C’est dans les locaux du Centre Carter que le conseiller spécial adjoint, M. Jean Ntole KAZADI s’est entretenu ce vendredi 20 Septembre 2019 avec les hommes du média. Dans le cadre d’informer l’opinion nationale et internationale sur son 5ème rapport, l’Observateur Indépendant dénonce des obstacles à la mise en œuvre de l’Accord et fait 12 recommandations.
Désigné comme Observateur indépendant à la fin de l’année 2017, selon l’Article 63 de l’Accord de 2015, le travail de l’Observateur indépendant consiste à identifier de manière impartiale les blocages dans le processus de mise en œuvre et à recommander des mesures pour améliorer la mise en œuvre. Ce rapport, destiné aux parties maliennes, à la communauté internationale et au public, est le cinquième des rapports périodiques de l’Observateur indépendant couvrant la période entre Mai et Août 2019.
Dans ce 5ème rapport, la période entre Mai et Août 2019 fut marquée par quatre phénomènes à savoir la reprise de la violence entre les parties maliennes, notamment à Talataye en Mai et à Lerneb en Juillet, l’incertitude concernant l’avenir de la MINUSMA, la démission du Gouvernement au mois d’Avril à la suite d’une crise socio-politique et le blocage du processus du DDR ( Désarmement- Démobilisation et Réinsertion).
Il relève aussi quelques progrès acquis entre mai et aout 2019, à l’instar de l’adoption par l’Assemblée Nationale, en juin 2019, de la Loi d’Entente nationale, de la Loi créant la Zone de développement des régions du Nord et l’organisation par le gouvernement de 17 formations dans différents domaines techniques pour le renforcement des capacités des autorités intérimaires tant au niveau des régions que des cercles.
Pour ce qui est des obstacles, ils existent sur plusieurs plans:
Sur le plan politico-institutionnel, la réforme constitutionnelle est freinée par la crise socio-politique. Le referendum constitutionnel prévu en juin n’a pas eu lieu et le Dialogue Politique Inclusif qui servira aussi de cadre d’échange sur ce sujet devra être achevé avant le redémarrage de la réforme constitutionnelle. Quant à la profanation du drapeau malien à Kidal, cela a également contribué un nouveau revers pour le retour des services étatiques sociaux de base dans la ville.
Sur le plan sécuritaire, le rapport note les tactiques dilatoires des parties dans le processus de démobilisation, désarmement, et réintégration (DDR) accéléré. On peut citer comme cause majeures l’imprévisibilité du budget, le sentiment général d’une volonté des certains éléments radicaux, de tous les camps de dresser des obstacles au bon déroulement et à l’aboutissement rapide du processus de DDR accélérée, et donc la mise en place de l’armée malienne reconstituée.
Quant à la situation politique nationale, on peut citer des divergences persistantes au sein de la classe politique et de la société civile sur la nature et les objectifs du Dialogue Politique Inclusif, ainsi qu’un scepticisme grandissant des populations par rapport à la réforme constitutionnelle et parfois l’application même de l’Accord.
L’Observateur indépendant consacre une importante partie de son rapport à l’examen de l’état d’exécution par les Parties signataires de leur engagement pour appuyer le développement socio-économique, surtout au Nord du Mali. Sur ce point, le rapport note que” les résultats de mise en œuvre des différents plans lancés par le gouvernement et la Stratégie spécifique pour le développement des régions du Nord n’ont pas été suffisamment clarifiés. Compte tenu de l’absence de fléchage géographique des budgets touchant au développement économique, il a été impossible pour l’Observateur indépendant d’identifier les dépenses engagées pour des projets spécifiques prévus par l’Accord”.
“Concernant la Zone de développement, il relève que les institutions et mécanismes prévus pour sa mise en place et son opérationnalisation ne sont ni effectifs ni fonctionnels. Les différends sont encore vivaces entre les Parties signataires sur la gestion et le fonctionnement du Fonds de Développement Durable (FDD) destiné à soutenir le développement des régions du Nord. L’Observateur indépendant a cependant constaté que pour appuyer ce processus de développement, les donateurs internationaux ont généralement tenu leurs engagements financiers annoncés en 2015 à la Conférence de Paris, qui représentaient une contribution de 3.5 milliards de dollars américains. Toutefois, ce montant correspond en grande partie à des projets déjà en cours en 2015 et non à de nouveaux financements supplémentaires spécifiquement liés à l’Accord. Globalement, l’absence de développement économique depuis 2015 contribue au scepticisme croissant du public à l’égard de l’Accord.”
L’Observateur indépendant recommande plusieurs mesures pour améliorer la mise en œuvre de l’Accord, notamment que le Gouvernement, en coordination avec les partenaires internationaux, publient un rapport sur l’état d’exécution des donations internationales en soutien à la mise en œuvre. Les signataires devraient rapidement opérationnaliser la Zone de développement et résoudre leur différends sur le Fonds de Développement Durable.
Aussi l’Observateur indépendant recommande au Conseil de Sécurité des Nations unies et au Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine d’encourager les décideurs au plus haut niveau à faire preuve d’un leadership accru dans la mise en œuvre. Pour la première fois depuis le début de sa mission, l’Observateur indépendant recommande aussi que la communauté internationale envisage des mesures dissuasives ou des sanctions à l’encontre des décideurs, notamment face aux multiples manœuvres dilatoires qui retardent la réalisation du processus essentiel du DDR.
Le rapport conclut que les défis pour la mise en œuvre et pour une paix durable au Mali demeurent importants. Sans une action plus résolue des dirigeants du Gouvernement, de la CMA, et de la Plateforme, la mise en œuvre continuera à être caractérisée par des lenteurs et des réticences chroniques, avec les risques que cela représente pour le Mali et la région.
AFANOU KADIA DOUMBIA Stagiaire
Malijet