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Répressions sanglantes, arrestations : Faire peur pour faire taire

Le calme avant la tempête. La tension persiste aux lendemains des folles journées de vendredi et samedi émaillées de violences, de répressions sanglantes et d’arrestations de plusieurs leaders du M5 RFP, finalement relâchés.

 

Voitures incendiées, édifices publics saccagés ou brûlés, heurts violents opposant forces de l’ordre et manifestants soldés par des pertes en vies humaines (une dizaine de morts), barricades dressées sur des artères et pneus enflammés, Bamako avait vendredi et samedi les allures d’un no man’s land. Un calme précaire prévaut après ces folles journées, mais la tension persiste. Plusieurs commerces sont restés fermés lundi  par mesure de précaution, la circulation routière est fluide. Mais les risques d’un embrassement ne sont pas écartés. Tant l’abrogation du décret de nomination des membres de la Cour constitutionnelle est assimilée à de l’inflation verbale. A la réserve qu’elle est partiale à force d’être partielle. Ainsi, le président de la République  Ibrahim Boubacar Keïta assomme la désignation d’un Premier ministre de pleins pouvoirs issu des rangs d’une coalition politico-religieuse  sous la bannière du Mouvement du 5 juin Rassemblement des forces patriotiques (M5 RFP).Tout porte à croire qu’aux jeux des contestataires, il assimile ce choix à un champ de mines. Dès lors, sa tentative de décrispation s’enfonçait dans les sables mouvants.

Dans sa seconde adresse au peuple, IBK s’est fendu de langue de bois en considérant les manifestations comme une expression de la vitalité de la démocratie. Un jeu de mots qui fait abstraction de l’insatisfaction générale, un paradigme à l’antipode de la légitimité du combat enclenché.  Continuer dans cette voie comporterait des risques trop élevés. D’où l’idée de lâcher du lest en sortant du fétichisme constitutionnel qui a conduit à l’abrogation du décret de nomination des membres de la Cour constitutionnel accusée de tripatouiller les résultats des dernières législatives au profit du parti au pouvoir.

Le deuil des illusions

La pédagogie du président de la République n’est pas sans intérêt. Elle permet de ne pas être taxé d’arrogant, de passer sous les traits de leader travaillant à baisser la température. En fait, il cherche à gagner du temps, en misant sur l’essoufflement du mouvement de contestation. Les Maliens sont tellement occupés à courir derrière le pain quotidien qu’ils ne vont nullement s’éterniser dans des manifestations, au risque de nourrir de faim.

C’est vraiment oublier que les gens sont incapables de régler leurs loyers, des parents qui voient dissiper les rêves qu’ils avaient faits pour leurs enfants,  des centaines de jeunes qui gisent au fond des océans ou dans d’immense étendue de sable du désert ou encore ces braves paysans à la grise mine à qui on a amputé une partie des revenus substantiels avec la baisse du prix du coton-graine et gonflé les charges de production inhérentes à la hausse vertigineuse de l’engrais. D’ailleurs, ces derniers ne se sont pas trompés en lançant un mot d’ordre de boycott de cette culture de rente.

Autre vague montante qui fait chavirer tous les bateaux : la crise scolaire. Contenir cette vague montante revient à offrir de meilleures chances aux enfants des familles déshéritées, à bâtir un avenir plein d’espoir. Des centaines de milliers d’enfants sont menacés de passer une année par perte et profit. Comme tous les élèves courent le risque de redoubler, les frais de scolarité sont jetés par la fenêtre. Se dégage donc la nette  impression que  rien n’est fait dans le sens d’engager la jeunesse à remplir son cerveau d’espoir plutôt que ses veines de drogue. Bref, des crises à étages affectant des millions de personnes qui  brulent d’envie de mourir débout dans les rues en martyrs que de vivre coucher à la maison.

Le pays a empilé ces dernières années des dialogues (conférence nationale, dialogue national inclusif), mais plonge de jour en jour dans les tréfonds de l’abîme par la faute des pouvoirs publics. Népotisme, clientélisme, corruption ont pris de l’épaisseur.

Le M5 maintient la pression aux lendemains des arrestations opérées dans ses rangs. (Choguel Kokala Maïga, Clément Dembélé, Issa Kaou Djim, Me Mountaga Tall, tous  relâchés finalement). Le pire est à craindre dans les jours voire semaines à venir. La météo a quelque peu refroidi les ardeurs des manifestants. La pluie qui s’est abattue sur la capitale semble doucher la poursuite de la contestation lundi matin. Mais, une guérilla urbaine prend de plus en plus forme et pourrait donner du fil à retordre aux forces de l’ordre déployées massivement à Bamako.

Georges François Traoré

L’Informateur

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