Au carnet d’audience, vendredi après midi dernier, le président de la République, Son Excellence Monsieur Ibrahim Boubacar Keïta, a reçu le Barreau malien conduit par le bâtonnier de l’Ordre des avocats, Me Seydou Coulibaly, accompagné de tous les membres du Conseil de l’Ordre.
Face au président de la République, président du Conseil Supérieur de la Magistrature, Me Seydou Coulibaly a réitéré la disponibilité et l’engagement des auxiliaires de justice que sont les avocats à être aux côtés du premier magistrat du pays dans sa quête pour la restauration de l’État de droit, la lutte contre l’impunité et l’administration d’une justice meilleure et équitable pour tous.
« Nous sommes avec vous pour ce qui concerne vos engagements en faveur de la justice, notamment la lutte contre la corruption. Vous avez toute la latitude pour éradiquer cette gangrène et les avocats tiendront toute leur place », a dit le Bâtonnier de l’Ordre des avocats.
Le Conseil de l’Ordre a ensuite fait part à leur hôte de certaines de leurs préoccupations relatives notamment à la carte judiciaire, à l’aide judiciaire et à la tenue, en septembre, du Campus international dont le Barreau souhaite voir se dérouler sous le parrainage et la présidence effective du chef de l’État.
Le printemps des entreprises maliennes
Grands patrons, moins touchés par la crise, ou petits patrons à l’activité encore fragile : tous attendent un retour à la stabilité et davantage de transparence dans les appels d’offres.
« Selon les données de l’Institut national de la statistique du Mali [Instat], le pays a amorcé une faible reprise économique en 2013, tirée essentiellement par le secteur industriel, la campagne agricole s’étant révélée décevante », explique Émilie Laffiteau, économiste à l’Observatoire économique et statistique d’Afrique subsaharienne (Afristat).
Cette relance s’est, en effet, principalement traduite dans l’agroalimentaire (+ 42% par rapport à 2012), l’industrie métallurgique (+ 14,8%) et le textile (+ 17,9%). Elle a également bénéficié au secteur tertiaire (+ 8,3%), grâce notamment à la bonne tenue des télécoms, où les deux opérateurs présents, Orange Mali et Malitel (filiale de Sotelma), continuent de développer leurs services mobiles et de gagner des abonnés.
Expansion
La plupart des grandes entreprises privées maliennes sont parvenues à tenir le cap malgré la crise. En particulier celles dont les activités sont diversifiées et qui se déploient à l’extérieur du pays. C’est le cas des sociétés de Ben&Co Holding, le groupe d’Alou Badara Coulibaly. Spécialisé dans l’achat, le transport, le stockage et la distribution des produits pétroliers, il est présent au Sénégal et en Côte d’Ivoire.
« Dans ce contexte fluctuant, on n’osait pas avancer nos pions », confie un patron bamakois.
Dans le secteur agroalimentaire, Achcar Mali Industries (AMI) poursuit son expansion au Niger et au Burkina. Avec des activités s’étendant de la farine à l’eau minérale, en passant par les aliments pour bétail, la confiserie et le transport, le groupe a pour principale filiale les Grands Moulins du Mali (GMM).
Dans l’hôtellerie, le groupe Azalaï, après avoir ouvert des établissements au Burkina, en Guinée-Bissau et au Bénin, poursuit son développement dans la sous-région. Il construit actuellement des hôtels à Niamey et Abidjan.
Besoins
En octobre, il a signé avec la Société nationale industrielle et minière (Snim) de Mauritanie la reprise de l’hôtel Marhaba de Nouakchott, qui devrait rouvrir pour la fin de l’année. L’établissement verra sa capacité doubler à plus de 120 chambres d’ici à la fin de 2015 (un investissement total de 9 millions d’euros). « La plupart des infrastructures routières qui nous sont indispensables sont déjà là, le gouvernement n’a plus qu’à les consolider, explique Ousmane Sidibé, PDG de Sogefert, société spécialisée dans les engrais. Ce dont nous avons besoin maintenant, ce sont des structures de stockage et de transformation. »
Selon lui, le secteur agricole (qui représente 40% du PIB du pays) bénéficiait déjà d’une grande attention sous la présidence d’Amadou Toumani Touré. « Le nouveau gouvernement doit mettre l’accent sur l’aval de la production, continue Ousmane Sidibé. C’est-à-dire sur l’industrialisation du secteur, pour permettre au Mali de proposer des produits transformés. »
La situation semble évoluer favorablement puisque l’entreprise ATC, sous-traitante des industries minières et spécialisée dans la construction d’usines, a embauché 20% de personnel supplémentaire. Côté infrastructures routières, la construction de l’axe Tombouctou-Niafunké (environ 200 km), dans le nord du pays, a repris, sous la houlette de Satom, filiale du français Vinci. Le chantier avait été suspendu après les événements de 2012.
Craintes
Cependant, la confiance ne s’est pas encore rétablie. Dans les différents secteurs, de nombreux petits patrons ont été obligés de réduire leurs effectifs pendant les deux années de crise, même si le taux de chômage reste stable à 10,8%, mi-2013. Surtout, huit mois après l’investiture d’Ibrahim Boubacar Keïta, les chefs d’entreprise attendent de voir si le gouvernement passera ses marchés avec la transparence promise.
Le remaniement ministériel qui a eu lieu le 5 avril pourrait aider à clarifier les choses. « Ces derniers mois, personne n’osait avancer ses pions, de peur de voir changer ses interlocuteurs au sein du gouvernement, confirme un patron bamakois. La nomination de Moussa Mara, réputé intègre et patriote, devrait modifier la donne. »
La crainte de voir des marchés attribués dans des conditions douteuses continue de réfréner les ardeurs. « La situation ne me permet pas de m’engager dans des contrats lancés par l’État, parce qu’il n’y a pas encore de stabilité politique », estime Habib Dacko, patron de Dana BTP et d’une entreprise de transports.
BTP
Le développement de ce secteur prometteur dépendra de la réhabilitation des infrastructures routières sinistrées. Pour l’heure, Habib Dacko préfère travailler avec les ONG ou se charger du transport du matériel militaire de Serval depuis Abidjan jusqu’à Gao, où stationne le plus gros des forces françaises.
La présence de Serval, de la Minusma et de la mission de formation de l’Union européenne au Mali (EUTM) a dopé l’économie, mais a aussi contribué à la hausse des prix, notamment dans les secteurs de l’immobilier et de l’agroalimentaire. En un an, ils ont grimpé de 0,7%. Toutefois, l’essentiel des besoins alimentaires de la Minusma, gérés par le groupe américain Supreme, sont importés, les produits maliens ne correspondant pas aux normes exigées.
Embauches
Dans ce secteur comme dans d’autres, les appels d’offres passés par la Minusma laissent certains opérateurs privés sur leur faim. « Je n’y réponds même plus », soupire un industriel malien. D’autant qu’une grande partie de ces marchés sont passés de gré à gré. Comme les cinq contrats que le secrétariat général de l’ONU a attribué à des entreprises françaises, le 12 mars, portant sur la construction d’infrastructures au profit de la Minusma dans le nord du Mali, pour un montant total de 34,7 millions d’euros.
Ces sommes, injectées par les partenaires internationaux, devraient cependant susciter des embauches dans les sociétés sous-traitantes. Même si beaucoup sont encore confrontées à un problème de ressources humaines. « Je recrute à l’extérieur », regrette Ousmane Sidibé. Même écho dans les mines, l’hôtellerie et le BTP, où les entreprises souffrent encore d’une pénurie de compétences techniques et d’encadrement.
Heureux comme Ismaël