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Mali : difficile survie des veuves

Déshéritées, souvent chassées du domicile conjugal pour celles qui refusent le lévirat, la vie de veuve est loin d’être un fleuve tranquille au Mali.

 

Neuf mois après le décès de son mari, Fatou (le prénom a été modifié) et ses trois enfants ont été sommés de quitter la maison de son défunt époux. Karim, le frère cadet de son regretté mari avait proposé de la remarier comme seconde épouse pour que la « fortune reste dans la famille ». Elle a décliné cette offre, “par respect” dit-elle pour son mari. Depuis cet épisode, Karim a réussi monté la famille contre Fatou.

Malgré la médiation des notables du quartier, elle a dû abandonner le domicile de son défunt conjoint. Ses parents l’ont dissuadée de porter l’affaire devant la justice. Fatou vit désormais dans la famille paternelle avec ses enfants. Avec son maigre salaire de secrétaire de direction, la dame arrive à subvenir aux besoins de ses enfants. Ses frères prennent en charge la scolarité de ces derniers.

Délitement des valeurs sociales

Beaucoup de veuves n’ont pas cette chance. Certaines issues de familles démunies tirent le diable par la queue pour subvenir aux besoins fondamentaux de leurs enfants. D’autres se tournent soit vers le petit commerce ou la mendicité. Dans le pire des scénarios, il y en a qui se débrouillent comme elles peuvent, souvent au détriment de leur dignité pour survivre. L’urbanisation et les mutations sociales en cours ont beaucoup impacté notre société. On observe un délitement de certaines de nos valeurs sociales à savoir : l’hospitalité et la solidarité.

Aussi, le remariage de veuves avec des enfants à un âge avancé devient de plus en plus rare dans les centres urbains. À défaut d’une politique sociale prenant en compte la situation des veuves, nombre d’entre elles vivent cette période avec difficulté. Awa a perdu son mari il y a 30 ans. « Il avait 25 ans, sans moyens. J’ai eu deux garçons avec lui avant son décès par accident de la route », se remémore-t-elle avec beaucoup de peine.

« Au début c’était difficile. Il y a eu des jours où on n’avait rien à manger. Je ne trouvais même pas du travail, se souvient cette cinquantenaire. Mais je gardais espoir et aussi ma dignité. J’étais belle et attirais beaucoup d’hommes qui voulaient juste s’amuser avec moi puisqu’aucun d’entre eux ne voulait avoir à sa charge une jeune maman avec deux gosses. »

Renoncer au mariage

« J’ai exercé mille-et-un métiers avant de me reconvertir dans la vente de sable et gravier. À l’époque, ce milieu était largement dominé par les hommes », poursuit Awa. La jeune veuve d’alors s’est mariée plusieurs fois. Mais elle rompait quelques mois après. Beaucoup ne supportaient pas ses enfants. Finalement, elle a renoncé au mariage pour s’occuper de ses enfants.

Après des brillantes études, ses enfants sont devenus de grands entrepreneurs. Sa fille est la patronne d’une grande entreprise de la place. « Je me suis sacrifiée pour qu’elle parte à l’école. Je ne souhaite à aucune femme de vivre ce que j’ai vécu. Si j’avais eu la chance d’aller loin dans les études, j’aurais pu éviter ma situation », déclare la vieille femme.

Fatou fonde le même espoir sur ses enfants. Le plus âgé est en classe de 6e année. Les cadets respectivement en 5e et 4e année. Ils sont plutôt brillants élèves. La promotion de la scolarisation des filles et la formation professionnelle des femmes est un moyen efficace pour prévenir la précarité chez les femmes et leur permettre d’être autonomes et épanouies dans leur vie.

Source : Benbere

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