À la faveur du premier scandale, relatif à l’achat d’équipements miliaires, qui a éclaté à l’entame du premier mandat du président actuel et sous la pression des partenaires internationaux, il a été initié un décret qui était supposé fixer les limites de tout ce qui, en tu 11 août 2008.
Cet ancien document disait, en effet, en son article 8 : «Le présent Décret ne s’applique pas aux marchés de travaux, de fournitures et de services, lorsqu’ils concernent des besoins de défense et de sécurité nationales exigeant le secret ou pour lesquels la protection des intérêts essentiels de l’Etat est incompatible avec les mesures de publicité».
En vue de dissuader d’éventuels délinquants, voleurs et autres responsables, opérateurs économiques et commerçants malhonnêtes, il a été décidé de revoir les dispositions législatives en la matière. On a alors pris un nouveau décret qui n’a fait, malheureusement, que réécrire le précédent, en d’autres termes. Le Décret N°2014-0764/P-RM du 9 octobre était annoncé comme porteur d’éclaircissements et de clarifications au 08-485 du 11 août 2008.
Au départ, nous y avions cru. Ainsi, en son article 1er, il est stipulé que : «le présent Décret fixe le régime des contrats des travaux, fournitures et services exclus du champ d’application du Décret N°08-485/P-RM du 11 août 2008 portant procédures de passation, d’exécution et de règlement des marchés publics et des délégations de service public».
En son article 3, il définit le Secret Défense comme tel : «Au sens du présent Décret, on entend par «Secret en matière de défense» les renseignements, objets, documents, données informatisées, fichiers ou procédés qui doivent être tenus secrets dans l’intérêt de la défense nationale et dont la recherche, l’appropriation, le détournement, la reproduction, la divulgation ou la destruction constituent des infractions contre la sûreté de l’Etat».
À ce titre, sont considérés comme contrats de travaux, de fourniture et de services revêtus du sceau de «secret en matière de défense» ceux relatifs aux matériels et équipements cités à l’Annexe I, et aux travaux et services cités à l’Annexe 2.
Ces annexes relatives à des listes des biens concernés ne peuvent faire l’objet de révision qu’une fois par an sauf en cas d’urgence impérieuse. Les matériels, équipements et produits militaires sont donc consignés dans une liste exhaustive avec numéros de code dits Code SH. Il s’agit, à titre d’illustration, de rations de combat (Code SH 21 06 90 90 90) gilets pare-balles, coiffures de sécurité (casques militaires) radars (y compris les radars militaires) véhicules amphibies, chars et automobiles blindées de combat, armés ou non et leurs parties, avions, hélicoptères et véhicules aériens, parachutes, simulateurs de combat aérien, lunettes de visée pour armes, télémètres, armes de guerre, autres que les revolvers, pistolets et armes blanches, pistolets mitrailleurs. On peut aussi citer les bombes, grenades, torpilles, mines, missiles, cartouches et autres munitions et projectiles regroupés sous les Code SH 93 06 21 à 93 06 90.
En annexe 2 du Décret N°2014-0764 du 9 octobre 2014, on peut lire : études et travaux pour la construction de piste d’atterrissage à usage militaire, études et travaux pour la construction de soute à munition, études et travaux pour la construction de magasin d’armement, études et travaux pour la construction de soute à carburant pour le compte des forces de défense et de sécurité, études et travaux pour la construction d’usine ou de fabrique de munitions de guerre…
Il est aussi précisé que l’initiative de la révision appartient au ministre de la Défense ou au ministre de la Sécurité et que cette révision ne peut se faire que par Décret pris en conseil des ministres.
Dans ce même nouveau décret, il est stipulé qu’est soumis à l’avis préalable du Conseil Supérieur de la Défense tout contrat revêtu du sceau de «secret en matière de défense» dont le montant prévisionnel dépasse un (1) milliard francs CFA.
Pour ce qui concerne les nouvelles précisions au niveau de la conclusion et de l’approbation, il est écrit que les contrats visés aux articles 3 et 4 ci-dessus sont conclus et approuvés respectivement par le Directeur des Finances et du Matériel et le ministre concerné, si le montant est inférieur ou égal à un milliard de francs CFA (1 000 000 000) pour les marchés des travaux, huit cent millions de francs CFA (800 000 000) pour les fournitures et services courants, trois cent millions de francs CFA (300 000 000) pour les marchés intellectuels.
Les contrats sont conclus et approuvés par le ministre concerné et le ministre des Finances, si le montant est supérieur à un milliard de francs CFA (1 000 000 000) et inférieur ou égal à quatre milliards (4 000 000 000) pour les marchés de fournitures et services courants ; supérieur à trois cent millions de francs CFA (300 000 000) et inférieur ou égal à un milliard cinq cent millions de francs CFA (1 500 000 000) pour les marchés de prestations intellectuelles.
Au-delà de ces montants, tous les contrats de travaux, de fournitures et de services courants et de prestations intellectuelles passés sous le sceau de «secret en matière de défense» sont conclus par le ministre de la Défense ou celui de la Sécurité et approuvés par le ministre des Finances à la suite de l’avis du Conseil Supérieur de la Défense.
Ce nouveau Décret, à notre avis, au lieu de dissuader les voleurs, les encourage et les couvre. Pour terminer, il est important de signaler que c’est ce décret qui empêche toute poursuite dans l’affaire «hélicoptères cloués au sol» estampillés du sceau Secret-Défense. Circulez donc !
Aliou Ag Mohamed
Source : Nouvelle Libération
CHAPITRE I :
Dispositions générales
ARTICLE 1er :
Le présent décret fixe le régime des contrats des travaux, fournitures et services exclus du champ d’application du Décret n° 08-485/P-RM du 11 août 2008 portant procédures de passation, d’exécution et de règlement des marchés publics et des délégations de service public en son article 8.
ARTICLE 2 :
Les contrats passés sous le sceau de «secret en matière de défense» ou sous le sceau «des intérêts essentiels de l’Etat» ne sont pas soumis aux méthodes de sélection et aux contrôles des organes prévus par le code des marchés publics.
CHAPITRE II : DU CHAMP D’APPLICATION
ARTICLE 3 :
Au sens du présent décret, on entend par «secret en matière de défense» les renseignements, objets, documents, données informatisées, fichiers ou procédés qui doivent être tenus secrets dans l’intérêt de la défense nationale et dont la recherche, l’appropriation, le détournement, la reproduction, la divulgation ou la destruction constituent des infractions contre la sûreté de l’Etat.
À ce titre, sont considérés comme contrats de travaux, de fournitures et de services revêtus du sceau de «secret en matière de défense», ceux relatifs : – aux matériels et équipements cités à l’Annexe 1 ; – aux travaux et services cités à l’Annexe 2.
Ces annexes relatives à la liste des biens concernés ne peuvent faire l’objet de révision qu’une fois par an sauf en cas d’urgence impérieuse. L’initiative de la révision appartient au ministre chargé de la Défense ou au ministre chargé de la Sécurité. Cette révision se fait par décret pris en Conseil des Ministres.
Est soumis à l’avis préalable du Conseil Supérieur de la Défense tout contrat revêtu du sceau de «secret en matière de défense» dont le montant prévisionnel dépasse un (1) milliard de francs CFA.
Source : Nouvelle Libération