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30 ANS APRES LA CHUTE DU MUR DE BERLIN : L’espoir suscité par le «Vent de l’Est» confisqué en Afrique par les cols blancs de la démocratie

Précipitation de la fin de l’apartheid (ségrégation raciale) en Afrique du Sud et chute des régimes despotiques ancrés par des uniques dans de nombreux Etats africains, francophones notamment ! Voilà à notre avis les deux conséquences politiques notables de la chute du «Mur de Berlin» le 9 octobre 1989 marquant du coup la réunification de la grande Allemagne. Et si les Sud africains ont eu tort de croire que la fin de l’apartheid est une panacée pour équilibrer les rapports sociaux et économiques entre Noirs et Blancs, beaucoup d’autres Africains comprennent aujourd’hui qu’ils avaient fondé trop d’espoir sur la démocratie qui n’a finalement engendré qu’injustice et misère dans de  nombreux pays.

Avec la chute du Mur, le régime de l’apartheid ne pouvait plus justifier son existence en se présentant comme un rempart contre le communisme dans le pays et en Afrique australe. «Le gouvernement de l’Afrique du Sud lui-même, mais aussi les États-Unis et, dans une moindre mesure, le Royaume-Uni considéraient le régime de l’apartheid comme une sorte de digue contre le communisme. Et ces intérêts stratégiques étaient très importants, ils ont sans aucun doute contribué au maintien du régime. Avec la chute du Mur de Berlin, la désintégration de ce modèle a eu un impact», a confié à nos confrères de RFI Stephen Sparks, professeur d’histoire à l’université de Johannesburg (Afrique du Sud)

«L’ANC a alors perdu son attachement à l’idéologie socialiste et communiste. Et cela a donc pu calmer l’inquiétude du gouvernement sud-africain de voir un régime socialiste ou communiste prendre le pouvoir lors de la transition post-apartheid», a-t-il ajouté. Si ce sont avant tout des raisons économiques et de politique intérieure qui ont conduit à la fin de l’apartheid, la chute du Mur de Berlin aura offert une fenêtre d’opportunité pour faciliter les négociations.

Après la chute du Mur de Berlin, le président François Mitterrand (paix à son âme) a prononcé un discours historique le 20 juin 1990 à la Baule lors de la 16e conférence des chefs d’État d’Afrique et de France. «Il nous faut parler de démocratie», avait dit Mitterrand à ses hôtes africains. «C’est un principe universel qui vient d’apparaître aux peuples de l’Europe centrale comme une évidence absolue», a-t-il poursuivant liant désormais le soutien de la France (politique, diplomatique et surtout l’aide budgétaire) aux efforts consentis pas les uns et les autres en faveur de l’avènement et de l’ancrage de la démocratie.

En Afrique, l’espoir démocratique suscité par ce Vent de l’Est n’est aujourd’hui qu’une chimère. Les mouvements démocratiques ont échoué à concrétiser les aspirations des peuples en vraies visions de développement socioéconomique. Pour la conquête du pouvoir, les démocrates se sont divisés en clans aux pratiques mafieuses. Les vraies préoccupations des peuples sont occultées par la minorité qui concentre l’essentiel du pouvoir entre les mains et qui a poussé la mégalomanie et la cupidité à la propagation des maux que la démocratie était sensée éradiquer. Corruption, délinquance financière, gabegie… ont augmenté la misère. Ils sont nombreux aujourd’hui ce qui voudraient échanger cette «liberté démocratique» contre les trois repas ordinaires ou en emplois décents pour leurs enfants.

Débarrassé du communisme, le capitalisme a déployé les voiles de la mondialisation pour conquérir le monde en enterrant les valeurs humaines essentielles comme la solidarité, la fraternité… enfonçant l’humanité dans une crise sociale aiguë avec de plus en plus de personnes qui ont du mal à joindre les deux bouts.

Des frustrations qui ont fait le lit de l’extrémisme : si l’Europe et une partie de l’Amérique du Sud n’ont jamais été à la portée de l’extrême droite, de nombreux courants religieux se sont radicalisés en Orient pour faire face à l’expansion capitaliste qui ne respecte qu’une seule valeur : l’argent, le capital, la richesse… Si la guerre froide a été oubliée, les confrontations géopolitiques et géostratégiques ont donné naissance à des monstres : Al Qaeda et Daech (Etat islamique) dont les «bébés» ont fait de la planète un enfer. Tous les moyens étant désormais bons pour se positionner sur les plans diplomatiques et économiques, des pays comme la Libye, la Syrie, le Mali… sont déstabilisés. Les crises politiques et les guerres se multiplient avec leurs lots de drames humains.

Ce qui fait que trente ans après la réunification allemande, comme l’a indiqué le quotidien français «Libération» dans sa parution du 9 novembre 2019, «le monde s’emmure». Alors qu’on pensait en 1989 entrer dans une ère de libertés, déplorent les confrères, «les barrières se sont multipliées partout sur la planète, notamment en Europe, continent forteresse où de nouveaux murs sont érigés un peu partout… Le Vieux Continent s’est barricadé face aux migrants». Une migration pourtant en partie liée aux conséquences de la politique extérieure des pays européens comme la France qui encourage la mauvaise gouvernance dans ses ex-colonies pour garantir ses propres intérêts.

Des intérêts qui l’ont amené à faire sauter inconsciemment des verrous (contre l’extrémisme religieux et le trafic d’êtres humains) comme la Libye devenue de nos jours un no man’s land depuis l’élimination de Mouammar Kadhafi par Nicolas Sarkozy et sa bande d’alliés.

Au finish, comme le déplore «Libé», on constate que «le Mur est tombé» pour place d’autres «murs, non plus pour interdire aux individus de sortir, mais pour les empêcher d’entrer». Il est temps que les puissances impérialistes, surtout en Europe, comprennent que qui sème le vent récolte la tempête. L’incessant flux migratoire et le terrorisme sont les conséquences de leurs politiques en Afrique. A elles maintenant d’assumer toutes les conséquences.

Moussa Bolly

LE MATIN

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