Bamako, – Des enquêteurs du pôle judiciaire spécialisé
de lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée au
Mali se sont rendus dimanche dans le village peul où quelque 160 habitants ont
été tués le 23 mars, a-t-on appris de sources concordantes.
La veille, des enquêteurs de la Mission de l’ONU au Mali (Minusma) étaient
allés dans le village d’Ogossagou, théâtre de cette tuerie imputée à des
membres présumés de groupes de chasseurs dogons, près de la frontière avec le
Burkina Faso, selon des témoins et les autorités locales.
Cinq hommes reconnus par des rescapés comme de possibles participants à la
tuerie ont été arrêtés et transférés à Bamako, avait-on appris vendredi de
sources militaires maliennes.
L’équipe du pôle judiciaire dirigé par le procureur Boubacar Sidiki Samaké,
en provenance de Bamako, est arrivée vendredi à Mopti (centre) “pour la
manifestation de la vérité sur ces actes criminels et barbares”, a déclaré à
l’AFP le gouverneur de région, le général Sidi Alassane Touré. Elle doit
travailler “en synergie avec l’équipe de Mopti conduite par le procureur de la
République près le tribunal de grande instance”.
Cette équipe a quitté Mopti dimanche matin pour Ogossagou, a-t-on appris
auprès des autorités locales et des participants.
“C’est une dizaine d’enquêteurs de la police et de la gendarmerie qui ont
été mobilisés pour se rendre sur le terrain”, a indiqué à l’AFP un membre de
l’équipe sous le couvert de l’anonymat. “Nous allons écouter les témoignages
des rescapés, recueillir des informations et procéder à des prélèvements par
notre section de police scientifique”.
“Nous sommes une équipe pluridisciplinaire”, a souligné un autre membre,
officier de police judiciaire, estimant que “le plus difficile sera
l’identification des corps calcinés”.
Lors de l’annonce le 26 mars de l’envoi d’une équipe de 13 enquêteurs, le
Haut-commissariat des Nations unies aux droits de l’Homme (HCDH) avait
souligné que, depuis mars 2018, les “agressions intercommunautaires” dans la
région de Mopti avaient fait quelque 600 morts et des milliers de déplacés.
De plus, 219 personnes ont été tuées depuis le début de l’année dans “des
exactions commises par de soi-disant groupes d’autodéfense cherchant à
déraciner des groupes extrémistes violents”, selon le HCDH.
Depuis l’apparition il y a quatre ans dans le centre du Mali du groupe
jihadiste du prédicateur Amadou Koufa, recrutant prioritairement parmi les
Peuls, traditionnellement éleveurs, les affrontements se multiplient entre
cette communauté et les ethnies bambara et dogon, pratiquant essentiellement
l’agriculture, qui ont créé leurs “groupes d’autodéfense”.
Le gouvernement a prononcé le 24 mars la dissolution de l’association de
chasseurs “Dan Nan Ambassagou”, qui a démenti toute implication dans la tuerie.
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AFP