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Transition malienne : les élections sont-elles une « priorité absolue » ?

Au Mali, l’ère du changement semble être encore loin. La Transition sur laquelle tous les espoirs étaient fondés réussira difficilement cette entreprise vu les nombreuses pressions qui pèsent sur elle. Le Mali n’est pas loin d’une nouvelle crise post-électorale s’il faut aller aux élections dans les conditions actuelles du pays.

 

2020 n’est toujours pas qu’un simple souvenir pour les Maliens. Les événements liés aux dernières élections législatives et qui ont précipité le départ du président d’alors, Ibrahim Boubacar Keïta, semblent leur coller à la peau.

Après plusieurs reports, en raison non seulement d’une grève des magistrats, mais aussi de la dégradation de la sécurité et des querelles politiques, les législatives de 2020 ont finalement eu lieu en mars et avril. Cela malgré la crise sanitaire liée à la pandémie de la covid-19. Les partenaires du Mali ainsi que des experts ont estimé important d’aller à ces élections qui devraient contribuer à rétablir l’autorité de l’État malien sur tous les territoires.

Des experts ou des utopistes

« Ce n’est pas parce qu’on a un œil crevé que l’on s’abstient de se laver le visage ». Ce proverbe malien semblait être le slogan du régime déchu et ses partenaires en s’engageant dans ces législatives en une période assez critique de la vie de la nation. Des partis de l’opposition avaient exprimé leurs inquiétudes quant à la bonne tenue de ce scrutin vu que toutes les régions du pays n’étaient pas accessibles à cause de la crise sécuritaire. Malgré tout, sous la pression, les campagnes ont été lancées. À cette occasion, l’ancien chef de file de l’opposition malienne, feu Soumaila Cissé a été enlevé dans son fief à Nianfunké, le 25 mars.

La proclamation des résultats définitifs de ce scrutin, le 30 avril 2020, a donné lieu à de vives manifestations. Certains manifestants dénonçaient des cas de fraudes massives surtout dans certaines régions du nord, où le taux de participation s’est élevé à plus de 85 % à Kidal pour une moyenne nationale de 35,6 %, avec des députés élus avec 91 % ou 97 % des suffrages, a-t-on indiqué à l’époque.

Un mécontentement généralisé s’est alors emparé de la population. Une situation qui a fini par fédérer la quasi-totalité des forces vives de la nation au sein du Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP) pour faire partir le régime IBK. Le « prophétisme » des partenaires et des experts devenait ainsi une utopie.

Les élections, une priorité absolue

Le même scénario est en gestation pour 2022. Car 2020 ne semble pas avoir servi de leçon. Pour le même motif de légitimité constitutionnelle, on met la pression sur les autorités de la transition afin d’aller à des élections générales en 2022. Pourtant, le pays est miné par une insécurité gravissime avec plusieurs déplacés et réfugiés. Durant la seule période du premier trimestre 2021, 145 civils ont été tués au cours d’attaques terroristes au Mali, selon le premier rapport trimestriel du secrétaire général des Nations-Unis.

Tout comme en 2020, le front social est déjà en ébullition en raison de différentes revendications syndicales. Les réformes politiques et institutionnelles annoncées par les autorités de la transition peinent à se concrétiser. « Dans le cadre des prochaines élections, il y aura une nouvelle Ceni qui comprendra à la fois des représentants de l’administration, des représentants de la classe politique, des représentants de la société civile comme cela se fait », a indiqué Zéni Moulaye, ministre des Affaires étrangères du Mali, à Lomé, au terme de la deuxième réunion du groupe de soutien à la transition, le 8 mars dernier.

Mais tous ceux-ci ne semblent pas dire grand-chose à la communauté internationale qui ne demande que d’accélérer les choses pour aboutir aux élections en début 2022. La représentante des USA auprès des Nations Unies, Linda Thomas-Greenfield exhorte le gouvernement malien à publier un calendrier définitif concernant les dates du processus électoral. Selon ses précisions, « la priorité absolue de la transition doit être l’organisation et la tenue des élections libres et justes avant la fin de la transition ». Il est alors clair à travers ces propos que la crise sécuritaire ne semble pas être une priorité absolue.

À quand la fin ?

Certes il faut aller aux élections, mais au préalable, les partenaires du Mali doivent prêter main-forte aux autorités de la transition afin de réussir à stabiliser le pays. Sans cette stabilisation, il sera quasiment impossible d’aller à des élections libres, justes et apaisées. Tenir les élections dans la l’état actuel du pays revient à ouvrir la voie à de nouvelles contestations post-électorales, comme en 2020. Or, dans quel intérêt on ferait plonger ce pays dans une nouvelle crise politico-sociale juste après une transition installée pour apporter « des correctifs de sécurité » à un système démocratique malade des années de mauvaise gouvernance ?

Pour éviter ce cycle infernal de retour à la case de départ, il importe d’accompagner ces autorités de la transition à poser les jalons de la nouvelle république à travers des réformes politiques et institutionnelles assez conséquentes, comme le suggèrent déjà beaucoup de membres de la société civile malienne. L’instauration d’une bonne gouvernance peut aider le pays à conjuguer ses innombrables crises au passé. En attendant, les élections ne sont pas encore aujourd’hui une « priorité absolue ».

Fousseni Togola

Source : Phileingora.org

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