C’est le mercredi 9 novembre 2022, que le Syndicat Autonome de la Magistrature (SAM) et le Syndicat Libre de la Magistrature (SYLIMA) ont adressé un courrier au Ministre du Travail de la Fonction publique et du Dialogue Social, Mme Diawara Aoua Paul Diallo, pour un mémorandum de préavis de grève. Les motifs….
Dans cette note, le SAM et le SYLIMA ont porté à la connaissance du ministre du Travail les motifs de leur mot d’ordre de grève à partir des dispositions de la loi N° 87-47 AN/RM du 10/08/1987 relative à l’exercice du droit de grève dans les services publics.
Ainsi, les deux principaux syndicats des magistrats du pays affirment avoir appris l’adoption en Conseil des ministres en sa séance du 2 novembre, le projet de loi portant modification de la loi 2016-046 du 23 septembre 2016 portant la loi organique fixant l’organisation, les règles de fonctionnement de la Cour Suprême et la procédure suivie devant elle et que ledit projet de la loi vise à modifier l’âge de départ à la retraite des membres de la Cour Suprême.
Toute chose, selon eux qui est en violation, d’une part, de l’article 82 de la Constitution du 25 février 1992 qui dispose que « le Conseil supérieur de la Magistrature veille sur la gestion de la carrière des magistrats et donne son avis sur toute question concernant l’indépendance de la magistrature ». De même que la loi N°02-054 portant statut de la magistrature, en ce qu’il ne ressort nulle part que l’avis du Conseil supérieur de la magistrature et celui de la Cour Constitutionnelle ont été requis, tous deux consacrés par les lois organiques.
Faire des magistrats de la Cour suprême des ‘’supra magistrats’’ !
Occasion pour SAM et SYLIMA de souligner que les magistrats formant le même corps doivent bénéficier des mêmes avantages et traitements résultant de leur statut. Ce, par principe d’équité et de justice.
Dans la même lancée, les deux syndicats des magistrats estiment que l’adoption dudit projet de loi signifierait et équivaudrait à donner aux membres de la Cour Suprême un statut particulier d’agents de l’Etat à vie et non des magistrats dès lors que le statut de la magistrature n’est pas modifié encore moins la Constitution ou la loi portant l’organisation judiciaire en République du Mali qui stipulent que « la justice est rendue par les cours et les tribunaux ».
Et considérant aussi que la Cour Suprême est donc une juridiction avant d’être une institution. En raison du fait qu’elle continue à rendre des décisions de justice conformément à la loi sur le statut de la magistrature, par des magistrats en activité, (bien que d’autres catégories de fonctionnaires y sont également nommées et évoluent conformément à leur statut). De ce fait, indiquent les syndicats des magistrats, au-delà de 65 ans, consacré par leur statut, les magistrats membres de la Cour Suprême, en continuant à y siéger, rendront des décisions administratives et non juridictionnelles. D’ailleurs qu’il est encore plus grave de conditionner le renouvellement du mandat des membres de la Cour Suprême à l’avis du conseil supérieur de la Magistrature. Même si cet avis doit être conforme, au mépris des dispositions légales et règlementaires.
Un projet de loi à caractère sélectif et discriminatoire !
Dans leur mémorandum SAM et SYLIMA rappellent que c’est au prix de laborieuses négociations syndicales que les âges de départ à la retraite ont été fixés à 65 ans. Et dont bénéficient les magistrats depuis 10 ans, uniformisant ainsi pour l’ensemble des fonctionnaires de la catégorie A des autres corps. C’est pourquoi, ils considérèrent que ledit projet de loi par son caractère sélectif et négativement discriminatoire constituerait un précèdent fâcheux et crée plus de problèmes et de discordes qu’il n’en résolve, en violant le principe d’égalité de citoyens devant les lois de la République.
Dans la même lancée, les syndicats des magistrats jugent aussi que la loi organique n’est pas la voie appropriée pour changer l’âge de départ à la retraite des membres du corps unifié des magistrats au mépris de leur statut. Surtout que, dénoncent-ils que les organisations syndicales des magistrats en l’occurrence SAM et SYLIMA, n’ont pas été associées, ni consultées dans le processus d’adoption dudit projet de loi incriminé. Alors que de coutume il en est autrement pour tous les projets intéressant le secteur de la Justice, particulièrement celui des magistrats.
Et que le dialogue social est un gage pour l’apaisement du climat social au Mali conformément aux pertinentes recommandations générales de la conférence sociale dans le domaine du travail en date du 22 octobre 2022.
En somme le SAM et le SYLIMA réclament l’abandon de tout processus d’adoption du projet de loi portant modification de la loi 2019-046 du 23 septembre 2016 portant loi organique fiant l’organisation, les règles de fonctionnement de la Cour suprême et la procédure suivie devant elle. Et aussi de réclamer la relecture de la loi N°02-054 portant statut de la magistrature et l’adoption des projets de décret portant plan de carrière des magistrats et celui fixant classement des juridictions. Sans quoi, le SAM et le SYLIMA annoncent un mouvement commun d’arrêt de travail dans toutes les juridictions de la République du Mali et ce, à compter du 29 novembre 2022 à 07h30 pour une durée de 5 jours ouvrables reconductibles en cas de besoin.
Une autre crise ouverte, et pas des moindres dans le Mali kura !
Adama Tounkara
Source: Le Sursaut