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Focus : Le sens d’une présence !

L’image reste une des plus saisissantes du cinéma français : Annie Girardot en larmes, reçoit son dernier César en 1996 après de longues années de solitude, abandonnée de la profession. Il glace le public en affirmant :” je ne sais pas si j’ai manqué au cinéma français, mais à moi le cinéma français a manqué follement, éperdument, douloureusement….”.

Lundi 30 septembre 2019 à Paris, aux obsèques de Jacques Chirac, ATT, plongé dans le deuil d’un ami, était loin des grandes effusions mais à voir ses retrouvailles avec ses ex-pairs africains (Faure, Sassou, Obiang ou le Prince Albert de Monaco…), on devinait leur joie d’échanger à nouveau une chaleureuse poignée de mains avec un homme qui depuis le “coup d’Etat le plus stupide du monde” avait choisi de rester en retrait de toute vie publique.

ATT se serait sans doute bien contenté d’une lettre de condoléances à Bernadette et Claude Chirac à la hauteur de l’affection partagée avec le défunt. Mais la famille émit le souhait fort relayé par l’Élysée qu’il soit de l’assemblée recueillie des adieux au 5ème Président de la cinquième République française.

Les souvenirs et les symboles ont dû se télescoper dans la tête du 4ème Président de la République malienne.

Souvenirs de la visite officielle qu’il effectua en septembre 2002 à Paris, trois mois après son investiture, séjour mémorable de Jacques Chirac à Tombouctou et l’inoubliable mechoui tombouctien sur la Dune Rose, l’accueil exceptionnel au pays Dogon et la consécration symbolique du chef de l’Etat français en qualité de Hogon. ATT et Chirac ont aussi en commun les lieux et moments partagés au Sommet Afrique- France de 2005 à Bamako et l’exposition Dogon, la plus grande jamais réalisée au Musée du Quai Branly en 2011. De tous ces instants, une amitié est née qui a résisté aux années de Pouvoir. On aurait même voulu trouver vice à la relation, l’évidence s’imposerait à nous que ni l’ancien Président du Mali ni son pays n’ont jamais eu assez d’argent pour financer une campagne du fondateur du RPR! Le lien relevait de la Chimie des Sentiments.

Sous la même nef de l’église du Saint-Sulpice, ce lundi 30 septembre, ATT voisine à quelques rangées de Nicolas Sarkozy, le Président français qui, contre le bon sens militaire et géopolitique, a détruit la Libye, aidé à la formation de mouvements djihadisto-rebelles pour mettre le feu au Sahel. L’aggiornamento géostratégique projeté se révèle, pour ses successeurs Hollande et Macron, un sac de nœuds dont la France n’est pas sortie avant 20 ans. Une situation qui nous fait raisonner par l’absurde : Jacques Chirac serait resté président, la Libye continuerait d’être un Etat et non une juxtaposition de tribus antagonistes ; les pays du Sahel affronteraient un défi sécuritaire de bien basse intensité. De quoi donner raison à celui qui soutenait que dans la notion d’homme d’État, c’est le “prefixe” homme qui importait le plus. Nicolas Sarkozy fut un pyromane d’État !

La présence de ATT aux obsèques de Chirac a enfin donné lieu à un déferlement de nostalgie des Maliens sur les réseaux sociaux, sans doute touchés par l’honneur ainsi fait à un homme qui n’a rien demandé à personne ! Sans céder à la sociologie de Café du commerce, on peut penser que derrière les mots se niche le sentiment diffus d’un rêve de grandeur qui semble définitivement perdu pour nombre de nos compatriotes. Pour un vieux pays comme le nôtre, les symboles peuvent être plus importants que les choses et la reconnaissance mieux reçue que la récompense.

Nous avons le choix de regarder courageusement ce déficit de considération que notre pays affronte de manière récurrente à l’occasion des grands événements ou de nous réfugier dans la méthode Coué en comblant nos failles à coup de sophisme et d’auto-célébration chaque jour un peu plus ridicules.

Après sept ans de silence et d’effacement, ATT, à son corps défendant, a allumé une lueur d’orgueil et fierté dans notre quotidien de grisaille. Et il y a fort à parier qu’une fois de plus on se focalise plus sur le messager que sur le message !

     Sambou Diarra 

Source: L’Aube

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