L’ancien président du Mali, Ibrahim Boubacar Keita (IBK), est décédé le dimanche 16 janvier 2022 à l’âge de 76 ans. Passé d’un plébiscite historique à l’élection présidentielle de 2013 (73% des urnes) à l’insurrection populaire de 2020 débouchant sur sa chute, IBK est passé par tous les contextes dans sa vie présidentielle. C’est un homme d’un parcours exceptionnel sur le plan politique et un président aussi controversé qui s’en est allé définitivement.
Né à Koutiala, Ibrahim Boubacar Keïta, cet homme politique au parcours exceptionnel de l’élite malienne est passé par plusieurs chemins. Aimé, critiqué et parfois même détesté, l’homme a connu un peu de tout. D’abord Premier ministre sous Alpha Oumar Konaré, président de l’Assemblée nationale sous Amadou Toumani Touré, puis président de la République de 2013 jusqu’au 18 août 2020, date à laquelle il a été renversé par les militaires, Ibrahim Boubacar Keïta, finalement qualifié Boua et par ses détracteurs, aussi bien que les partisans, fut le seul président le plus plébiscité dans l’histoire démocratique du Mali et qui a été finalement chassé du pouvoir.
Arrivé sur la scène politique alors que le pays traversait une crise sociopolitique sous le régime militaire dirigé par le général Moussa Traoré, IBK devient alors l’un des plus proches collaborateurs d’Alpha Oumar Konaré, le premier président démocratique du pays. Il sera son directeur adjoint de campagne, son ministre des Affaires étrangères et enfin son Premier ministre de 1994 à 2000.
Ibrahim Boubacar Keïta va également marquer cette époque avec son caractère apparemment assidu. Durant six ans, en qualité de Premier ministre, il imprime sa marque à travers des répressions et des arrestations dans les rangs des opposants, notamment en 1997. Sa réputation d’homme à poigne se forge à ce moment. Des caractères qui sont restés gravés dans la mémoire des Maliens jusqu’en juin 2013, date à laquelle il a accédé à la magistrature suprême alors que le Mali vivait toujours une crise qu’il n’avait jamais connue dans son histoire.
Puis… la déception !
Élu avec 73,53 % en 2013, Ibrahim Boubacar Keïta avait la lourde responsabilité de restaurer la paix à travers le pays, en recouvrant l’intégrité du territoire nationale, dont les 2/3 étaient sous occupation des groupes armés terroristes ; restaurant l’autorité de l’Etat et tout en redressant la démocratie.
Sauf que les choses se sont déroulées autrement. Non seulement la crise persiste au nord du Mali, mais aussi elle se propagera au centre du pays. Des tueries de masses, des vols et saccages sont devenus le quotidien des populations civiles, ainsi que des Forces de défense et de sécurité. À cela, s’ajoutent des scandales de corruption, notamment dans l’armée, précipitant ainsi l’effondrement de l’État.
Une crise sociale s’éclate !
Dépassé par la situation, Ibrahim Boubacar Keïta va se faire relire à l’issue d’une élection présidentielle contestable et contestée en 2018. Au lieu d’apaiser, IBK et son entourage n’ont fait que s’enfoncer dans la crise. Le “Kankeletigui” n’a donc rien pu faire pour éviter une crise sociale qui avait finalement vu le jour, à travers des séries de grèves et de contestations. Il lui est alors reproché d’avoir échoué à remédier aux problèmes économiques et à gérer la situation socio-sécuritaire pour lesquels il avait été élu. Ainsi, face à cette situation qui persistait, une insurrection populaire, appuyée par les militaires, le force à démissionner un certain 18 août 2020.
Seulement un an et demi après sa chute, Ibrahim Boubacar Keïta décède. Les Maliens retiendront de lui, d’une part, un homme de caractère avec un parcours politique hors-pair, mais d’autre part, un président de la République qui a contribué à alimenter la crise de confiance entre le peuple et l’élite, surtout avec les hommes politiques.
Amadou Kodio
Source : Ziré