Les acteurs et usagers de la justice sont en conclave pendant 5 jours pour la validation de l’avant-projet de loi du code pénal et code de procédure pénale. Attendus pour corriger les lacunes et insuffisances de la justice, la mouture de ces deux textes apporte déjà de nombreuses innovations avec la suppression des cours d’assises, des mesures contre l’esclavage par ascendance et la rétention des notes en milieu scolaire, entre autres.
Le Secrétaire général du ministre de la Justice, Boubacar Sidiki DIARRAH a lancé ce lundi les travaux de cet atelier qui prendra fin vendredi prochain. C’était en présence de la Directrice de l’USAID-Mali, le président la commission permanente législative, Mohamed Maouloud NAJIM ; du directeur de Mali justice Projet, Jean Lavoix.
Prennent part à cet atelier le monde judiciaire, des experts, des chercheurs, des organisations de la défense des droits de l‘homme, des organisations de jeunes et de femmes, des anciens ministres de la justice ainsi que des personnes ressources.
Pendant 5 jours, les participants à cette rencontre auront pour mission de procéder à la revue finale des propositions formulées dans les avant-projets des deux textes et de formuler toutes autres suggestions pertinentes susceptibles de combler les vides juridiques éventuels. Mais aussi, d’’identifier les lacunes, les anachronismes, incohérences, contradictions et insuffisances relevés dans le Code pénal et le Code de procédure pénale en vigueur pour les corriger et les combler.
S’exprimant lors de cette cérémonie, Mohamed Maouloud NAJIM a soutenu que la lutte contre l’impunité sous toutes ses formes commande d’adapter les outils aux réalités. Dès lors, poursuit-il, le code pénal et le code de procédure pénale ne peuvent demeurer en reste de ce processus.
Parce qu’il se trouve, a affirmé M. NAJIM, que chacun de ces textes est vieux de plus 20 ans. Donc, selon lui, ils ont besoin de toilettage pour les mettre en phase avec le contexte juridique communautaire et international, les actualiser au plan national, en extirper les lacunes, les anachronismes, les contradictions, les insuffisances.
« Sur bien de sujets, ces textes sont muets ou peu explicites. Ils ont subi de nombreuses modifications qu’il s’agira également de consolider à travers des textes unifiés. Toutes choses qui rencontrent l’adhésion des Autorités à travers le Programme de Travail gouvernemental », a indiqué le président de la commission permanente législative.
Puis, il a ajouté que cette grand-messe du donner et du recevoir devra répondre aux attentes et aspirations et permettre au pays de se mettre en harmonie avec nos us et coutumes, ses engagements vis-à-vis de la communauté internationale et son immersion effective dans le monde contemporain en matière de droit et de justice.
Pour la directrice de l’USAID, se réjouissant de la tenue de cet atelier, elle a affirmé que ces deux codes vont contribuer à augmenter davantage la transparence et de mieux la justice dans la protection des citoyens et la lutte contre le genre.
Toutefois, elle a alerté sur l’application de ces codes une fois adoptées. Parce que, pour elle, il ne sert à rien d‘avoir les meilleures lois si elles ne sont pas appliquées.
Quant au secrétaire général du ministère de la justice, après avoir rappelé la nécessité pour le Mali de revoir certains de ses textes dans le cadre de la refondation, il a focalisé son intervention sur les innovations qu’apportent ces deux avant projets de textes.
Les innovations dans
les deux textes
Ainsi, l’avant-projet de Code pénal comprend plus de 700 articles contre 328 dans le texte en vigueur prend en compte la responsabilité pénale des personnes morales, la mise en danger de la vie d’autrui, la rétention des notes en milieu scolaire et universitaire, les violences basées sur le genre (VBG, harcèlement sexuel), les pratiques de l’esclavage par ascendance, la question des mineurs face au terrorisme, la définition et la répression de la haute trahison, le délit d’apparence, le financement occulte des partis politique, entre autres.
En outre, il introduit la numérotation analytique qui permet aux acteurs de la justice de conserver des repères solides dans l’exploitation du futur texte, adopte le présent de l’indicatif comme mode d’expression des mesures, modifie et simplifie l’échelle des peines.
Aussi convient-il de préciser que le projet de code pénal agrège l’ensemble des textes pénaux pour éviter la quête difficile des instruments juridiques épars en vigueur.
S’agissant de celui de Code de procédure pénale, il innove également en prévoyant notamment : le relèvement des délais de prescription, le renforcement du rôle du Ministère public, la clarification des règles de garde à vue, une meilleure réglementation des conditions de plainte avec constitution de partie civile, l’adoption du référé-liberté pour combattre les détentions injustifiées, l’introduction formelle des techniques d’enquêtes spéciales, le double degré de juridiction en matière criminelle, la création de chambres criminelles permanentes au sein des Tribunaux de Grande Instance avec la suppression des Cours d’assises.
Il comprend près de 1400 articles contre 634 dans le texte en vigueur, tant le souci de ratisser large a été une préoccupation permanente.
Une des avancées majeures de cette réforme est l’incorporation aux textes en cours de lecture de l’ensemble des textes déjà modifiés ou nouvellement adoptés ( Pôle national Économique et Financier, Agence de Gestion des Avoirs Gelés, Saisis ou Confisqués, Loi portant Répression de la Cybercriminalité…), d’une part et l’internalisation d’un nombre important de dispositions résultant d’instruments juridiques communautaires, régionaux ou internationaux auxquels le Mali a souscrit (OHADA, UEMOA, Union Africaine, CICR, Conventions diverses du Système des Nations Unies), d’autre part.
Dans le contexte actuel caractérisé, entre autres, par des déviances et des activités illégales des groupes criminels et de leurs sponsors, il est indispensable que le code pénal et le code de procédure pénale soient adaptés et puissent appréhender et punir les infractions multiformes et multidimensionnelles à la loi pénale, particulièrement en matière de criminalité transnationale organisée avec l’indispensable recours à la coopération judiciaire internationale.
PAR SIKOU BAH
Source : Info-Matin