«L’honneur ne s’hérite pas, il ne se vend, ni s’achète» ! Telle est la conviction de Mme Zineb El Rhazoui (Zineb de son nom de plume), une écrivaine, journaliste et militante des droits de l’homme franco-marocaine. Elle réagissait ainsi à la décision de Valérie Pécresse (présidente de la région Île de France) de lui retirer le «Prix Simone Veil» à cause de ses prises de position dénonçant les agissements d’Israël à Gaza.
Cette distinction lui avait été décernée en 2019 pour «son combat contre l’islamisme». Elle avait été alors qualifiée de «femme francilienne particulièrement méritante, qui incarne l’héritage de Simone Veil». «Je vous rends votre prix Simone Veil car il est désormais entaché de sang», a-t-elle mentionnée dans une longue lettre argumentée et adressée à Valérie Pécresse le 11 décembre 2023.
Mais, revenons à nos moutons. Ce qui nous intéresse ici, c’est le prix qu’elle accorde à son honneur. Cela nous renvoie au contexte actuel avec l’effritement ces derniers temps de l’honneur et de la dignité comme valeurs, comme références morales. Ce déclin semble avoir été accéléré par l’avènement de la démocratie. Cet effritement explique en partie l’ampleur que ne cessent de prendre des pratiques comme la corruption et la délinquance financière malgré un arsenal de prévention et de répression…
«Au faite ce qui m’étonne au Mali, c’est que malgré tous ces services de contrôle et de répression (Bureau du vérificateur, Oclei, pôle économique…), les cadres n’ont pas peur et continuent de voler la nation. La question que je me pose est soit ces services sont faibles soit c’est la justice qui est faible» ! C’est ainsi qu’a réagi un ami à la série d’articles que nous avons publié dans notre précédent numéro (Le Matin N°592 du mercredi 13 décembre 2023) sur les mauvaises pratiques au ministère de l’Education nationale.
Certes que la justice malienne n’a jamais réussi à se hisser à hauteur de souhait dans la lutte contre la délinquance financière et surtout la corruption, un fléau qui la gangrène. Mais si le Malien avait encore le sens de l’honneur et de la dignité, nous pensons que ces mauvaises pratiques seraient restées dans des proportions moins inquiétantes. Ne serait-ce que pour la crainte de l’humiliation de se voir arrêter et jeter en prison. Jadis, cela pouvait rejaillir sur toute une descendance à qui ont hésiterait à faire confiance.
Dans le temps, la responsabilité était perçue en termes de mérite et de confiance et non d’opportunités de se faire les poches ou de renflouer son compte en banque. On préférait mourir que de trahir cette confiance en puisant dans des fonds communs. Aujourd’hui, hélas, ceux qui détournent les derniers publics sont enviés, loués… idolâtrés par la société. Celle-ci considère ceux qui font preuve de vertus et d’intégrité morale comme des maudits, des agents et cadre sans ambition.
Quand à cela s’ajoute la passivité de la justice, il est alors aisé de comprendre que la corruption et la délinquance financière ont encore de beaux jours devant elles au Mali. Peut-être qu’il faut changer la législation et prévoir le jury populaire pour ceux qui sont convaincus de ces pratiques. Par exemple si tu détournes les fonds destinés à la réalisation d’un pont ou d’un centre de santé, que ton sort soit confié au jury constitué des forces vives de la localité devant bénéficier de ces infrastructures. Peut-être que le salut viendra de là !
Moussa Bolly