manière générale au commerce des valeurs de l’argent. Toutefois, les opérations de crédit bail et les opérations qui ne se rattachent pas spécifiquement au commerce des valeurs et de l’argent ne sont pas passibles de la TAF.
L’article 245 du CGI liste les personnes assujetties à la TAF. Ce sont les professionnels du commerce des valeurs et de l’argent, notamment : les banques ; les établissements financiers ; les agents de changes et autres personnes réalisant à titre principal les opérations de nature bancaire ou financière ; les escompteurs ; les remisiers.
Par contre, les sommes versées par le trésor à la banque centrale chargée du privilège de l’émission ainsi que les produits des opérations de cette banque, génératrice de l’émission des billets ; les agios afférents à la mobilisation par voie de réescompte ou de pensions d’effets publics ou privés figurant dans le portefeuille des banques, des établissements financiers ou organismes publics ou semi-publics habilités à réaliser des opérations d’escompte ainsi que ceux afférents à la première négociation des effets destinés à mobiliser les prêts consentis par les mêmes organismes ; les opérations relatives aux entreprises d’assurances soumises à un droit d’enregistrement en vertu des dispositions particulières prévues à cet effet ; et les intérêts et commissions relatifs aux opérations réalisées sur le marché monétaire, sont exonérés de la TAF.
La taxe est assise sur le montant des recettes réalisées à l’occasion des opérations imposables, la taxe étant exclue de la base d’imposition.
Trois obligations s’imposent aux redevables en matière de TAF.
La première est l’obligation de déclarer son existence à la direction générale des impôts dans les dix jours du démarrage des activités. Une déclaration similaire doit être souscrite en cas de cession, de cessation d’entreprise ou de modification d’activités. La seconde obligation est relative à la tenue d’une comptabilité régulière et au respect des règles en matière de facturation. La troisième obligation consiste à déclarer mensuellement le chiffre d’affaires réalisé et à acquitter la TVA avant le quinze du mois suivant celui au titre duquel l’impôt est dû.
Le non-respect de ces règles est sanctionné.
Plus de TAF à l’horizon 2014
Comme on le voit, la TAF frappe en priorité les banques et établissements financiers. Or, il est admis de tous qu’aucune industrie ne peut investir sans un prêt bancaire. Et les banques incluent, en général, la TAF dans les prêts et concours financiers aux industriels qui font appel à leurs services. « C’est un coût supplémentaire pour l’investissement en général et le developpement des industries en particulier », nous confie un industriel de la place. Qui rappelle que sa suppression est longtemps demandée par l’OPI qui la sent de plus en plus handicapante, surtout en cette période de crise.
Un responsable de l’Opi va plus loin, et lance ce coup de gueule : « La TAF cogne tous les emprunts et tous les opérateurs. Nous, INDUSTRIELS, pensons qu’il faut la supprimer. Le coût de l’argent est déjà trop cher. C’est une surtaxe qui nuit à l’économie nationale. Elle encourage les marchés parallèles. Les banquiers devraient être les premiers à défendre cette réforme. Nous sommes le seul pays de l’Uemoa à la supporter. Quand les pays développés ont des taux proches de zéro, nous, nous sommes encore entre 12 et 20% ».
En effet, selon de nombreux analystes, la TAF constitue un frein au développement industriel. Car, elle renchérit le coût de l’argent. Les sommes pour l’industrie sont lourdes. Les matières premières sont financées par la banque. Déjà l’investissement en machines et autres acquisitions via les banques nécessite un coût moindre ; de même que l’achat des matières premières. L’ensemble participe de rendre l’industrie rentable.
La concurrence est inégale dans une zone Uemoa avec des pays sans TAF et des pays avec TAF
« Le Mali est le seul à avoir une TAF non récupérable. Dans les autres Etats, soit elle n’existe pas, soit elle est une TVA, donc récupérable », révèle un interlocuteur bien au fait du sujet.
Sa suppression contribuera considérablement à la relance du tissu industriel malien. Parce qu’elle va améliorer le coût de l’argent, donner quelques points de compétitivité en plus aux industries et rendre le Mali un peu plus attractif.
Quels sont les efforts entrepris par C’est pourquopi, l’OPI a entrepris des efforts auprès du gouvernement malien, et elle poursuit toujours le combat pour obtenir la suppression de la TAF. Entre autres actions menées, l’inscription de la suppression de cette taxe dans le Plan de mandature de l’actuel bureau ; son inscription dans les 39 mesures de l’industrie en 2011, et dans les préoccupations du secteur privé discuté par une commission mixte Etat-Secteur privé.
Plus récemment, une délégation de l’Opi a rencontre le directeur général des impôts, qui s’est dit favorable à la disparition de la TAF sur la prochaine loi de finances, celle de 2014. Les autorités maliennes semblent attendre juste un signal de l’Uemoa. Et l’un de nos interlocuteurs conclut qu’ « il faut supprimer cette taxe ; l’UEMOA a déjà donné son accord. C’est le Mali qui traîne des pieds ». Avis aux autorités.
Sékou Tamboura