Une vraie première en Afrique, francophone surtout : six magistrats écroués au Mali pour concussion. Encore une concrétisation des promesses faites par le nouveau président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK). Le nouveau Chef de l’Etat malien, ne semble donc pas avoir fini de surprendre.
En ce début de mandat si difficile, IBK n’hésite donc pas à s’attaquer aux choses essentielles. Ses mesures doivent-elles vraiment étonner ? Cela procède, nous semble-t-il, de la personnalité de l’homme qui incarne le Mali nouveau. Il tient à réunifier l’armée autant qu’à assainir la justice, une structure parmi les plus corrompues en Afrique. Bâtir du solide suppose d’abord que l’on dispose d’institutions solides. Or, la réalité est tout autre sur le continent.
Les magistrats corrompus, ou à la solde du pouvoir, devraient avoir honte de porter la toge
IBK a donc choisi de renouer avec la rigueur et le manque de complexe que ses compatriotes lui connaissent depuis de nombreuses années. Chef suprême des forces armées, il a entrepris depuis quelques jours, d’envoyer derrière les barreaux de hauts gradés de l’armée malienne dont le célèbre ex-chef de la junte de 2012, le général Amadou Haya Sanogo himself. Et tout récemment, il a récidivé en jetant en prison des magistrats, comme pour signifier qu’il saura toujours jouer sa partition en tant que chef suprême de la magistrature.
Homme aguerri, IBK joint l’acte à la parole, confirmant ainsi sa bonne réputation. Le chef de l’Etat malien a à cœur, de repositionner le Mali. Les problèmes sont pris par le bon bout. Le combat contre les avatars du système hérité du « soldat démocrate » Amadou Toumani Touré dit ATT, met à nu la situation dramatique dans laquelle végète le Mali. Il faut poursuivre dans cette direction. Non pas pour plaire aux bailleurs de fonds même si de façon légitime, ils ont eux aussi des raisons de pavoiser aujourd’hui. Jusqu’où pourrait aller IBK ? Le plus loin possible, il faut le souhaiter. Mais comment faire si demain, des proches se trouvent compromis ? Comme IBK l’a dit lui-même : « Personne n’est au-dessus de la loi. »
Toutefois, on le sait : en Afrique, le système a ses réalités. Dur est le terrain ! Des gens de bonne volonté se font parfois surprendre. D’autres tombent dans des pièges de façon vraiment inattendue, pour avoir manqué de vigilance. Homme de poigne, IBK saura-t-il trouver la bonne recette pour avancer dans la bonne direction ? Pour l’instant, les actes qu’il pose, confirment bien que cet homme est cohérent. Il promet et agit toujours en conséquence. C’est donc bien qu’il ait osé. L’on espère aussi qu’il osera toujours car les choses doivent évoluer au profit exclusif du peuple malien. Il faut saluer les mesures du camp IBK, car il s’agit de geste de salubrité publique. L’événement doit être salué à sa juste valeur. Il s’agit assurément d’un acte de courage politique qui grandit IBK.
En Afrique, la justice demeure le maillon faible de l’appareil d’Etat. On déplore le plus souvent qu’ils ne soient point indépendants du pouvoir en place. Réduits à leur simple expression, les magistrats sont aux ordres. Ils peinent à dire le droit. Une situation très décriée par l’opinion publique, et régulièrement dénoncée dans les médias. L’exemple d’IBK devrait donc inspirer de nombreux dirigeants de pays francophones d’Afrique, à commencer par ses voisins.
En effet, dans la sous-région, les populations souffrent trop de cette parodie de justice qui n’a que trop duré. Les magistrats corrompus, ou à la solde du pouvoir, devraient avoir honte de porter la toge.
Dans la sous-région, le Chef de l’Etat malien demeure celui qui aura osé véritablement exploiter dans le bons sens, le double avantage d’être à la fois chef suprême des forces armées et de la magistrature.
Ils ne méritent point de la république, puisqu’ils compromettent par leur partialité, la séparation des pouvoirs, et mettent en danger les libertés démocratiques. Incapables de dire le droit, ils trahissent chaque jour la cause de la veuve et de l’orphelin. Faisant ainsi fi de leur serment, ils consacrent l’impunité, autant qu’un parlement soumis. Que penser en effet de ces élus qui votent des lois scélérates, et baissent les yeux quand sonne l’heure de sanctionner les actes iniques des gouvernants dont le peuple n’attend généralement plus rien ?
Une bonne justice est fondamentalement le corollaire d’une justice sociale, laquelle est à la fois le préalable et la finalité d’une démocratie vraie. Pourtant, sous nos tropiques, et en plein Sahel, autant les greniers sont vides, autant les délinquants à col blanc continuent de s’empiffrer, au mépris de la majorité silencieuse. Il est temps qu’évolue le système judiciaire dans les pays francophones d’Afrique, et que soient revues sérieusement les conditions de vie et de travail de nos magistrats. L’Afrique du troisième millénaire ne doit pas s’accommoder d’une justice à la fois injuste envers ceux qui disent le droit et les justiciables ! Une justice qui refuse obstinément de dire le droit, et qui protège indéfiniment les délinquants à col blanc. Il faut arrêter de narguer les gens.
Hier Premier ministre avec des marges de manœuvre fort limitées, aujourd’hui président de la République, donc avec plus de moyens et de prérogatives, IBK doit continuer de nous surprendre agréablement. Après des années de léthargie ponctuées d’un affairisme qui a davantage profité à la classe politique et à l’oligarchie militaire, le pays attend du « Sauveur », qu’il insuffle un dynamisme nouveau à tous les niveaux. En effet, nombreux sont les défis à relever. Le défi sera sans doute de parvenir à dénicher des gens propres, dans un Mali qui cherche désespérément à tourner la page. Avec son culte de la rigueur et de la transparence, il parviendra néanmoins à trouver dedans et dehors, des compatriotes qui cultivent le sens des responsabilités. Mais, plus qu’avant, les Maliens devront s’exercer dorénavant à prendre les devants, et démissionner le cas échéant, avant que les choses ne les rattrapent.
IBK a amorcé un départ plein d’embûches avec la crise du Nord, les rivalités et le manque de cohésion au sein de l’armée et de la classe politique. Mais, l’espoir est permis. Car, dans la sous-région, le Chef de l’Etat malien demeure celui qui aura osé véritablement exploiter dans le bons sens, le double avantage d’être à la fois chef suprême des forces armées et de la magistrature. En cela, l’homme mérite d’être épaulé dans ses actions, le Mali ayant besoin de sérieux coups de balais, pour redonner confiance à la génération montante, et se bâtir un avenir prospère. De même, les peuples alentours, attendent probablement que ces exemples venus des bords du Djoliba, inspirent leurs dirigeants !
« Le Pays »