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Vendredi 25 septembre 1936- mardi 15 septembre 2020 : Moussa Traoré a vécu

«Une religion bien comprise et honnêtement exercée, selon les principes mêmes de son prophète, est un baume pour le cœur et les maladies de l’âme. Elle peut transformer l’homme et le libérer de ses esclaves intérieurs, si puissants et si néfastes.» (Amadou Hampâté Bah).

 

Il est de coutume dans notre société que lorsqu’un être humain meurt de ne parler que de ses bienfaits. Commençons donc par souhaiter paix à l’âme du disparu.

Nous retenons tout d’abord de Moussa Traoré qu’il n’a jamais pris langue avec personne pour une quelconque partition de notre territoire national. Il faut dire et reconnaître que Moussa a continué un chantier débroussaillé par le régime de Modibo Keïta, en l’occurrence le soutien et l’entretien des orchestres régionaux et locaux; il a aussi institué en lieu et place des Semaines nationales de jeunesse de Modibo Keïta, les Biennales artistiques et culturelles du Mali. Par ces occasions, les jeunes de notre pays se rencontraient, s’interpénétraient convivialement et échangeaient leurs expériences sur tous les sujets et dans tous les domaines de la vie nationale et cela de Kayes à Kidal, de Gao à Sikasso, Ségou, Mopti, Tombouctou, etc. Ces Biennales se sont émoussées après 1987.

Rappelons que l’édition de 1989 a été avortée suite à l’éclatement de la rébellion touareg au Nord. Aussi, faut-il le dire, à l’occasion de la conférence des cadres, Moussa sillonnait tout le Mali pour s’enquérir des problèmes de la population et de la vie du parti (même si on ne lui disait pas la vérité).

À l’actif de Moussa Traoré, il faut noter aussi que pendant tout son règne, il n’avait jamais badiné avec la sécurité des citoyens. Pour preuve, comme sous Modibo Keïta, son armée imposait aux États voisins le respect du Mali. Enfin, au début de son règne, la nourriture était à la portée du Malien moyen.

Cependant, l’arbre ne saurait cacher la forêt et donc l’honnêteté intellectuelle commande de parler des crimes du régime de Moussa Traoré. Ce n’est pas ici l’occasion de faire des déballages sur les répressions sauvages et inhumaines contre des hommes et des femmes qui ont voulu penser par eux-mêmes et parler de leur pays.

Contentons-nous de dire que Moussa Traoré faisait des mois (5, 6, 7) sans payer aux travailleurs maliens un seul mois de salaire et aux élèves et étudiants un seul mois de bourse. Face à cette calamité, Moussa laissait entendre que les travailleurs qui ne peuvent pas supporter ce retard de salaire peuvent démissionner. Comme si la République était sa propriété ! La suite est connue. Bien de familles se sont disloquées du fait de la misère accablante. Les foyers n’existaient pratiquement plus, prostitution oblige. Par ailleurs, il faut dire avec juste raison que Moussa a torpillé la vie des intellectuels et en particulier des enseignants : la liberté d’expression leur était taillée sur mesure, les prisons fréquemment ouvertes pour eux.

Pendant ce temps, le vol, la concussion, le népotisme et les contrefaçons sont nés et se sont mués en mode de vie dans notre pays. Pendant ce temps se construisait la forteresse de la bureaucratie militaro-udepmiste. C’était donc le paradis pour une infime minorité d’hommes et de femmes et l’enfer terrestre pour les masses travailleuses de notre pays. C’est le cumul de ces répressions par l’ordre kaki et de cette situation de misère généralisée qui ont été l’argumentaire du mouvement dit démocratique pour soulever le peuple contre son régime. La liquidation des sociétés et entreprises d’État n’était pas pour servir utilement notre peuple travailleur.

Aussi et enfin, lors des événements de 1991, Moussa a promis de faire descendre l’enfer sur la tête des manifestants. Il disait aux jeunes du mouvement populaire que les vaux ne savent pas de quel bois s’échauffe le lion mais que leurs mères en savent quelque chose. Il a bien tenu cette cynique promesse à une population qui ne demandait que la justice et l’équité. Le bilan des tueries fut macabre: plus de 220 tués et des dizaines de mutilés et de disparus.

Le 26 mars 1991, le général Moussa Traoré est délogé de Koulouba par le lieutenant- colonel Amadou Toumani Touré (ATT) qui lui devait beaucoup, il faut le dire aussi. Comme pour dire que ATT a fait le coup d’État pour sauver Moussa de la vindicte populaire et trahir notre peuple qui a versé son sang.

Depuis son entrée et sa sortie de prison jusqu’à sa mort, le 15 septembre 2020, il sait convertit en grand homme de Dieu. C’est ainsi qu’il s’est donné corps et ‘‘âme’’ à la prière. Ces dix derrières années de sa vie, Moussa est devenu un fidèle adepte de l’islam. Est- ce pour dire qu’il a regretté les atrocités commises par son régime ? Peut- être pour  demander excuse à Dieu ! Mais au peuple malien, il n’a présenté ni le pardon ni le moindre remord pour ces atrocités. Comme s’il avait raison !

Sans être au très fond de sa conscience, le fait de se transformer en un ‘‘saint’’ de l’islam, en dit beaucoup. En tous cas, Amadou Hampâté Bah disait : «Une religion bien comprise et honnêtement exercée, selon les principes mêmes de son prophète, est un baume pour le cœur et les maladies de l’âme. Elle peut transformer l’homme et le libérer de ses esclaves intérieurs, si puissants et si néfastes

Dors en paix Général !

Fodé KEITA

Source : l inter de bamako 

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