Le président IBK est mis en demeure par le FMI. Il est invité à prendre des sanctions contre des personnalités impliquées dans des opérations financières douteuses révélées par un rapport d’audit de marchés publics. Ce rapport commandité par l’Etat à la demande du FMI accable certains proches du chef de l’Etat soupçonnés d’être complices de détournements de fonds comme la surfacturation d’un contrat d’armement à hauteur de 29 milliards de nos francs. IBK va-t-il lâché les cerveaux de cette affaire gênante ? Il n’a que deux petits mois pour agir.
En première ligne, se trouve la ministre de l’Economie et des Finances. Elle est compromise en tant que premier responsable du département dont la signature a autorisé les douteuses transactions. De nombreux observateurs estiment que si IBK doit se débarrasser des fautifs. Bouaré Fily Sissoko devrait prendre la porte. Mais elle est difficile à déboulonner, car L’ex-Premier ministre Oumar Tatam Ly qui voulait la faire partir du gouvernement a lui-même fini par rendre le tablier. Il y a des fournisseurs de l’Etat : des hommes d’affaires futés qui sont bien rôdés dans ces genres de transactions douteuses pour se faire de l’argent facile. Le rapport final de l’audit des marchés surfacturés pourra clairement déterminer le niveau de responsabilité de chacun mais, en attendant, le nom de la société Guo SARL est sur les lèvres. Il y a également tout un réseau qui s’est constitué autour de ce marché.
Le patron de cette entreprise (Guo SARL) est surtout connu pour ses relations privilégiées avec le président lui-même. Un conseiller spécial du président est d’ailleurs considéré comme patron de ladite entreprise, si bien que certains parlent d’une possible connivence au sommet de l’Etat au sujet de l’acquisition du marché du contrat d’armement. Autres personnalités pouvant être inquiétés : des ministres. Ces hauts fonctionnaires échapperont difficilement à l’application des sanctions qui tiennent à cœur au FMI. En tout cas, le président, indique-t-on, aura du mal à se défaire de ces derniers qui sont très proches de lui ou des membres de sa famille. Le chef de la mission du FMI, Christian Josz, ne parle pas encore de relations apaisées entre le Mali et l’institution financière. Selon lui, le FMI suivra de près la prise de sanctions contre les personnalités impliquées dans les surfacturations. La triste suspension de l’aide budgétaire du FMI et de la Banque mondiale court donc jusqu’en décembre prochain où doit se tenir le conseil d’administration du FMI à Washington.
Des contrats annulés
Le gouvernement s’était dépêché pour faire des reformes avant la venue de la mission du FMI au Mali, mais cela n’a pas suffit à calmer les bailleurs de fonds. Il y a eu notamment la correction des dispositions de la loi sur les marchés publics, particulièrement son article 8 qui parle du «secret-défense» en matière de contrats militaires. Cet article a été utilisé frauduleusement par ceux qui ont bénéficié du contrat d’armement de plus de 100 milliards de nos francs. Le FMI a demandé qu’une dizaine de contrats soit annulés par les autorités maliennes. Toutefois, les opérateurs de bonne fois seront payés au juste prix de la valeur des matériels fournis. Certains articles étaient surfacturés cinq fois leur prix réels. Ces manquements qui avaient été dénoncés par l’opposition ont provoqué de la colère chez beaucoup de Maliens.
S’agissant de l’avion présidentiel, les mêmes pratiques frauduleuses ont été appliquées par des hommes d’affaires affiliés à la présidence. Il faudra attendre la publication des rapports pour être fixés sur le prix réel de l’avion. Après des recoupements, le rapport provisoire a donné environ 18 milliards comme valeur approximative de l’appareil. Les deux milliards restant seraient consacrés à d’autres frais. Lesquels ? Mystère. Pourtant, la thèse du vol organisée ne doit pas être exclue car il y a de nombreuses autres zones d’ombre autour de cet avion qui a été la source de tous les malheurs du pays. Son achat, alors que le pays est en pleine crise économique et sécuritaire, a conduit à la suspension de l’aide budgétaire par des bailleurs de fonds. La mission est parvenue à un accord avec le gouvernement. Cela va permettre de proposer les conclusions des première et deuxième revues du programme dont l’approbation par le conseil d’administration est nécessaire.
Le gouvernement va bientôt soumettre une nouvelle loi de finances rectificative à l’Assemblée nationale pour régulariser les dépenses extrabudgétaires pour un montant de 30 milliards de FCFA à financer par un recours au marché financier régional. Cet ajout portera le déficit budgétaire global à 5, 8 pour cent du PIB, à comparer à 5,2 pour cent dans la loi de finances rectificative approuvée en août. «La mission salue le budget que le gouvernement entend déposer à l’Assemblée nationale en octobre. Ce budget vise un déficit global de 4,4% du PIB », indique le FMI. Le déficit est financé pour trois quarts par l’appui des bailleurs de fonds, le reste étant couvert par le marché financier régional. La mission se réjouit en outre du renforcement des réformes structurelles, notamment celles qui visent améliorer l’administration fiscale, la maîtrise des dépenses et la gestion de la dette et de la trésorerie.
Soumaïla T. Diarra