La révolte des représentants de l’État contre l’État ; les représentants de l’État en grève, prenant en otage le fonctionnement de l’État, à travers le pays. C’est au Mali et uniquement dans ce pays au monde où des responsables au sommet de l’État se livrent en spectacle comme de donneurs de leçons que se produisent des paradoxes de cette nature.
Le Mali est le seul pays au monde, du moins l’un des rares, où l’on retrouve les représentants de l’État se constituer en syndicat pour défendre leurs intérêts ceux de leurs corps. Il s’agit d’un choix et d’une situation inconfortable que seuls lesdits syndicats et les autorités nationales sont en mesure de répondre.
En observateur et citoyen de ce pays, nous avons le regret de constater que la présidentielle de 2018 a été sérieusement menacée par des revendications corporatistes de ces syndicats, qui ont observé une grève, du 25 juin au 3 juillet 2018. Ces mêmes administrateurs, quelques mois plus tard, ont déposé, à l’issue d’une réunion, le 24 janvier 2019, un préavis de grève de 72 heures, à compter du 11 février 2019, pour revendiquer la satisfaction de sept points de doléances.
Toujours se prévalant de l’argument irréfutable de mauvaises conditions de vie et de travail, de manque de mesures minimums de sécurité, ces représentants de l’État, viennent d’appeler tous leurs militants, dans les huit cercles et 55 arrondissements de la région de Mopti, à rejoindre la ville de Mopti ou toutes autres localités plus sécurisées, jusqu’au désarmement total de toutes les milices ou jusqu’à la prise de mesure de protection sécuritaire par les autorités compétentes. Motifs, ces militants, qui servent l’État dans ces localités, sont exposés en insécurité : pas d’arme individuelle, pas de gardes rapprochés, malgré la situation que tout le monde sait…
Suite à cet appel, le ministre Bah, en charge de l’Administration du territoire et de la décentralisation panique. En effet, au lieu de rassurer, ces serviteurs de l’État, abandonnés sans défense, et exposés à toute sorte de risque, quant aux dispositions en cours par l’Etat pour les sécuriser, il brandit la fibre patriotique, entonnant l’hymne national. Pour le ministre, ces agents doivent être ‘’le capitaine qui quitte le dernier’’. Après tant d’années au service de leur pays, ces agents ne sont-ils pas conscients de leur mission ? Si tel était le cas, comme le stipule l’appel du ministre, est-ce que dans un Pays organisé où les autorités ont souci de la représentation de l’État et la culture administrative, les représentants de l’État peuvent-ils réellement être amenés à s’organiser pour réclamer de meilleures conditions de travail ou même des droits ?
Ce qui est certain, c’est que les administrateurs civils du Mali n’ont pas attendu la lecture de l’hymne national par leur ministre pour être les derniers à quitter Kidal, Tombouctou et Gao en 2012 !
C’est cette même fibre patriotique qui a valu, le 28 juin 1990, la mort à Moussa DIALLO, Chef d’Arrondissement de Tindermen et son épouse enceinte ; à Mohamed SANGARE, préfet de Bourem, avec son fils, le 5 avril 2012 ; à Ibrahim AG TOUBEISSI, sous-préfet de Ouinerden, assassiné froidement jusqu’à domicile, le 18 mars 2018 ; à Amadou Belco BAH, Drissa COULIBALY, Commandant Mory DIARRA, Lieutenant Mahamane B TOURE, Sékou CISSOUMA, Paul Marie DIARRA, quand la république se cachait dans le camp de la MINUSMA et s’envolait en catimini par avion, le 17 mai 2014 (visite de Moussa Mara à Kidal).
Alors, sachons raison garder !
Par Sidi DAO