Ils parcourent des centaines de kilomètres pour rallier la capitale malienne pour les études. Mais à l’arrivée, les étudiants venus des régions rencontrent d’énormes difficultés. Un chemin parsemé d’embûches.
Ils sont nombreux les bacheliers venant de l’intérieur du pays, qui ignorent qu’avoir le bac est synonyme du début d’une interminable descente aux enfers. Le rêve d’étudier dans un bon environnement, laisse place à une mésaventure qui ôte à certains le goût de la connaissance.
La réalité est que la décentralisation de l’université n’est pas pour demain. Ce qui fait que nous n’avons pas d’autre choix que de venir à Bamako où aller à Ségou.
La nouvelle formule d’inscription
La première difficulté concerne la préinscription en ligne. Cette innovation, rendue opérationnelle depuis 2015, est méconnue par la majorité des nouveaux bacheliers.
Ainsi, la joie de Ousmane Traoré, un nouveau bachelier originaire de Mopti, a été de courte durée. « Je ne savais pas qu’il y avait en amont la pré-inscription à faire sur l’adresse électronique www.campusmali.ml. En plus de cela, il y a les démarches protocolaires sur la création d’un compte, qui donnait la main libre au nouvel étudiant dans le choix de son établissement d’accueil », explique-t-il.
Contrairement à la formule classique d’inscription, la nouvelle libère l’étudiant des multiples tracasseries liées à la longue file d’attente, la « queue », comme on dit ici, ou la « chaîne » au Maghreb. Une véritable école de patience. Elle permet aussi d’éviter le racket lié à l’inscription que les étudiants ordinaires subissaient de la part des membres de la sulfureuse Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM).
Cependant les nouveaux bacheliers se plaignent de la difficulté d’accès au site réservé à la préinscription. Les problèmes de connexion et la réception de l’email d’approbation ou du texto de confirmation compliquent également les choses.
Parcours du combattant
Le campus universitaire est l’endroit privilégié pour les étudiants n’ayant pas de logeurs dans la capitale malienne. L’octroi d’un séjour annuel sur le campus est subordonné au paiement d’une cotisation annuelle de 10000 F CFA. Même là, il faut faire des pieds et des mains pour être parmi les bénéficiaires d’une place dans les chambres d’étudiants. Tout passant le plus souvent par le piston et la corruption.
À cela, s’ajoute aussi le tohu-bohu au sein des chambres d’internat et le problème de salubrité qui rendent le cadre de vie inapproprié à l’épanouissement des étudiants. La surpopulation dans les chambres et les périodes de tensions sporadiques entre les membres de l’AEEM, ou avec les forces de l’ordre sont des constats amers favorisant un climat de violence et d’insécurité au sein de l’espace universitaire.
Bourse et transport
Le retard dans le payement des bourses et les problèmes de transport font partie de la longue liste des difficultés qui assaillent l’étudiant. Les bus affrétés par le Cenou (Centre national des œuvres universitaires) pour assurer la mobilité des étudiants ne profitent pas à tous. Les bus ne sont pas assez nombreux et ne desservent pas certains quartiers de Bamako. Il faut se rendre sur « la colline du savoir », siège des universités, pour l’emprunter et rallier l’université de Kabala.
Le nouveau complexe universitaire de Kabala, qui se trouve à environ 20 km du centre-ville, aussi luisant qu’il soit fait, fait peur aux étudiants. Et pour cause. L’état chaotique des routes a déjà fait beaucoup de victimes. Les étudiants sont obligés de s’attrouper sur « la colline du Savoir », à Badalabougou, pour prendre les bus du Cenou.
C’est un calvaire pour d’autres qui pensaient que tout était beau et rose à l’université. Nos premiers jours à l’université de Bamako nous enseignent que derrière le village scolaire qui nous berce avec des mots doux, se trouve le gros village académique qui donne des coups à ses propres enfants.