A moins de 24h de la fin de l’ultimatum de la Cédéao pressant les nouvelles autorités au Niger de remettre le président déposé dans son fauteuil, les supputations vont bon train entre “grins” dans les pays même membres de sous région et au delà, et plateaux de radio et de TV. Les chefs d’états majors réunis à Abuja et ayant peaufiné “leur plan d’attaque”, la Cedeao ira-t-elle à partir de ce dimanche déloger les ” impertinents militaires de Niamey?”
En tous les points d’analyse, il sera difficile pour l’organisation régionale de passer à l’action pour bien de raisons à mon avis.
Même si ses textes ne l’autorisent pas, on sait désormais que ces textes ne sont plus une référence quand on se souvient que le même Bazoum sur la cas malien avait déclaré devant son homologue Français qu’ils n’autorisent pas les sanctions qui ont pourtant été infligées au Mali et tout récemment au Niger. Sanctions jugées par Bamako et Niamey d’inhumaines, d’illégales, d’injustes et d’illégitimes.
Seulement une intervention militaire est différente de sanctions économiques pour lesquelles on appuie sur un bouton ou appose un cachet depuis une salle ou un bureau.
Là c’est physique, visible et le feu est direct. Il y a un déploiement de matériels et d’hommes. C’est un conflit nouveau. Et c’est entre un groupe d’états et un autre de la même région, la même organisation. Et ça entre dans le champ des Nations unies dont le Conseil de Sécurité est seul habité à régir ce genre d’actes. Le principe de subsidiarité ne résistera pas à l’intérêt multiforme que cette intervention va susciter au regard des mutations géostratégiques actuelles dans le monde, mues par un élan de multipolarisme de plusieurs états membres de L’ONU.
Les textes de la Cédéao et de l’ONU vont être mis sur la table.
Le communiqué conjoint du Mali et du Burkina Faso, la position de la Guinée dans une moindre mesure, sont venus donner une autre dimension au dossier. Du coup c’est un affrontement plus large qui se dessine entre la Cédéao et plusieurs de ses états membres.
Les positions tranchées de la Russie, membre du Conseil de Sécurité, de l’Algérie grand voisin du Niger sur toute intervention militaire au Niger auront leur poids. La Chine autre membre du Conseil de Sécurité veille. Ce n’est pas pour rien que le nouveau régime dit ne pas accepter que le Niger devienne une nouvelle Libye. C’est un rappel de l’action de L’OTAN qui a fini par embraser toute la région. La même OTAN soupçonnée d’être derrière la Cédéao et le régime déchu. Et la Russie ne se laissera pas ‘infantiliser” comme ce fut le cas en Libye.
La détention du président déchu et de sa famille entre les mains du nouveau régime complexifie toute intervention.
L’adhésion populaire à l’action du nouveau régime à également son poids dans l’analyse de toute raison objective pour une intervention militaire
Le mauvais casting de la Cédéao dans le choix à la fois de la présidence de sa conférence des chefs d’Etat. Même étant président de l’Etat le plus puissant cela n’enlève en rien que le nouveau président Nigerian est un “bleu” et les deux encadreurs mis à ses côtés, à savoir le Béninois Talon et le Bissau guinéen Emballo ne font pas le poids. Le président Tinubu a été désigné par défaut à Bissau. Du coup son inexpérience va être instrumentalisée. A ne pas oublier qu’il a accordé sa première visite à l’étranger en France même si c’était pour une conférence internationale. Et la mise en avant du Béninois à l’éclosion du coup à Niamey à été un flop car il a été vite récusé par les nouvelles autorités nigériennes
La fermeté du nouveau régime n’arrange rien aux pressions de la Cédéao qui a vu son équipe de médiation éconduite depuis l’aéroport de Niamey. Pendant ce temps elle déroule son plan d’action entre nominations aux postes stratégiques civils et militaires, limogeages d’ambassadeurs et Dénonciation d’accords bilatéraux.
La CÉDÉAO est entre le marteau et l’enclume. Elle joue sa crédibilité entre deux feux. Elle doit afficher sa fermeté face aux coups d’état répétitifs et démontrer qu’elle n’est pas l’instrument lige d’organisations ou de puissances extra régionales sinon extra africaines. La conformité de ses éléments de langages diplomatiques avec ceux de certaines puissances comme la France a entaché chaque jour cette crédibilité.
Si l’intervention militaire n’est pas faite, elle devrait se réfugier dans le maintien de sa batterie de sanctions déjà impopulaires au delà du Niger. Et cela continuera de l’enfoncer dans les ténèbres de la conscience populaire des ses états membres.
Cette organisation ne s’est jamais donnée le temps de s’attarder sur les causes des changements de régimes, et elle risquera de faire le pompier au prochain incendie. Il pourrait arriver même dans un pays membre insoupçonné. Et la décente aux enfers continuera si elle ne se réveille pas.
Bamako le 05 août 2023
Alassane Souleymane
Journaliste
L’Enquêteur