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Au président de la transition, le Colonel Assimi Goïta : Wari banna gèlèya bé bè kan

Après le paiement des salaires et des pensions, place aux dépenses: mil, riz, condiments, carburant, électricité eau, «wari banna» (l’argent est fini) et «gèlèya» (la résistance commence). Si tu parles, on te dit tais-toi ko tu es «politiki mogo». Quelle différence y a-t-il entre un «politiki mogo» et un militaire ? Le patriotisme et la droiture, c’est tout.

Il y a trois (03) ans, un groupe de jeunes officiers parachevaient la lutte enclenchée par la société civile et certains partis politiques hostiles au régime d’Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) en demandant son départ. Ce fut chose faite le 18 août 2020. Depuis ce jour, les jeunes officiers se sont accaparés de tous les pouvoirs comme un commandant dans un bateau. Or le pouvoir n’est rien d’autre que de faire proprement ce qui a été convenu par l’ensemble de la population. Et il n’y a pas deux (02) façons d’assumer le pouvoir. Si tu veux, sois plus méchant et plus brûlant que les flammes de l’enfer sur le dos de ton peuple; si tu veux sois plus doux et frais que l’eau du fleuve dans la gorge d’un assoiffé. Mais dans l’un ou l’autre cas, sois juste, dit le sage. Les Maliens sont sortis massivement sur le boulevard de l’Indépendance pour demander le départ du président IBK pour une seule raison: mauvaise gouvernance (un régime caractérisé par la corruption, les malversations et la délinquance financière), dont la plus scandaleuse fut l’achat de l’avion présidentiel, équipement militaire (1230 milliards de F CFA).

Les Maliens ont hâte de connaître la suite réservée à ces poursuites judiciaires mais au même moment des militaires incriminés dans ce dossier reçoivent des promotions. Les économistes estiment que la délinquance financière, la corruption demeurent les défis les plus redoutables pour l’élimination de la pauvreté.

Aujourd’hui, l’arrêt de la lutte contre la corruption et les malversations financières ont érodé la confiance entre gouvernants et gouvernés. Quand il y a eu le coup d’État du 19 novembre 1968 du Comité militaire de libération nationale (CMLN), il y avait 300 millions de francs maliens dans le coffre du Trésor public. Les militaires se sont partagé les fonds comme leur butin. Et depuis ce temps, voler ou détourner le bien public ne fait plus peur au Mali. Connaissez-vous la kleptocratie ? C’est un régime dont le système de gouvernance est basé sur le vol, le détournement des fonds publics. Quand il y a eu le coup d’État du 18 août 2020 des malles remplies d’argent seraient sorties du pays. Les anciens dignitaires du régime IBK en fuite ont mis leur magot à la disposition de certains opérateurs économiques. Tout ça, c’est connu. Le premier de nos devoirs de Maliens, c’est d’obéir aux lois de notre pays. Sans obéissance, il n’y aura que du désordre et notre tranquillité sera sans cesse menacée. Les Maliens ont la réputation de ne pas se soumettre à la loi.

Qui fait la loi ? Les différents gouvernements

Chacun de ses services exige des règlements, une force qui les impose à tous et qui punisse ceux qui les violent. À ces trois (03) nécessités correspondent trois pouvoirs: faire la loi (pouvoir législatif); l’imposer (pouvoir exécutif); juger les fautes (pouvoir judiciaire. Qui possédera ce pouvoir ? Tel est le problème qui s’est posé à tous les peuples et que chacun a résolu à sa manière. Il y a trois (03) solutions possibles:

  1. Les pouvoirs appartiennent à un seul homme. Cet homme aura pris la première place (dictateur). Pour le monarque ou souverain absolu, la loi sera «ce qui lui plait»; il le fera exécuter par ses serviteurs; il pourra punir ou gracier à son gré. «L’État, c’est moi», disait Louis XIV.
  2. Les plus forts, les plus riches se partagent le pouvoir: ce sera un gouvernement aristocratique.
  3. Tous les Hommes de la Nation, pensant qu’ils sont égaux, voudront prendre part au gouvernement: ce sera une démocratie.

Il est deux (02) façons de devenir riche. La première c’est de recevoir l’argent, la seconde de le gagner. L’argent reçu ne peut se prévaloir de légitimité méritocratique. Un calcul grossier montre qu’au cours des années récentes, plus de 50 p-100 du patrimoine détenu par les ménages vient des fonds détournés par des fonctionnaires véreux. Une raison qui explique l’enrichissement illicite des uns et l’appauvrissement des autres. Dans un tel contexte, l’épreuve de vérité s’annonce rude pour une transition qui, sous couvert de justice s’évertue surtout de maintenir la paix avec les syndicats. De ce point de vue, le changement attendu n’a porté que sur des réformettes, et non le système de gouvernance. C’est cette opération vérité que nous attendons et elle risque de ne plaire à personne.

Il ne sert à rien de changer les hommes par les hommes issus d’un même système pour s’accaparer du pouvoir obtenu grâce à un soulèvement populaire ? Mais peut-on continuer à diriger le pays par un clan, parents et amis, et frères d’armes ? Non, le Mali n’est pas une aristocratie et ne sera plus dirigé un président et son clan ou un président et sa famille d’abord.

Nous dénonçons, la perte du pouvoir d’achat, le chômage, la paupérisation, la naissance et la montée d’une classe de bourgeois issus de la bureaucratie. Cela les cinq colonels le savent et ne peuvent l’ignorer, ils doivent en tenir compte.

Aujourd’hui, les panafricanistes se glorifient avec le nom du président Modibo Keïta pour deux (02) raisons:

– La première, c’était sa lucidité et l’honnêteté dont lui et son équipe dirigeante ont fait preuve dans la recherche des moyens susceptibles de redresser la situation économique et financière du pays.

– La seconde, Modibo Keïta ne voulait pas d’un système de développement qui laisserait une catégorie de citoyens organiser l’exploitation des autres.

Il me semble que nous évoluons vers une catastrophe plus sanglante qu’en 1991. Les armes circulent et sont utilisées au détriment de la paix civile en toute impunité par certaines milices. Les prochaines élections pourraient être le déclencheur d’une bombe en attente d’un détonateur pour exploser. Nous ne sommes pas à l’abri d’une vengeance décentralisée pour des raisons de décisions de justice mal rendues.

Amy SANOGO

Inter De Bamako

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