Si l’agenda des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne (UE) était copieux lors du sommet des jeudi 23 et vendredi 24 mars, un sujet n’a pas cessé de revenir dans la bouche des participants, alors qu’il n’était pas censé être abordé officiellement : la Chine. « Elle était en toile de fond de presque toutes les discussions : l’Ukraine, l’industrie, l’énergie, le commerce », constate une source européenne. Même Antonio Guterres, le secrétaire général des Nations unies, a évoqué la deuxième puissance économique mondiale pour suggérer aux Européens de ne pas tenter de l’isoler.
Que ce sujet se soit imposé n’est pas vraiment une surprise, deux jours seulement après l’accueil en grande pompe de Xi Jinping par Vladimir Poutine à Moscou. Une rencontre au cours de laquelle il a été question de la « position pour un règlement politique de la crise ukrainienne » proposée par le président chinois. Et une semaine également après l’accord entre l’Iran et l’Arabie saoudite sur le rétablissement de leurs relations diplomatiques, dont la conclusion a été facilitée par Pékin.
Confrontés à l’activisme diplomatique de la Chine, les dirigeants européens avaient de quoi s’interroger. Pour le premier ministre letton, Arturs Krisjanis Karins, la rencontre entre MM. Xi et Poutine à Moscou devrait être « un moyen pour l’Europe d’ouvrir les yeux. Beaucoup pensaient que la Chine jouerait le rôle de médiateur [entre la Russie et l’Ukraine]. La Chine ne l’a pas fait, elle est ouvertement en faveur de la Russie. C’est un grand défi et une grande difficulté pour l’Europe ». Plusieurs autres chefs d’Etat partageaient ce dépit. « On a vu que la Chine a une influence sur la Russie, on aurait aimé qu’elle l’utilise pour évoquer la question du respect de l’intégrité territoriale » de l’Ukraine, estimait jeudi soir le premier ministre belge, Alexander De Croo, devant les journalistes.
Sommet Chine-UE
L’inscription dans la durée de la guerre en Ukraine, le rapprochement entre Washington et le Vieux Continent, qui s’est manifesté lors de la visite d’Ursula von der Leyen aux Etats-Unis le 10 mars, mais également cette proximité entre Pékin et Moscou, ou encore la course mondiale aux technologies vertes nécessitent que le sujet de la Chine soit remis sur la table, juge-t-on dans l’entourage de Charles Michel, le président du Conseil européen. « A un moment donné, il faudra que les dirigeants européens se penchent de nouveau sur le sujet de la Chine », confie un haut fonctionnaire européen.