Le jeudi 14 septembre 2023 a eu lieu un coup de tonnerre dans le monde de la culture.
Par le biais d’un courrier, expédié par les DRAC, le ministère de la Culture sur décision du ministère de l’Europe et des affaires étrangères a demandé de ne plus programmer les artistes du Niger, du Burkina Faso et du Mali.
Ce courrier demande de « suspendre, jusqu’à nouvel ordre, toute coopération […] sans délai et sans aucune exception ».
Ce courrier, scandaleux dans son propos comme dans sa tonalité, se poursuit ainsi : « Tous les soutiens financiers doivent également être suspendus, y compris via des structures françaises, comme des associations par exemple. De la même manière, aucune invitation de tout ressortissant de ces pays ne doit être lancée. A compter de ce jour, la France ne délivre plus de visas pour les ressortissants de ces trois pays sans aucune exception, et ce jusqu’à nouvel ordre ».
La situation politique, si terrible soit-elle, ne saurait justifier une telle décision. Rédigé sur instruction du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, ce courrier est absolument scandaleux, et n’a aucun sens d’un point de vue artistique.
Il impactera aussi les sportifs, les universitaires et scientifiques, les chercheurs, qui subiront ainsi une double peine : situation politique locale délétère et interdiction de se rendre en France.
Il est absolument inédit et scandaleux d’interdire à tous les ressortissants d’un pays de se rendre en France.
Le démenti publié ce jour par le Ministère de la culture ne saurait éluder le fait que la directive de déprogrammer a bien été donnée puisque ces courriers ont été envoyés. La décision gouvernementale de bloquer des visas revient de fait à devoir déprogrammer.
Nous nous opposons à cette décision qui rend responsables ces peuples des choix politiques de quelques dirigeants (quoi qu’on pense de ces dirigeants par ailleurs). C’est porter atteinte à la liberté culturelle. C’est rabougrir la France et la couper des forces vives de la francophonie. En somme, Macron ouvre la boîte de Pandore de la rupture totale du dialogue avec ces pays, coopération culturelle incluse.
Nous, directeurs et directrices de lieux, programmateurs et programmatrices, acteurs et actrices du monde de la culture, élu·es, nous opposons frontalement à cette injonction, qui témoigne du traitement strictement diplomatique d’un enjeu qui est avant tout artistique et culturel.
Nous sommes pleinement solidaires des artistes nigériens, burkinabés et maliens. Nous continuerons à développer les projets que nous avons avec eux et à les accueillir dans nos théâtres et structures.
mediapart.fr