Mercredi 10 juillet 2019, la Conférence régionale africaine de haut niveau sur la lutte contre le terrorisme et la prévention de l’extrémisme violent propice au terrorisme a levé ses rideaux à Nairobi. Cette cérémonie s’est tenue à l’Office des Nations unies sise dans ladite ville. C’était en présence des chefs de gouvernement, des ministres de l’Intérieur et des Affaires étrangères de maints pays, ainsi que du secrétaire général des Nations unies.
Organisée conjointement par le gouvernement de la République du Kenya et le Bureau de lutte contre le terrorisme des Nations unies, cette conférence a été un cadre idéal pour le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, d’inciter à des réflexions plus poussées sur la situation sécuritaire en Afrique. Plusieurs recommandations ont été formulées.
Des attaques qui choquent le moral
À cette « conférence historique », M. Guterres n’a pas manqué de revenir sur l’atrocité des attaques qui surviennent dans plusieurs pays africains. Selon lui, ces attaques multiples « choquent par leur barbarie et leur indifférence pour la vie humaine. » À ce titre, il évoque le cas du Kenya, où 21 personnes ont été tuées dans une attaque terroriste dans le complexe hôtelier Dusit à Nairobi ainsi que dans le comité de Wajir dans laquelle huit policiers sont morts et d’autres blessés. « La menace terroriste en Afrique se répand et déstabilise des régions entières », déplore-t-il avant d’exprimer toutes ses inquiétudes : « Je suis très préoccupé par la situation au Sahel et par les risques croissants en Afrique de l’Ouest. »
Au Nigéria aussi bien qu’au Tchad, le secrétaire général des Nations unies indique que Boko Haram et « sa faction dissidente » créent la panique malgré la présence de la Force multinationale de coordination. Une situation qui n’est pas différente au Mali, où des groupes terroristes s’en prennent régulièrement aux forces de sécurité locales et internationales, indique-t-il pour ensuite préciser : « La violence s’est étendue aux pays voisins, avec un nombre alarmant d’attaques récentes au Burkina Faso et au Niger. »
Dans tous ces pays, explique le patron des Nations unies, les terroristes s’adonnent à la violence sexuelle. Pire, les enfants rejoignent leur rang. Cela, malgré le courage et la résilience des peuples d’Afrique. « Que ce soit au sein de leurs familles et de leurs communautés pour empêcher la radicalisation et le recrutement, ou pour servir dans l’AMISOM, la MINUSMA, la Force commune du G5 pour le Sahel, la Force opérationnelle multinationale commune contre Boko Haram et des missions similaires, la population africaine est en première ligne des efforts pour lutter contre le terrorisme et la propagation de l’extrémisme violent », précise le secrétaire général. Antonio Guterres ne fait aucun doute quant à la détermination des États africains à mener à bout ce combat contre le terrorisme : « La détermination des Africains à trouver des solutions au fléau du terrorisme est claire. »
Le patron des Nations unies reviendra également sur le rôle que peuvent jouer les femmes dans cette lutte. D’après lui, « Partout sur le continent, les femmes prennent les choses en main et s’engagent avec les dirigeants locaux, les maires, les jeunes, les enfants et leurs semblables pour lutter contre l’exclusion, la marginalisation, les inégalités et les abus – conditions qui conduisent beaucoup à la radicalisation et aux conflits. » Ce qui l’amène à faire comprendre que la seule application des lois ne permet pas de réussir la lutte contre la radicalisation, le terrorisme et les conflits. « Nous ne devons pas laisser le terrorisme saper les grands progrès réalisés sur ce continent », invite-t-il avant de faire comprendre que « l’Afrique reste une priorité absolue pour les Nations unies. » Ce qui explique pourquoi elles travaillent en collaboration avec l’Union africaine ainsi que d’autres mécanismes de coordination régionaux et sous régionaux.
« Nous croyons au leadership africain pour développer des solutions africaines aux problèmes africains», laisse entendre que le secrétaire général des Nations unies.
Guterres recommande
- Guterres lance alors un appel urgent à la communauté internationale à venir en aide aux États de cette région en renforçant leurs capacités nationales et leur résilience face à ce fléau. Pour ce faire, il trouve urgent que les opérations de maintien de la paix et de lutte contre le terrorisme aient un « mandat fort et clair du Conseil de sécurité des Nations unies, assorti d’un soutien financier suffisant, prévisible et durable ». Le secrétaire général des Nations unies explique ensuite : « Pour que le terrorisme soit vaincu, il est essentiel que la lutte antiterroriste africaine soit globale, bien financée, fondée sur le respect des droits de l’homme et plus important encore, soutenue par une volonté politique forte ».
- Guterres incite à développer et renforcer de nouveaux types de partenariats entre États africains, voire entre l’Afrique et la communauté internationale, dans la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent. « La nature transnationale du terrorisme et de l’extrémisme violent souligne l’importance vitale de la coopération multilatérale pour détecter, identifier et désamorcer l’extrémisme violent et traduire les terroristes en justice », précise-t-il avant d’indiquer : « Rien ne peut justifier le terrorisme et l’extrémisme violent, mais nous devons également reconnaître qu’ils ne surviennent pas dans le vide.»
Sur ce point, il pointe du doigt, en se focalisant sur une étude du Programme des Nations unies pour le développement sur la menace de l’extrémisme violent en Afrique, le manque d’éducation ainsi que la pauvreté comme facteur alimentant la radicalisation. Outre cela, la violence d’État ainsi que l’abus de pouvoir sont aussi indexés. M. Guterres invite les États à privilégier la prévention qui doit inclure « la prévention des conflits, la réduction de la fragilité, le renforcement des institutions de l’État et de la société civile, la construction d’une paix durable et la promotion du développement durable afin de lutter contre la pauvreté, les inégalités et le manque de chances qui alimentent le désespoir. »
D’après lui, il importe, dans la lutte contre ce fléau qui paralyse les pays africains, de mettre l’accent sur des solutions locales aux défis du terrorisme et de l’extrémisme violent. Il demande également de veiller sur l’emploi des jeunes puisque le chômage peut menacer la cohésion sociale, voire la sécurité. « Avec la montée de la désinformation sur les médias sociaux et Internet, les jeunes ont également besoin d’éducation et de pouvoir pour dénoncer les récits manipulateurs, la xénophobie et les discours de haine, qui peuvent tous conduire à une radicalisation en ligne », précise-t-il avant d’exhorter à une prise en charge des victimes de violences sexuelles, les survivants du terrorisme ainsi que les enfants exploités par des groupes terroristes. Car, dit-il, « Les victimes sont des messagers extrêmement puissants et crédibles ».
Fousseni TOGOLA
Le Pays