Tunis – Au moins huit migrants sont morts noyés dans le naufrage de leur embarcation qui a heurté dimanche soir un navire militaire tunisien au large de l’archipel de Kerkennah, a indiqué lundi le ministère de la Défense.
Ce drame intervient alors que le nombre de départs clandestins vers l’Italie depuis la Tunisie a beaucoup augmenté ces dernières semaines, selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).
Un navire de la marine tunisienne “s’est approché dimanche soir d’une embarcation non identifiée à 54 km de (la principale île de) Kerkennah, et l’embarcation s’est heurtée au navire militaire, ce qui a entraîné son naufrage”, a indiqué à l’AFP le porte-parole du ministère, Belhassen Oueslati.
La marine tunisienne a repêché 38 rescapés, tous Tunisiens, ainsi que huit corps, a-t-il précisé. Les survivants ont été rapatriés sur une base militaire de Sfax, grande ville côtière du sud-est.
Les opérations de sauvetage étaient toujours en cours lundi soir pour tenter de retrouver des disparus, a-t-il ajouté, sans pouvoir préciser combien de personnes se trouvaient à bord du bateau.
Selon des médias italiens, il y avait 70 personnes dans l’embarcation qui était partie de Sfax. Beaucoup ont survécu parce qu’elles se sont jetées à l’eau avant la collision, selon la même source.
Le drame s’est déroulé dans la zone de recherches et de secours dévolue aux gardes-côtes maltais. Interrogés par l’AFP, ces derniers ont confirmé avoir été informés d’une collision et avoir envoyé des secours, sans plus de précisions.
Les départs de migrants de Tunisie vers le sud de l’Italie, notamment la Sicile, se sont multipliés depuis cet été. Les migrants débarquent souvent de nuit pour ne pas être repérés.
“Les Tunisiens (…) ne veulent pas être interceptés parce que ceux qui le sont écopent de deux mois de prison en Tunisie,” a expliqué à l’AFP Flavio di Giacomo, porte-parole en Italie de l’OIM. Il a fait état de 1.400 Tunisiens arrivés à Lampedusa et dans l’ouest de la Sicile au cours du seul mois de septembre, contre 1.200 en Italie pour toute l’année 2016.
“Il est difficile de comprendre ce qui se passe en Tunisie, pourquoi il y a cette augmentation en septembre”, souligne-t-il. “Certains en Tunisie disent que les jeunes ont travaillé pendant l’été et ont gagné de quoi payer les passeurs, mais alors pourquoi cette année et pas en septembre dernier? Les départs semblent plus organisés”.
Un accord bilatéral entre Rome et Tunis prévoit le rapatriement des Tunisiens débarquant en Italie, mais au rythme de quelques dizaines par semaine. Avec les arrivées actuelles, beaucoup reçoivent uniquement une injonction à quitter le territoire et disparaissent dans la nature.
Près d’un jeune Tunisien sur deux issu de quartiers populaires réfléchit à quitter son pays, et un sur trois se dit prêt à émigrer clandestinement si la situation l’impose, selon une étude publiée fin 2016 par une ONG active sur les questions de migrations, le Forum Tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES).
Elle explique cela par l’augmentation du chômage et de la pauvreté, tandis que les conflits sociaux se multiplient.
Nombre de migrants ont fait naufrage et péri par le passé au large de l’archipel de Kerkennah.
En février 2011 notamment, une embarcation transportant environ 120 migrants avait chaviré, selon des survivants après que des gardes-côtes tunisiens avaient “délibérément foncé” sur eux. Cinq personnes étaient mortes et 30 disparues. Le ministère tunisien de la Défense avait démenti toute responsabilité des gardes-côtes, soulignant avoir repêché cinq corps et sauvé 99 personnes.
(©AFP / 09 octobre 2017 18h22)