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Un an après la chute du président IBK : Réactions mitigées des acteurs politiques

Le mercredi 18 août dernier marquait le premier anniversaire de la démission du président Ibrahim Boubacar Keïta, suite à une intervention de l’Armée. Plusieurs responsables politiques de notre pays donnent, ci-dessous, leurs opinions sur cet événement, point de départ de cette transition politique

 

Souleymane Koné, M5-RFP : «AVEC L’ARRIVÉE DU M5 À LA PRIMATURE, L’ESPOIR RENAÎT»

Un an après la chute de IBK, la situation du Mali reste difficile. La sécurité reste à améliorer sur l’ensemble du territoire. Il faut de gros efforts pour permettre au panier de la ménagère de sentir le vent du changement en cours. Des efforts sont faits pour apaiser le front social, même si cela n’exclut pas qu’il y ait, par ci par là, quelques syndicats autonomes qui sont toujours en situation de grève ou de fronde sociale. Il faut apaiser aussi le climat au sein des universités du Mali.

Mais tout cela, c’est parce qu’il n’est pas facile, en un an, de corriger ou de redresser un pays qu’on a mis sept ans à détruire, à enfoncer, à piétiner. Ce qui me paraît fondamental aujourd’hui, ce qu’il y a un espoir que demain les choses peuvent changer, parce que le pays a un cap et des dirigeants qui savent où ils vont, ce qu’ils vont faire. Il y a un climat d’apaisement qui est perceptible, les Maliens sont de plus en plus rassurés que leur pays peut avancer, que ce n’est pas une damnation d’être dans la situation où on nous a toujours maintenus.

Il faut regretter que sur un an, nous ayons perdu neuf mois pour rien, par l’immobilisme, par le manque de vision, à l’incapacité à regrouper les Maliens et surtout à faire appel aux forces du changement que le M5-RFP a représentées. Neuf mois perdus sur un an, vous comprendrez que depuis trois mois, il y a un frémissement, des efforts qui sont faits sur tous les plans. Ce qui me donne le droit de dire aujourd’hui qu’avec l’arrivée du M5 à la Primature, il y a un espoir qui renait. Notre devoir est d’entretenir, d’approfondir et de traduire concrètement cet espoir en une réalité sociale, politique, culturelle dans notre pays.

De toutes les façons, il n’est plus question de s’amuser avec le Mali comme IBK et son clan l’ont fait. Il n’est plus question de continuer à enfoncer ce pays. Quiconque s’aviserait à le faire, le payera cash, parce que les Maliens ont compris qu’on peut gérer leur pays autrement, qu’on doit avancer plutôt que de regarder dans le rétroviseur.

Il est absolument clair aujourd’hui qu’avec l’arrivée du M5 à la Primature et la rectification de la Transition, nous sommes sur la bonne voie. C’est cette voie qu’il faut continuer à approfondir, à baliser et surtout à embellir. Gageons qu’avec les réformes en cours, qu’avec le nouveau comportement que les Maliens sont en train d’adopter, de plus en plus, par rapport à la chose publique, nous aurons de meilleurs résultats d’ici la fin non seulement de la Transition, mais aussi que le pays sera réformé ».

Boubacar Touré, RPM : «LES ACTES POSÉS, DU DÉBUT DE LA TRANSITION À AUJOURD’HUI, NE SONT PAS RASSURANTS»

À l’An I du changement de régime, ma lecture est toute simple : l’équipe de la transition ne rassure pas. Premièrement, le décret relatif au Conseil national de Transition (CNT) a été violé au vu et au su de tout le monde. Il s’agit notamment du mode de désignation et la manière dont les désignations ont été faites, en ignorant superbement la classe politique et en coptant certains militants des partis politiques.

Deuxièmement, il n’y a plus de vice-président, pourtant cette disposition est consignée noir sur blanc dans la Charte de la transition. Donc, c’est une autre violation de la Charte. également, la Charte annonce un gouvernement de 25 membres au maximum.

Aujourd’hui, où est-ce qu’on en est avec l’équipe gouvernementale ? Par rapport à la gouvernance et la fameuse refondation, le président de la Transition, lors de sa dernière adresse à la Nation, a tiré la sonnette d’alarme sur le travail fractionnaire et d’exclusion planifié par le Premier ministre et son regroupement politique, le M5-RFP. Egalement, les justifications du deuxième coup d’état que Choguel Maïga appelle rectification. Rectification par rapport à quoi ? C’est fondamentalement par rapport à des ambitions personnelles. Est-ce le devenir du Mali qui est la priorité ou celui d’un élément constituant l’ensemble ?

Où est-ce qu’on en est avec la situation sécuritaire ? Cela faisait partie des reproches. Je crois que le goitre est en train de faire le tour du cou, on n’a pas bougé, à mon avis. La situation scolaire, même chose.

S’agissant des réformes politiques, ça ne bouge pas. L’actuel Premier ministre a reconnu le chronogramme présenté et adopté par le CNT du temps de Moctar Ouane. Où est-ce qu’on en est dans l’exécution ? Les premiers résultats doivent se manifester par l’organisation du référendum en octobre. Quel est le niveau de préparation desdites opérations ? Et d’autres séquences devaient suivre.

Au-delà des réformes politiques, il y a les tentatives de manipulation envisagées autour de l’organisation des Assises nationales de la refondation (ANR). Le président de la Transition a donné le ton en disant que cette refondation ira jusqu’au reformatage de l’Homme malien. Même si tu accordes cinq ans à la transition, est-ce qu’on peut reformater l’Homme malien qui est en cause aujourd’hui ?

Un mandat ne suffit pas pour refonder une Nation, pour reformer les hommes qui la constituent. Organiser ces ANR, c’est en réalité un gros secrétariat pour compiler les recommandations et résolutions de tous les fora que le Mali a connus ces dates récentes. Il y a également de la manipulation quand on glisse la notion de l’organe unique de gestion des élections. Le Mali, dans son histoire récente, a connu l’organe unique de gestion des élections, à l’époque présidé par Me Kassoum Tapo. Mais, pour quel résultat ? Cela a été l’une des élections les plus contestées au point que certains résultats ont été carrément annulés. Qu’il y ait organe unique ou organe déconcentré de gestion des élections, il y a toujours le même slogan : les vaincus parlent de fraude.

Alors, est-ce que cela réside au niveau de l’instrument chargé d’organiser ou de la culture politique même des acteurs ? C’est vrai, lors du Dialogue national inclusif, il a été retenu l’organe unique, mais c’était dans la dynamique des élections pour 2023. Donc, l’équipe en charge avait suffisamment de temps pour mettre un organe composé d’hommes consciencieux, de patriotes pour conduire nos élections avec moins de réclamations. Malheureusement, les deux interruptions constitutionnelles intervenues en août 2020 et mai 2021 n’ont fait que retarder le processus. Tous les actes posés, du début de la transition à aujourd’hui, ne sont pas rassurants.

Jeamille Bittar, Pôle politique de consensus : «L’AMORCE DU CHANGEMENT DEMANDÉ PAR LE PEUPLE EST EN MARCHE »

Pour moi, la vraie Transition a démarré il y a environ trois mois, carles neuf mois de gestion de Bah N’Daw et de Moctar Ouane étaient dans la continuité, c’était du IBK sans IBK. Maintenant, chacun a sa lecture des faits. Pour moi, ce bilan des neuf mois est carrément négatif. La première revendication du M5-RFP était le départ d’IBK et son régime, c’était au niveau de la lutte du M5-RFP. Mais, ce régime a demeuré et a continué à gérer les affaires.

Aujourd’hui, quand on regarde un peu sur la scène politique, les barons de ce régime mafieux n’ont jamais été inquiétés jouissant de tous les privilèges comme si de rien n’était en essayant de chercher à briguer la présidence de la République pour la plupart avec des élections précipitées dans la continuité.

Depuis trois mois sous la conduite du président Assimi Goïta et du Premier ministre Choguel Maïga, les Maliens ont repris espoir par un nouveau mode de gestion de l’état. Ce nouveau mode de gestion de l’état est caractérisé par la prise en charge des 10 points et des 17 mesures du M5-RFP. Donc, c’est dire que l’amorce du changement demandé par le peuple est en marche.

Hamidou Doumbia, parti Yelema : «LA SITUATION N’A PAS ASSEZ ÉVOLUÉ»

Si on s’en tient aux causes qui ont fait tomber IBK notamment la mauvaise gouvernance, le non respect de ses engagements et son incapacité à sécuriser le pays et qu’on le compare à ce que nous vivons aujourd’hui, nous pouvons dire que la situation n’a pas assez évolué.

Sur le plan de gouvernance et de la lutte contre la corruption, nous pouvons dire qu’à ce niveau il n’y a eu que des déclarations d’intention jusqu’à présent pas d’actions majeures dans ce sens. Nous attendons toujours des procès sur les dossiers de corruption. Pis, l’audit qui avait été demandé sur la Loi d’orientation et de programmation militaire a été remplacé par une simple évaluation dans le PAG du gouvernement présenté par le PM Choguel Maïga.

Sur le respect des textes qui est aussi un des baromètres de la bonne gouvernance, nous pouvons noter la violation répétitive de la Charte de la Transition et la non application de certaines lois de la République notamment la loi 052 portant sur le genre dans la mise en place des gouvernements successifs et la non application de l’article 39 par le gouvernement du Premier ministre Choguel Maïga.

La sécurité sur le territoire n’a pas assez évolué, car l’état a toujours du mal à asseoir sa gouvernance sur une grande partie du territoire. à titre d’illustration, sur la base du dernier rapport trimestriel de la Minusma, nous pouvons noter un recul de 4 % en termes de présence de nos sous-préfets au centre et au nord du pays soit 26/157 en 2020 et 20/157 en 2021.

Sur le plan des réformes annoncées en grande pompe au début de la Transition, elles ont du mal à voir le jour, certaines ne pourront même pas avoir lieu à cause du temps que nous avons perdu malheureusement.

Sur le plan de l’éducation, la Transition peine à s’entendre avec les enseignants qui réclament l’application de l’article 39. Par ailleurs, nous assistons à la fermeture de 1.595 écoles aujourd’hui contre 1.261 au moment où IBK chutait.

Il faut aujourd’hui travailler à corriger les insuffisances afin de pouvoir terminer en beauté à travers le retour de notre pays à un ordre constitutionnel normal.

Amadou Aya, Espérance Nouvelle-Jigiya kura : «UN AN APRÈS, NOUS AVONS UN BILAN QUI N’EST PAS RELUISANT»

Un an après le coup d’état contre IBK, les promesses ne sont pas tenues, les engagements ne sont pas respectés. C’est un an où les Maliens sont en train de tituber, parce que la Transition même se cherche. D’août 2020 à maintenant, il y a eu un autre coup d’état, changement encore de trajectoire. Nous ne savons pas où cette trajectoire va nous mener.

En ce qui concerne la lutte implacable contre l’insécurité, nous constatons que le pays n’est pas sécurisé, que l’administration n’a pas encore commencé à se redéployer sur l’ensemble du territoire. La crise sociale s’exacerbe, les tensions syndicales nous font croire qu’il n’y a pas une stabilité sociale. à cela s’ajoute la crise économique. Les prix des denrées de première nécessité ont flambé. Les paysans, compte tenu de l’insécurité dans beaucoup de localités, n’ont pas semé. Donc, l’avenir de l’agriculture dans ces zones est compromis, ce qui présage une famine, que Dieu nous en garde.

En ce qui concerne l’organisation des élections prévues au mois de février 2022, le gouvernement de Choguel Maïga ne nous montre aucun signe indiquant qu’il veut aller aux élections. En lieu et place, ce sont des faux débats qui nous sont imposés par rapport à l’organe unique de gestions des élections. Cette question de l’organe unique avait déjà été vidée par le gouvernement de Moctar Ouane.

Un an après, nous avons un bilan qui n’est pas reluisant et qui est très décevant ».

Propos recueillis par
Massa SIDIBÉ

Source : L’ESSOR

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