L’entraîneur de l’équipe d’Italie, Cesare Prandelli, envisage d’interdire aux joueurs de la sélection l’utilisation de Twitter, durant la Coupe du monde 2014 au Brésil. Une mesure qui se multiplie ces dernières années dans le monde du sport.
L’Italie a son billet pour le Mondial-2014 en poche. Les Transalpins peuvent donc, dès à présent, commencer à préparer leur coupe du Monde. Bizarrement, l’une des premières mesures, que compte prendre la fédération italienne, ne concerne pas le domaine sportif. “Nous sommes en train d’étudier l’abolition de l’utilisation des réseaux sociaux par les joueurs. Nous verrons, si nous pourrons la mettre en place immédiatement, mais il y aura certainement une restriction durant le Mondial”, a ainsi déclaré le sélectionneur de la Squadra Azzura, Cesare Prandelli, le 15 octobre à la RAI. Une mesure qui n’a rien d’inédit dans le monde du sport.
Mais pourquoi interdire aux sportifs de communiquer ? Pourquoi les priver de leur liberté d’expression ? Peut-être pour éviter des dérapages inacceptables moralement et juridiquement, qui ont par exemple coûté leur place à deux athlètes lors des JO-2012.
Après s’être incliné, alors qu’il était le capitaine de la sélection suisse, face à la Corée du Sud (2-1), Michel Morganella a totalement craqué sur son compte Twitter. “Je fonsde out les coreen allez sout vous lebru. Ahahahhahahaah deband zotre”, avait écrit en verlan le latéral de Palerme. Traduction : “Je défonce tous les Coréens, allez tous vous brûler. Ahahahhahahaah bande de trisos.”
La triple sauteuse Paraskevi Papachristou, 23 ans, avait elle été exclue quelques jours auparavant suite à son tweet raciste : “Avec autant d’Africains en Grèce, au moins les moustiques du Nil occidental mangeront de la nourriture maison.”
“Il y a danger à s’épandre sur Twitter”
Deux exemples parmi d’autres. Ainsi, à l’été 2012, le joueur d’Arsenal, Emmanuel Frimpong, s’était tristement illustré. Attaqué par un supporter de Tottenham – “I prayed you break your arms and legs” (“J’ai prié pour que tu te casses les bras et les jambes”) – Frimpong s’est laissé aller à un “Scum Yid” (pourriture de juif), en référence à l’importante communauté juive supportant les Spurs.
Toujours à l’été 2012, le français Adil Rami, provoqué et insulté par un supporter des Bleus, a gratifié Twitter d’une réponse tout en finesse : “N’oublie pas d’embrasser ta p… de mère de ma part, je dois sûrement lui manquer 😉 G FDP.”
Mais les footballeurs n’ont pas le monopole des dérapages. En septembre dernier, le basketteur lituanien, Ksistof Lavrinovic, a profité du départ de son équipe pour l’Euro pour dessiner au stylo, une croix gammée sur son sac. La photo de son œuvre a immédiatement circulé sur Twitter, et provoqué de vives polémiques.
C’est sans doute pour cela que les instances sportives tentent de prévenir, plutôt que guérir, avec des arguments plus ou moins recevables.
Lors de la coupe du Monde 2010, les joueurs de l’équipe d’Angleterre et d’Espagne avaient déjà interdiction de surfer sur les réseaux sociaux, car “ils n’aideraient pas les joueurs à se préparer pour leurs matches.” Lors de l’Euro-2012, les joueurs du Danemark furent également privés de Facebook et de Twitter, le sélectionneur Morten Olsen voulant éviter qu’ils perdent du temps, de l’énergie et de la concentration sur les réseaux sociaux.
Laurent Blanc ne disait pas l’inverse en juin 2012, peu avant la compétition dans les colonnes du “Journal du dimanche”. Il n’a, semble-t-il, pas été entendu par Adil Rami. “Vous avez un devoir de confidentialité. Il y a danger à s’épandre sur Twitter, Facebook ou des blogs, expliquait ainsi l’ancien sélectionneur des Bleus. Il faut avoir une vigilance extrême en ces temps de vie commune. Ça peut partir en vrille pour une réflexion, un état d’âme, dont les médias s’empareront tout de suite.”
En France, la loi consacre la liberté d’expression des sportifs
Pour autant en France, l’article L333-4 du Code du sport stipule que “les fédérations sportives, les sociétés sportives et les organisateurs de manifestations sportives ne peuvent, en leur qualité de détenteur des droits d’exploitation, imposer aux sportifs participant à une manifestation ou à une compétition, aucune obligation portant atteinte à leur liberté d’expression.”
Tous les sports sont touchés par cette phobie de Twitter. En 2009, la NBA a mis en place un règlement pour interdire aux joueurs de poster des photos ou des messages 45 minutes avant et après une rencontre. La même année, l’ATP (Association mondiale des joueurs de tennis professionnels) lançait un avertissement aux joueurs. Publier en temps réel des informations sur sa forme physique pouvait troubler la bonne tenue des paris en ligne.
Le CIO a, lui aussi, suivi la tendance. Le Comité d’organisation des JO de Londres a ainsi décidé d’interdire aux athlètes et au public de tweeter pendant les événements sportifs. Pourquoi donc ? Pour garantir aux médias et aux sponsors la totale maîtrise de l’exclusivité pendant les JO. Ainsi, il était interdit aux athlètes de tweeter ou bloguer dans un “but commercial et/ou publicitaire, et que cela induise une association indue d’une marque non-partenaire au CIO, aux JO ou au mouvement Olympique” Pour éviter les problèmes, le comité olympique italien a tout bonnement interdit aux membres de sa délégation toute publication, le temps de la compétition. Mais voilà, Paraskevi Papachristou et Michel Morganella ne sont pas Italiens.
Source : France 24