Les importateurs de véhicules au Mali sont fous de rage à la suite d’une nouvelle forme de taxation que les services des Douanes, à travers le Guichet Unique applique à leur égard. En plus des frais de dédouanement de leurs véhicules, le Guichet Unique de la Douane exige le paiement d’une Taxe Supplémentaire (TS) pour ce qui est de la liquidation des droits des véhicules. Un véritable choc à encaisser pour les transitaires et les importateurs de véhicules au Mali.
La corruption ou la concussion semble être le sport favori au niveau du Guichet unique de Bamako avec l’augmentation informelle, dans le jargon des professionnels, ce qu’on appelle ‘’Travail Supplémentaire’’ (TS). Des déclarants transitaires en Douane disent être obligés de verser un pot de vin très conséquent, sans reçu ni aucun document en contrepartie pour la liquidation du droit d’un véhicule. À cette allure on assiste à un véritable festival des brigands.
Si le Guichet Unique de la Douane a été mise en place, dit-on, pour faciliter les affaires, encourager l’entreprenariat et le commerce, favoriser les rentrées d’argent dans les caisses de l’État, tout porte à croire que le nouveau chef de bureau de cette boîte, M. Baye Ag Assony et son équipe tendent vers une institutionnalisation du paiement du Travail Supplémentaire (TS) pour ce qui est de la liquidation du droit d’un véhicule.
Ne sachant plus à quel saint se vouer, les déclarants transitaires en Douane nous expliquent leur calvaire depuis l’arrivé du nouveau patron du guichet unique. Selon eux, des agents du guichet unique ne se soucient que de leur cent sous. Du coup, ils exigent le paiement du TS avant les droits de dédouanement des véhicules dont les frais sont destinés à renflouer les caisses du Trésor public. Ce comportement peu catholique est propre à compromettre les recettes douanières au Mali.
La foire des larrons
Des jeunes déclarants transitaires en douane dénoncent tout ce système orchestré, selon eux, par un réseau de bandits douaniers à col blanc dont le chef d’orchestre n’est autre personne que le patron du Guichet Unique. « Le système de dédouanement est mal en point à cause de la conduite malsaine du Patron du Guichet Unique et de certains agents véreux. En plus d’augmenter le montant du fameux TS, des agents de la Douane se convertissent en transitaires», regrette notre interlocuteur qui a requis l’anonymat par peur de ne pas voir ses dossiers bloqués.
Ces jeunes transitaires affirment que le TS est la somme conventionnelle entre eux et la douane depuis des années. Mais, poursuivent-ils, cette somme que les douaniers se partagent à la fin de chaque semaine est devenue obligatoire au détriment des droits de dédouanement des véhicules. De leur point de vue, dans sa course effrénée de faire fortune, le Directeur du Guichet Unique des Douanes, Baye Ag Assony dès sa prise de fonction, a d’abord fait flamber le montant de la TS versé au guichet par les services de transit dans leur démarche de dédouanement des véhicules. À les en croire, le prix à débourser pour le TS pour les petites voitures a, subitement, grimpé. Selon eux, de 10.000 F CFA, il y a eu une augmentation de 50 000 F CFA. S’agissant des poids lourds, la TS initialement arrêté à 50 000 F CFA a été majoré à 100.000 F CFA.
En plus de ces majorations, ce qui est surprenant de la part de ces gabelous sans vergogne au niveau du Guichet Unique de la Douane, c’est le fait de prioriser le TS (leur intérêt) aux dépens des avantages de la Nation malienne. Nos interlocuteurs ont tenu à faire savoir que s’ils ne payent pas le TS avant les droits de dédouanement, le T1(le papier du véhicule) ne sera jamais parafé.
Plus grave, ils crient à une autre injustice dont ils sont victimes de la part des douaniers. Il s’agit de l’heure d’arrêt de la signature du T1. Ils pensent qu’à partir de 12 heures 30 minutes, les douaniers refusent de parafer leur papier. Mais, disent-ils, au-delà de cette heure, les douaniers prennent contact avec les clients pour faire le travail à la place des déclarants transitaires. Mais les transitaires ont compris que ce système des douaniers est une stratégie pour les empêcher de faire leur travail.
Des témoignages bouleversants
Les transitaires commencent à désespérer de cette structure qui, si elle continue de la sorte ne répondra plus à ses obligations de service public, cela par la faute de certains agents avides de pot-de-vin.
Un transitaire que nous avons rencontré relate son calvaire en ces termes : « le Guichet Unique ressemble aujourd’hui à un marché. Dès l’entrée, on remarque un petit attroupement devant le bureau situé sous la véranda. En face, un autre petit monde formé de jeunes messieurs et dames. On comprend qu’il s’agit de transitaires venus régler les frais administratifs. Le visiteur non habitué des lieux s’oriente difficilement dans ce dédale », affirme notre source.
Selon lui, dédouaner un véhicule au Mali, est un parcours de combattant. « Même, ayant payé tous les frais exigés, le propriétaire doit encore attendre deux mois ou plus pour pouvoir entrer en possession de sa carte grise dont l’obtention relève d’un autre parcours de combattant avec tous les dessous de table réclamés à travers la rétention des documents, oublions la plaque minéralogique qui, a son propre chemin de croix, toujours assujetti aux pots de vin », regrette notre interlocuteur. Avant de déplorer que certains agents de cette boîte dont un nommé « Diaby » se croit tout permis au niveau de cette boîte.
«Ce fameux Diaby arrive tardivement au bureau. Une fois sur place, il ressort pour prendre son petit déjeuner, change sa tenue. Puis il entre et ressort d’un autre bureau avant de continuer à tourner dans la cour. Pendant ce temps, les usagers attendent, incapables d’aller vaquer à leurs occupations. C’est vers 10h ou plus qu’il daigne se mettre à la tâche », regrette notre source.
Une fois l’étape de «Diaby » passée, il y a encore à prendre son mal en patience et ravaler son amour propre, oublier les droits de l’usager et toutes les bonnes litanies à propos de la facilitation des procédures pour faire face au bureau qui donne l’ordre d’entrée de la marchandise.
«Là aussi, c’est la même condescendance envers les transitaires. Pendant ce temps, aux différentes frontières, piaffent d’impatience tous ceux qui assurent les échanges entre notre pays et les pays côtiers. Ils attendent dans la nature quel que soit le temps qu’il faut. Ils attendent, suspendus aux caprices des gabelous. Tout cela pour s’acquitter dûment des frais dont l’État a besoin pour payer ces mêmes fonctionnaires véreux et d’autres travailleurs. Comment comprendre un tel comportement à l’heure où on parle de reforme de l’administration ? Si de tels agents foisonnent dans les services publics, comment espérer un changement dans ce pays ? »
C’est pourquoi, les transitaires se demandent si le premier responsable de ce service n’est pas au parfum de toutes ces manigances et du laisser aller au niveau de sa structure.
En tout cas, ces transitaires sont formels : « Les efforts devraient continuer à tous les niveaux et partout dans l’administration. Le renouveau de l’action publique ne saurait être palpable tant qu’il y aura des agents qui croient que l’autorité dont ils disposent est un moyen d’assujettissement, de répression ou de gains uniquement aux dépens de leurs concitoyens. Pire, des agents peu soucieux compromettent l’action et l’image du gouvernement qui tente de marquer la rupture. De tels individus ne méritent pas de servir là où ils sont ».
À signaler que, lorsque notre rédaction a été mise au parfum de ces informations, une équipe d’enquête a effectué le déplacement vers le bureau du chef du Guichet Unique. Et cela, pour recouper l’information, afin de prendre sa version des faits. L’équipe a fait deux tours pour entrer en contact avec lui. Mais toutes les tentatives ont échoué. Cependant, le refus de rencontrer la presse peut être une preuve palpable que le Directeur du Guichet Unique, Monsieur Baye Assony, est loin d’être un homme clair dans cette affaire. Aussi, le chef du syndicat des transitaires au niveau du guichet unique, communément appelé, ‘’jumeau’’ a décliné la rencontre avec la presse.
En tout cas, le Directeur général de la Douane malienne, Mahamet Doucara, est interpellés pour revoir la conduite susceptible de compromettre les recettes douanières, une chose préjudiciable à l’Économie du pays. Et si rien n’est fait pour arrêter ce système, il risque de saper les efforts de Mahamet Doucara, en termes d’objectif annuel de recettes douanières. Car, le chef de bureau du Guichet unique, Baye Ag Assony, semble avoir un autre agenda que le sien. À savoir : se servir délibérément, même au détriment du Trésor public et de la réputation de son chef hiérarchique qui l’a placé à ce poste.
Arouna Traoré
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