Le lundi 3 février 2025, le ministre de l’Energie et de l’Eau et sa collègue en charge de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement durable se sont rendus à la Station de Kalabambougou, un site de la Société malienne de gestion de l’eau potable (Somagep). Ils étaient venus «s’imprégner de l’ampleur de la dégradation du fleuve – Niger, ndlr – due aux activités humaines, notamment l’orpaillage, qui constitue une menace croissante pour la qualité de l’eau brute et l’équilibre de l’écosystème».
En effet, sur place, les deux ministres ont constaté les phénomènes ci- après : «eau troublée et contaminée rendant son traitement plus difficile et coûteux pour les stations de pompage» ; «érosion des berges et dégradation de l’habitat naturel, mettant en péril la faune et la flore» ; et «menace sur les populations riveraines, exposées aux maladies hydriques et à une réduction de leurs ressources en eau».
Selon une note rédigée par un haut cadre d’une structure étatique, «l’utilisation incontrôlée de produits chimiques toxiques comme le mercure et le cyanure entraîne une altération significative de la qualité de l’eau, compromettant ainsi sa potabilité et menaçant la biodiversité aquatique ».
A des centaines de kilomètres de Kalabambougou, précisément à Kéniéba dans la région de Kayes, Yacouba Famanta, chef des prêcheurs, alerte dans une vidéo non datée sur la destruction du fleuve. Il pointe un doigt accusateur vers les Chinois et des dragues. Son témoignage est plus qu’émouvant. «Je désespère du Mali, parce que nos cris ne sont pas entendus par les autorités».
Ce qui se passe dans cette zone est une véritable tragédie environnementale et écologique. Une tragédie pourtant connue des autorités, comme en témoignent des actions entreprises par le ministère en charge de l’Environnement et celui des Mines. Sauf que ces efforts apparaissent comme une goutte d’eau face à l’ampleur de la tragédie et des complicités au sein de la haute administration. Car au moment où des services publics préparent à lui livrer une lutte sans merci, d’autres entités, en échange d’espèces sonnantes et trébuchantes, assument leur complicité avec les prédateurs.
Et pendant ce temps, les eaux du Niger et du Sénégal continuent d’être désespérément polluées, au grand dam des populations, faute de volonté politique au sommet de l’Etat malien. Les dragues défient le Général Assimi Goïta et son gouvernement. Un Etat sérieux accepterait-il de laisser détruire des cours d’eau aussi importants ? Pourquoi de tels actes se déroulent au Mali pendant que le Sénégal a pris des mesures draconiennes contre le fléau et de tels phénomènes sont ignorés en Guinée ?
Comparaison n’est certes pas raison. Souffrons cependant de celle-ci : récemment, pour vider Bamako de ses marchés à bétail, les princes du jour n’ont point lésiné sur les moyens. On peine donc à croire qu’ils soient incapables de protéger les eaux de nos fleuves en interdisant fermement les activités de dragage. Si le Général Goïta le décidait dès demain, les dragues disparaitraient illico presto des fleuves et des étrangers ne détruiraient plus nos cours d’eaux. Qui est fou ? Il est inimaginable qu’il soit impuissant face à cette horde de prédateurs qui détruit en toute impunité nos cours d’eau. Il se doit d’agir. Ici et maintenant ! C’est maintenant ou jamais !
Par Chiaka Doumbia