Aujourd’huile monde est obnubilé, ébranlé et frappé par une crise sanitaire extraordinaire.Un fléau aux conséquences fâcheuses, aussi diverses que diversifiées qui impacte inéluctablement le droit du marché au grand dam desconsommateurs. Ainsi, nous observons malheureusement ce dernier temps, une hausse des prix de certaines denrées de première nécessités parmi lesquelles des produits pharmaceutiques les plus précieux dans le cadre de la prévention du Covid-19 les gels hydro alcooliques, les gants, les masques de protection et la chloroquine dont le prix a doublé voire triplé en fonction des pharmacies.
Le droit de la consommation qui par essence se veut protecteur de l’intérêt des consommateurs qui sont fondamentalement dans une situation de faiblesse, de vulnérabilité, dans leurs rapports avec les professionnels a prévu des règlesapplicables dans ces situations de crise. Ainsi, en République du Mali c’est la LOI N°2015-036/ DU 16 JUILLET 2015 Portant Protection du Consommateuren ses articles 38 et 64 qui régit ladite situation.
Selon, l’article 38 de cette loi : « Les prix des biens, produits et services sont libres sur toute l’étendue du territoire national, et sont déterminés par le seul jeu de la concurrence. Toutefois, dans les secteurs économiques et dans les localités où la concurrence par les prix est limitée pour quelque raison que ce soit, dans des situations de crise ou dans les cas de hausse excessive sur le marché, le gouvernement peut, par décret pris en Conseil des Ministres, réglementer, fixer ou limiter la concurrence sur les prix ».
En vertu de l’article 64 : « L’infraction visée à article 38 est punie d’une amende comprise entre 5.000 et 1.000.000 FCFA ».
- Ainsi, il en découle de l’article 38 susvisé qu’en principe, les prix des produits, des biens et services en République du Mali sont librement déterminés par le jeu de la concurrence. En fait, les relations économiques sont régies par le principe de la liberté dans la fixation du prix, ce principe est inspiré du Libéralisme économique: doctrine économique fondée sur la liberté laissée aux comportements individuels : liberté d’entreprise, liberté des échanges, liberté de choix dans les dépenses comme l’épargne et l’investissement. Par conséquent, le professionnel est libre de fixer le prix de vente de son produit au consommateur.Dans cette optique, l’activité du pharmacien une profession libérale de surcroit commerciale (voir l’Acte uniforme sur le droit commercial général et des sociétés commerciales OHADA)est libre dans la fixation du prix de ses produits.
- Il est judicieux de mettre le curseur ou le projecteur sur le fait que le secteur pharmaceutique du Mali a trois types d’acteurs essentiellement : le privé, le public et le communautaire (privé non lucratif), quant au secteur confessionnel, il reste assez rare.
Le secteur public et le secteur communautaire assurent la mission de service public de santé et à ce niveau, les prix des produits pharmaceutiques sont déterminés par décret présidentiel(Décret N° 03218 / P-RM du 30 mai 2003), tandis que dans le secteur privé la règle de la liberté des prix reste en vigueur (Loi n°2016-006/ du 24 Février 2016 et son Décret n°2018-0332/P-RM DU 04 Avril 2018). Ce qui se traduit par une diversité de prix d’une officine à une autre ou d’un grossiste à un autre pour un même produit.
- Le principe de la liberté de fixer le prix comme tout autre principe en droit souffre de deux types d’exceptions liées à des causes structurelles ou conjoncturelles.Lapremière exceptionconcerne certains secteurs où les prix sont strictement prévus par l’Etat.
La seconde exception sur laquelle porte notre réflexion, vise des circonstances exceptionnelle, anormales ou de crise, où l’Etat peut intervenir afin de réglementer les prix au maximum(Prix maxima)autrement dit il fixe un prix strictpour un produit ou des produits déterminés.
En ce moment de crise sanitaire inédite(Covid-19), il nous sembleimpérieux que le gouvernementdu Mali intervienne par décret pris en conseil de ministre pour la règlementation des produits utiles ou indispensables à la prévention de ladite maladie afin de limiter justement les abus des pharmacies (professionnels), et faciliter l’accèsde ce produit pour un grand nombre des Maliens (consommateurs).
Cette action des autoritéssur la réglementation des prix reste un moyen, de maitrise de l’inflation, de protection de la majorité des consommateurs à faibles revenus dans une économie malienne qui semble être libérale et de contrôler la concurrence en période de crise. L’action de l’autorité administrative dans ce sens ne saurait aller dans le sens des attitudes interdites par le règlement n°02/2002/CM/UEMOA du 23 mai 2002 portant sur les pratiques anticoncurrentiellesnotamment les aides étatiques illicites.
Les associations des protections du droit des consommateurs peuvent aussi exercer une pression sur l’Etat par le truchement de la dénonciation, afin que ce dernier puisse prendre des mesures idoines pour estomper cette augmentation exponentielle des prix des produits susmentionnés pour le grand bonheur des consommateurs maliens.
Aliou Ousmane.
Juriste/ Formateur/ Collaborateur au Cabinet AT Diarra.
Mali24