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RETOUR SUR LE PANEL DÉDIÉ AU 26 MARS Ils ont dit …

Tordre le cou à la manipulation et aux tentatives révisionnistes en rappelant heure par heure le sursaut du peuple malien en mars 1991, c’est l’exercice auquel se sont volontiers prêtées plusieurs figures de la scène politique malienne qui ont pris une part très active à la révolution populaire ayant mis fin à la dictature de Moussa Traoré. Sans tabou, les intervenants ont retracé, le 02 avril, au CICB, le film des événements et des efforts héroïques qui ont permis aux Maliens de se libérer des affres de la tyrannie. Sans complaisance, les panélistes ont aussi évoqué le bilan de trois décennies de démocratie avec ses réussites et ses insuffisances. Au fil des discours, tous ont réaffirmé la gravité des temps actuels où l’héritage démocratique subit des assauts répétés dont le dessein sournois est de le réduire à néant. Enfin, les propos successifs ont surligné le besoin existentiel de se (re)mobiliser pour que le Mali se sombre pas une fois de plus dans l’obscurantisme dictatorial.

Nous rééditons un florilège des interventions.

 

Pr. Marimanthia Diarra

« Il s’agit, pour nous les acteurs de mouvement démocratique, de jeter un regard critique sur nos acquis, nos insuffisances et de proposer des pistes de solutions raisonnables et réalistes pour une sortie de crise de notre pays. […] Les héritiers de 1991 nous attendent. Nous avons le devoir de combler leurs attentes. Pour ce faire, il nous faut un recul et de la lucidité pour rappeler le passé et nous projeter dans l’avenir. […] Le constat est que les expériences concertées du pouvoir et du consensus politique ont laissé le goût amer de part et d’autre ».

 

Pr. Aliou Nouhoum Diallo

« Si le mouvement démocratique ne se reconstitue pas, il est évident que ceux qui sont venus pour 6 mois qui ont fait 22 ans et ceux qui sont venus pour 3 ans feront peut-être 33 ans. Je regrette honnêtement que la CEDEAO a cru devoir négocier les 3 ans. On a légalisé le coup d’Etat en le négociant pour le ramener à 18 mois. »

 

Pr. Moustapha Dicko

« Ce qui nous unissait en 91 était notre volonté ferme de faire de notre pays un pays de droit et de démocratie. Les événements de Mars 1991 ont bel et bien été émaillés de tueries de jeunes gens, femmes et hommes tombés sous les balles d’un régime hostile aux libertés individuelles ainsi qu’aux libertés associatives et politiques. Ceux qui pensent que le mouvement démocratique s’est arrêté le 9 juin 1992, se trompent. Il a continué et continuera tant que les acteurs seront vivants. »

 

Mme Sy Kadiatou Sow

« La plupart de ceux qui ont accepté à un moment donné d’accompagner le président et sa majorité, que ce soient Alpha Oumar Konaré, IBK et ATT, ne se sentent pas concernés à l’heure de bilan surtout quand le bilan est jugé négatif. On assume quand c’est bon, mais quand ce n’est pas bon, c’est les autres[…] Les plus dictateurs ont font la corruption, les démocraties les plus avancées ont fait la corruption, mais ce qui est impardonnable dans notre cas, c’est que certains de nos camarades ont porté le flambeau. Toutes les corruptions qu’on connaît aujourd’hui ont leurs racines sous Moussa Traoré. »

 

Dr. Chérif Cissé

 « Tous les Maliens qui ont moins de 45 ans ne connaissent rien de la gestion de Moussa Traoré. C’est très facile de leur faire avaler comme quoi Moussa Traoré n’était pas responsable de tout ce qui s’est passé en 1991 ». […] Le plus urgent, c’est que le pays va mal ; un pays ne peut pas être dans un tel état et sous sanctions, isolé, et en crise politique et institutionnelle, et que les acteurs politiques ne se parlent pas. Donc, ça va au-delà du mouvement démocratique. »

 

Tièblé Dramé

« 31 ans après l’avènement de la démocratie, le Mali est menacé dans son existence. Des villages vivent sous le joug des terroristes. 45% de la population vivent sous le seuil de pauvreté. Les questions diverses occupent des places importantes dans la vie de notre nation. Les appels au meurtre sont lancés contre des personnalités du pays, et on continue à dire que nous sommes dans un pays démocratique. Les acteurs politiques maliens doivent trouver un espace urgent aujourd’hui pour parler de l’état du pays qui est en train de nous échapper progressivement. Il faut qu’on se retrouve pour retrouver la légalité démocratique. »

 

Soumana Sacko

Presque tous les maux que les Maliens reprochent aujourd’hui à la démocratie sont de la faute du régime du défunt Général. C’est Moussa Traoré qui a, par exemple, détruit l’armée malienne ; et au moment de l’avènement de la démocratie, il n’y avait même pas d’Etat, et il fallait tout reconstruire.

La lutte continue, tirons des leçons du passé, redoublons de détermination et d’engagement pour sauver notre peuple des mains de restauration de l’UDPM. »

 

Amadou Koïta

« Trois coups d’Etat après 31 ans de démocratie. Ceux qui ont défendu toutes les valeurs démocratiques de 1991 ont soutenu trois coups d’Etat ! Ceux qui ont été les acteurs du mouvement démocratique ont soutenu les coups d’Etat de 2012, 2020 et de 2021. S’il y a un héritier de Moussa Traoré qui tire sur le mouvement démocratique, vous ne devez pas vous étonner parce que vous avez créé d’abord les conditions pour que tout cela arrive. Le héros ne fait pas l’histoire, c’est l’histoire qui fait le héros. L’histoire ne fait pas le peuple, c’est le peuple qui fait l’histoire. En 1991, c’est le peuple malien qui a fait l’histoire. Et en 2022, avec la complicité de certains acteurs du mouvement démocratique, on peut dire que c’est le héros qui fait l’histoire sur nous aujourd’hui.»

Pr. Tièmoko Sangaré

Mars 91 a été une date fondatrice dans l’histoire du Mali. Malheureusement, ce n’est pas compris par tout le monde, faute d’information. Le panel est destiné à faire en sorte que ce que les gens ne savent pas leur soit dit. La portée et la valeur d’un témoignage historique sont inversement proportionnelles à la distance qui sépare le récit des faits. Plus les récits s’éloignent des faits, moins ils ont la portée. Concernant les bilans du mouvement démocratique, il est inexact de dire que le mouvement démocratique n’a pas atteint ses objectifs et qu’il a échoué. »

 

Dr. Oumar Mariko

On a dit qu’il y a de nouveaux politiciens sur la scène. Non ! c’est une nouvelle version politique parce que ce qui a cours aujourd’hui pour insulter la mémoire collective est tenu par un ancien des anciens. Donc, aujourd’hui, le langage politique est tenu par les gens de l’UDPM qui sont principalement responsables de la destruction de ce pays. »

 

Me Mountaga Tall

Face aux régimes politiques, avec trois présidents élus et trois chefs d’Etat non élus, le processus s’est poursuivi. Ainsi, les régimes politiques se sont succédé. Et c’est là que les hommes politiques ont, pour ainsi dire, échoué. Le fossé entre gouvernés et gouvernants dont la plupart se sont discrédités, et pire, ont discrédité l’action publique avec des actes innommables. Ces comportements des hommes politiques ont jeté un discrédit sur la classe politique. Mais, en vérité, il faut aller plus loin que le procès fait à la seule classe politique et interroger la gouvernance elle-même. Parce qu’au Mali, depuis 1968, tous les gouvernements ont été composés de la classe politique, des civils et des militaires, des femmes et d’hommes, des jeunes et des aînés. Donc, la responsabilité est largement partagée… »

Extraits rassemblés par Seydou FANE

Source: Les Échos- Mali

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